2  -  Évaluation clinique du nouveau-né à terme

2 . 1  -  En salle de naissance

2 . 1 . 1  -  Soins systématiques pour tout nouveau-né


Généralités


L’anticipation de toute situation susceptible d’être à risque immédiat est la règle.

Le dossier obstétrical comporte des données indispensables : les antécédents familiaux et particulièrement ceux de la mère (gynéco-obstétricaux et médicaux, notamment affections chroniques susceptibles de retentir sur la santé de l’enfant, sérologies, groupe sanguin), le suivi de la grossesse, les échographies, le terme (= âge gestationnel), les éventuelles anomalies dépistées par un diagnostic anténatal, l’état clinique de la mère (dont signes d’infection) et le monitoring cardiaque fœtal durant l’accouchement.

Chaque naissance nécessite la présence d’au moins une personne entraînée (sage-femme ou pédiatre) aux premiers gestes de prise en charge, et s’occupant uniquement de ce nouveau-né (une personne par enfant en cas de naissances multiples).

Certains gestes sont systématiques (tableau 1.1), notamment un examen clinique précoce, appareil par appareil, qui a pour objectif d’apprécier non seulement la qualité de l’adaptation à la vie extra-utérine, mais aussi d’éliminer une anomalie morphologique, nécessitant une prise en charge rapide.

Tableau 1.1 Synthèse des soins systématiques du nouveau-né à terme
Dans un premier temps, dès la naissance de l’enfant
– Clampage et section du cordon
– Évaluation de la vitalité de l’enfant (score d’Apgar à 1, 5 et 10 minutes)
– Placement sur le ventre de la mère, séchage soigneux, bonnet (prévention de l’hypothermie)
– Mise au sein dans la première heure de vie si la mère souhaite allaiter
Dans un deuxième temps, mais avant le départ de la salle de naissance pour les suites de couches
– Examen clinique initial, qui sera répété au cours du séjour en maternité
– Vérification de la perméabilité des choanes, de l’anus et de l’œsophage
– Mesure des paramètres de naissance (TN, PN, PCN) et consignation dans le carnet de santé
– Soins du cordon et vérification de la présence de 2 artères et 1 veine ombilicales
– Désinfection oculaire par collyre antibiotique (prévention de la conjonctivite à gonocoque)
– Administration de vitamine K1 per os (renouvelée dans la 1re semaine de vie), ou par voie IV si facteurs de risque particuliers (prévention de la maladie hémorragique du nouveau-né)
– Mise en place de bracelets d’identification

Précisions à propos de certaines étapes

Le score d’Apgar (tableau 1.2) est établi à 1, 5 et 10 minutes de vie.

Tableau 1.2 Score d’Apgar
Paramètres012
Battements cardiaquesAbsents< 100/min≥ 100/min
Mouvements respiratoiresAbsentsLents, irréguliersVigoureux, avec cris
Tonus musculaireNulFaible (légère flexion des extrémités)Fort (quadriflexion, mouvements actifs)
ColorationGlobalement bleue ou pâleCorps rose

Extrémités bleues
Globalement rose
Réactivité à la stimulationNulleFaible (grimace)Vive (cris, toux)

La cotation de ce score comprend cinq paramètres chiffrés de 0 à 2, permettant d’évaluer la qualité de l’adaptation du nouveau-né à la vie extra-utérine : fréquence cardiaque (pouls au cordon), mouvements respiratoires, réactivité, tonus musculaire, coloration. Le nouveau-né normal a un score d’Apgar ≥ 7.

La prévention de l’hypothermie est essentielle.

L’enfant doit naître dans une atmosphère chaude (≈ 24 °C), et bénéficier d’un séchage soigneux avec un linge propre stérile. Le nouveau-né normal est ensuite placé en peau à peau sur la poitrine de sa mère ; si son état nécessite des soins urgents, il est placé sur une table radiante.

Le dépistage de l’atrésie des choanes peut être effectué à l’aide d’un miroir placé devant la narine (présence de buée = choane perméable) et ne nécessite pas le passage systématique d’une sonde. La désobstruction rhinopharyngée n’est pas nécessaire en l’absence de détresse respiratoire ou d’encombrement.

Le test à la seringue, qui consiste à injecter rapidement de l’air dans une sonde orogastrique à la recherche d’un bruit aérique au niveau du creux épigastrique et qui permet d’éliminer une atrésie de l’œsophage, n’est plus systématique dans de nombreuses maternités (mais effectué uniquement sur signes d’appel).

La perméabilité anale est vérifiée par l’inspection et l’émission de méconium dans un délai normal.

Les soins du cordon ombilical consistent en la pose d’un clamp, la section avec ciseaux stériles et désinfection de la zone de section (à la chlorexidine alcoolique), la vérification de la présence de 2 artères et de 1 veine ombilicales, puis la protection par une compresse stérile.

Une antibioprophylaxie conjonctivale est recommandée, notamment en cas d’antécédents et/ou de facteurs de risque d’IST (grossesse non ou mal suivie) chez les parents. Elle consiste en l’administration d’une goutte de collyre antibiotique (par ex. : rifamycine) dans chaque œil du nouveau-né.

La prévention de la maladie hémorragique du nouveau-né (taux de facteurs vitamine K-dépendants ≈ 35 %, jusqu’à l’âge de 3–6 mois) consiste en l’administration per os de 2 mg de vitamine K1 à la naissance et au 3e jour de vie. En cas d’allaitement maternel exclusif, le relais à la même dose sera hebdomadaire.

Retenir le tableau de synthèse concernant les soins systématiques.

2 . 1 . 2  -  Assistance à l’adaptation à la vie extra-utérine


Généralités


Entre 6 et 10 % des nouveau-nés nécessitent une assistance spécifique.

Ces situations sont souvent prévisibles grâce à une bonne communication avec l’équipe obstétricale assurant l’accouchement de la mère (tableau 1.3).

Tableau 1.3 Situations risquant de compromettre l’adaptation à la vie extra-utérine (manœuvres de réanimation potentiellement nécessaires)
Maternelles         
  
– HTA gravidique sévère, HTA chronique
– Toxicomanie, médicaments dépresseurs respiratoires, anesthésie générale
– Diabète, maladie chronique (anémie, cardiopathie congénitale cyanogène)
– Infection maternelle
– Grossesse non suivie
– Antécédents de mort fœtale ou néonatale
Fœtales– Grossesse multiple et syndrome transfuseur-transfusé
– Prématurité < 35 SA
– RCIU, oligoamnios
– Certaines malformations congénitales
– Anasarque
– Chorioamniotite
– Allo-immunisation Rhésus

  Obstétricales
– Asphyxie périnatale, anomalies du rythme cardiaque fœtal
– Présentation anormale, procidence du cordon
– Rupture prolongée des membranes, travail prolongé ou rapide
– Hémorragie anténatale (placenta prævia, décollement placentaire)
– Liquide amniotique méconial
– Accouchement par forceps, ventouse, césarienne

Premières mesures d’urgence

À sa naissance, un enfant peut être placé sur la poitrine de sa mère si toutes les conditions suivantes sont remplies (recommandations de l’ILCOR [International Liaison Commitee on Ressuscitation]) :

  • il est à terme ;
  • il crie ou respire ;
  • il a un tonus musculaire normal.

Dans les autres cas, il nécessite une prise en charge sur table radiante pour évaluer ses besoins d’assistance.

En l’absence de mouvements respiratoires efficaces, cyanose et/ou bradycardie, les manœuvres de réanimation à effectuer sont codifiées et comportent :

  • aspiration rhinopharyngée ;
  • stimulation (séchage, frottage du dos, chiquenaudes sur les plantes des pieds) ;
  • ventilation en pression positive au masque (sauf en cas d’inhalation méconiale ou de hernie diaphragmatique : intubation première) ; en l’absence d’amélioration : intubation trachéale et ventilation sur tube ;
  • massage cardiaque externe en cas de persistance d’une bradycardie malgré une ventilation efficace ; voire administration d’adrénaline.

Seulement 1 % des nouveau-nés nécessitent des manœuvres de réanimation lourdes.

Pour la majorité des nouveau-nés, la désobstruction des voies aériennes supérieures et la ventilation au masque suffisent à normaliser l’état clinique.

Mauvaise adaptation à la vie extra-utérine : nécessité de manœuvres de réanimation.

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