Introduction

Les filarioses sont des nématodoses tissulaires dues à des vers filiformes blancs, transmises par des arthropodes, largement répandues dans le monde (un milliard de sujets exposés, plus de 200 millions de personnes atteintes).

Les espèces filariennes décrites chez l’homme sont au nombre de neuf et se répartissent selon leur impact en santé publique en filarioses majeures (pathogènes) et filarioses mineures (peu ou pas pathogènes) (voir tableau 1).

Les filarioses pathogènes sont : les filarioses lymphatiques à Wuchereria bancrofti (la plus représentée), à Brugia malayi (important parasite d’Asie) et Brugia timori (île de Timor et îles voisines), l’onchocercose à Onchocerca volvulus et la filariose à Loa loa (loaose ou loase).

Les filarioses peu ou pas pathogènes sont : les mansonelloses à Mansonella perstans, M. streptocerca, M. ozzardi ou, exceptionnellement, M. rodhaini.

La filariose de Médine, ou dracunculose, malgré son nom, ne fait pas partie de la famille des filaires stricto sensu et est traitée dans un autre chapitre.

Filarioses animales en impasse chez l’homme : Des filarioses du raton laveur (Dirofilaria tenuis), du chien ou du renard (D. repens, D. immitis) en impasse parasitaire chez l’homme peuvent entrainer d’exceptionnels manifestations cliniques (nodules sous cutanés ou oculaires, manifestations pulmonaires ou cardiaques).

Les filarioses ont un cycle parasitologique comparable : un vecteur, arthropode femelle hématophage (moucherons, moustiques ou taons), transmet au cours d’une piqûre des larves infestantes qui pénètrent activement le revêtement cutané et se développent chez l’homme (tissus ou vaisseaux lymphatiques) en adultes mâles et femelles. Les femelles émettent des embryons, ou microfilaires, sans évolution chez l’homme. Prélevées par l’insecte hôte intermédiaire, ces microfilaires se transforment en larves infestantes, assurant ainsi la transmission.
La filariose de Médine, ou dracunculose, malgré son nom, ne fait pas partie de la famille des filaires stricto sensu et est traitée dans le chapitre 18.

Tableau 1. Caractéristiques des filaires humaines
 EspècesLocalisation des adultesVecteurPrélèvement
(microfilaires)
Répartition géographique
Filaires pathogènesWuchereria bancroftiLymphatiqueCulex sp.

Aedes sp.

Anopheles sp.
Sang, périodicité nocturneRégion tropicale et intertropicale
Brugia malayiLymphatiqueMansonia sp.Sang, apériodiqueMalaisie
Brugia timoriLymphatiqueMansonia sp.Sang, apériodiqueTimor
Onchocerca volvulusSous-cutanéeSimulieSuc dermiqueAfrique noire, Amérique centrale et du Sud, Yémen
Loa loaSous-cutanéeChrysopsSang, périodicité diurneAfrique équatoriale
de l’Ouest
Filaires
peu ou pas pathogènes
Mansonella perstansSéreuseCulicoïdesSang, apériodiqueAfrique noire
Mansonella streptocercaSous-cutanéeCulicoïdesSuc dermiqueAfrique noire
Mansonella ozzardiSéreuseCulicoïdesSang, apériodiqueAmérique, Caraïbes
Mansonella rodhainiSéreuseCulicoïdesSuc dermiqueAfrique centrale

L’onchocercose est une filariose cutanée due à Onchocerca volvulus. Elle est grave par ses complications oculaires cécitantes et constitue, par la nuisance de son vecteur, un obstacle important au développement des zones rurales irriguées et fertiles où elle sévit à l’état endémique.

La filariose à Loa loa, strictement africaine, est une helminthose cutanée par la localisation des vers adultes et sanguicole par celle des embryons, ou microfilaires. Spectaculaire par quelques signes cliniques, elle peut évoluer vers des complications viscérales.


Filarioses lymphatiques : bancroftose, wuchéreriose ou brugiose

1  -  Filarioses lymphatiques : bancroftose, wuchéreriose ou brugiose

1 . 1  -  Epidémiologie

L’Homme peut héberger plusieurs filaires lymphatiques : les principales sont Wuchereria bancrofti, la plus représentée, et Brugia malayi, cantonnée en Malaisie.

Les filaires lymphatiques mesurent jusqu’à 5 cm pour le mâle, 10 cm pour la femelle vivipare. Elles vivent 15 ans dans les lymphatiques de l’Homme. Les femelles fécondées émettent des microfilaires (300 μm) dans les vaisseaux lymphatiques, dont la durée de vie est de quelques mois. Ces microfilaires localisées au niveau des capillaires pulmonaires passent périodiquement (surtout la nuit) dans le sang périphérique, prêtes à être ingérées par un moustique : Culex sp., Aedes sp. (figure 17.1), Mansonia sp. ou Anopheles sp. Deux semaines plus tard, lors d’un nouveau repas sanguin, les larves infectantes (1 mm de long) sorties de la trompe du moustique traversent activement la peau et gagnent les voies lymphatiques où elles deviennent adultes.

Fig. 17.1 Aedes sp., femelle en position de piqûre
Fig. 17.1 Aedes sp., femelle en position de piqûre

Les microfilaires transmises par transfusion sanguine peuvent survivre quelques mois, mais ne donneront pas de filaires adultes chez le transfusé.

Les filarioses lymphatiques sont très largement répandues dans les zones intertropicales et subtropicales, fréquentes en Asie (figures 17.2 et 17.3). Dans les DOM-TOM français, elles concernent surtout la Polynésie et Mayotte (archipel des Comores). En 2014, plusieurs centaines de millions de personnes sont encore exposées dans le monde, dont 120 millions environ seraient effectivement infectées (source OMS).

Fig. 17.2 Répartition géographique de la wuchereriose
Fig. 17.2 Répartition géographique de la wuchereriose
Fig. 17.3 Répartition géographique de la brugiose
Fig. 17.3 Répartition géographique de la brugiose
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