5  -  Epidémiologie


A la campagne, la transmission de la THAm est vectorielle et obéit à deux cycles épidémiologiques différents: un cycle sauvage et un cycle intradomicilaire s'inscrivant dans l'espace à trois niveaux : domestique, péridomestique et sauvage.                                    

Le cycle sauvage, d'où, par définition, l'homme et les animaux domestiques sont exclus, peut se dérouler aussi bien dans l'espace sauvage que dans l'espace péridomestique, c'est-à-dire dans le voisinage immédiat des habitations (granges, écuries, poulaillers, pigeonnier, réserve de bois, magasins…). Les insectes se nourrissent sur les animaux qui y nichent ou qui s'y abritent. Le cycle intradomiciliaire, lui, se déroule dans les espaces domestiques et péridomestiques et fait intervenir des insectes se reproduisant dans les maisons, et se nourrissant sur l'Homme et sur les animaux qui y vivent, comme les chiens, dont plus de 80% sont infectés dans certaines régions de l'Argentine ou les cobayes qu’on élève au Pérou et en Bolivie dans les habitations ou tout a coté, comme des lapins, pour les manger (taux d’infection : 30 %).                
Espaces et cycles interférent naturellement entre eux et les uns par rapport aux autres de multiples façons.

En Amérique latine, on désigne habituellement sous le terme de rancho toute maison paysanne construite de bric et de broc, généralement avec des murs en boue séchée mélangée avec de la paille, un sol de terre battue et un toit couvert de palmes. De taille variable, le plus souvent flanquées d’annexes ouvertes sur le milieu extérieur et encombrées d’objets les plus hétéroclites, ces maisons n’ont habituellement qu’une fenêtre, quand elles en ont une. La ou les pièces très sombres (le plus souvent il n’y en a qu’une) sont pratiquement dépourvues de meubles, mis à part les lits.  Les vêtements sont posés sur des fils tendus entre les murs dont les craquelures sont masquées par des affiches, des journaux et des images pieuses. Un tel ensemble, présenté d’une manière un peu caricaturale, mais qui correspond bien à la réalité avec, bien entendu, d’infinies variantes, constitue une niche écologique idéale pour les triatomes : obscurité, sécurité, caches dans lesquelles ils ont une aptitude étonnante à se glisser et, chaque nuit, accès à une nourriture abondante et quasiment inépuisable. C’est la raison pour laquelle le rancho a toujours été associé à la transmission vectorielle de la THAm  et que les programmes visant à contrôler l’endémie ont toujours considéré l’amélioration de l’habitat rural  comme une priorité.

Toit de paille favorable à la colonisation par les triatomes
(photo JF Pays)
Annexe d’un rancho ouvert sur le milieu extérieur et servant de chambre à coucher
(photo JF Pays)
Ranchos typique
(photo JF Pays)
Ranchos typique
(photo JF Pays)
Annexe d’un rancho ouvert sur le milieu extérieur et servant de chambre à coucher
(photo JF Pays)

Depuis les années 60, des déplacements massifs de population et des modifications sans précédent de l’environnement ont modifié et enrichi les schémas épidémiologiques précédemment décrits. Les déplacements de population se sont caractérisés par une double migration :   des villes vers le milieu sauvage (ex : front pionniers d’Amazonie) et des campagnes vers les villes (urbanisation galopante). D’autre part, la déforestation, en privant les triatomes de leur habitat naturel et de leurs ressources alimentaires, a contraint les insectes à se rapprocher du milieu domestique, voire à s’y installer, multipliant ainsi, pour l’homme, les risques de transmission et les risques d’échec pour les programmes de lutte anti-vectorielle visant à l’éradication des espèces domiciliées.

5/10