L’infiltration tardive (4 à 6 semaines après l’inoculation) du granulome primaire par les CD4+ et CD8+ va aboutir à la formation d’un granulome plus large et plus organisé pour contenir l’infection (Figure 5). L’induction de la réponse immunitaire cellulaire est contemporaine de l’apparition de la nécrose caséeuseDéfinitionfoyer de destruction tissulaire (aspect de fromage frais ou de mastic) dans lequel la teneur en oxygène est réduite et qui est très riche en lipides issus de la lyse des macrophages spumeux (macrophages chargés de vacuoles lipidiques) --> multiplication ralentie du bacille tuberculeux, 3 scénarios évolutifs possibles : persistance, ramollissement, calcification qui est très évocatrice d’une infection par le bacille de la tuberculose sur les coupes histologiques (Figure 6).

Figure 5 : Organisation du granulome primaire
D’après Ramakrishnan, 2009

Figure 5 : Organisation du granulome primaire. Au centre : les macrophages, cellules épithélioïdes (macrophages activés sécréteurs de cytokines et d’enzymes), macrophages différenciés en cellules géantes multinuclées ou cellules de Langhans, qui correspondent à la fusion de cellules épithélioïdes et de macrophages), macrophages spumeux (chargés de vacuoles lipidiques) qui sont au bord du foyer de nécrose caséeuse. Des bacilles tuberculeux sont présents dans la nécrose caséeuse (Figure 6)  mais, leur métabolisme est ralenti (phase de dormance). D’autres cellules sont présentes dans le granulome, les polynucléaires neutrophiles (PN), des cellules dendritiques, des cellules natural killer (NK). En périphérie : couronne de lymphocytes CD4+ et CD8+ et de fibroblastes qui forment une sorte de capsule. C’est une zone beaucoup mieux oxygénée → multiplication active du bacille tuberculeux en périphérie du granulome.

Figure 6 : A. Coupe histologique d’un granulome avec au centre un dépôt anhiste correspondant à la nécrose caséeuse. B. Aspect macroscopique du tissu pulmonaire avec plusieurs foyers de nécrose caséeuse (lésions blanchâtres disséminées)

Le développement du granulome est asymptomatique (aucun signe clinique et radiologique). La seule manifestation est le virage des réactions cutanées à la tuberculine (extrait protéique de bacille tuberculeux) après intradermo réaction de Mantoux (Figure 17 ''Inoculation de la tuberculine par voie intradermique à la face antérieure de l’avant bras")ou la positivité des tests IGRA (Quantiféron® et TspotTB® qui explorent la production d’IFNγ de l’individu en réponse à des antigènes spécifiques de M. tuberculosis). Ces tests immunologiques positifs traduisent la réaction d’hypersensibilité retardée mise en place au cours de l’infection tuberculeuse (Phénomène de KochDéfinitionLe cobaye est l'animal le plus sensible au bacille tuberculeux, il fait une tuberculose progressivement mortelle : 15 jours à 3 semaines après l'inoculation d'un million de bacilles, un nodule se forme au point d'inoculation. Ce nodule s'ulcère et laisse sourdre un pus blanchâtre, le caséum. L'ulcération va persister jusqu'à la mort de l'animal. En 1890, Robert KOCH constate que la réinoculation de bacilles tuberculeux à un cobaye déjà infecté s’accompagne n'est pas suivie des mêmes lésions que la primo-inoculation. C'est le phénomène de KOCH qui se traduit de la manière suivante : d'abord l’ulcération nécrotique se forme plus rapidement en 2 à 3 jours (témoigne de l’hypersensibilité aux constituants du bacille tuberculeux) au point d'inoculation et elle guérit spontanément (traduit une immunité de surinfection à la base de la vaccination par le BCG). ).

2 . 2  -  Evolution de la nécrose caséeuse


Dans 90 % des cas, l’infection est maîtrisée par la réaction immunitaire de l’individu. Les petits foyers de nécrose caséeuse s’entourent de sclérose progressivement, le nombre de bacilles décroit et le foyer se calcifie (calcifications parfois visibles à la radiographie). Les foyers de plus grande taille peuvent persister des années, voire même toute la vie. Les bacilles dans ces foyers persistent mais ne se multiplient pas activement. Ils ont un métabolisme ralenti (bacilles dormants). On parle d’infection tuberculeuse latente.

Dans les 10 % de cas restant, l’infection n’est pas maitrisée et le bacille continue de se multiplier  phase de progression rapide vers la maladie tuberculeuse immédiatement après l’infection ou au contraire après une phase de latence qui peut durer plusieurs années. On estime que le risque cumulé de développer une TB maladie est de 10% sur toute une vie. La moitié des cas de TB maladie surviennent dans les 2 ans qui suivent le contage. Les personnes immunodéprimées sont plus à risque de développer une TB maladie (Tableau 1)

Tableau 1 : Facteurs qui augmentent le risque d’évoluer vers une TB maladie en cas d’infection tuberculeuse latente
                                                                             Facteurs de risque
 Infection par le VIH : 40% de risque de développer une TB maladie après infection en général dans la continuité de la PIF
 Age < 5 ans
 Infection récente  par le bacille tuberculeux (< 2 ans)
 Traitement immunosuppresseur : anti TNFα, corticothérapie prolongée par voie systémique (≥ 15 mg de prednisone/ jour)
 Transplantation d’organe
 Insuffisance rénale chronique, diabète, malnutrition
 Cancer, leucémie
 Silicose, tabagisme
 Ethylisme, toxicomanie

La nécrose caséeuse s'accumule dans le granulome et se ramollit ce qui aboutit à la nécrose et au collapsus du granulome avec la formation d’une caverne pulmonaire. Cette caverne peut s’ouvrir dans une bronche. A partir des lésions cavitaires ouvertes, les bacilles vont être dispersés à l’occasion de la toux dans l’air pour contaminer d’autres personnes. La caverne étant bien oxygénée, elle va être le siège d’une multiplication intense du bacille tuberculeux. En effet, le bacille tuberculeux est une bactérie aérobie stricte. Sa multiplication est fonction de la tension en oxygène du milieu environnant. Il va donc se multiplier bien plus rapidement dans une caverne pulmonaire bien oxygénée que dans les tissus profonds. Ceci explique que les formes extra-pulmonaires de TB sont rarement riches en bacilles à la différence de la caverne pulmonaire qui contient environ 108 bacille tuberculeux.

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