3 . 3  -  Anomalies des axes des membres inférieurs

3 . 3 . 1  -  Préambule


L’ontogenèse est définie par l’évolution de l’anatomie de la conception à la mort. Sa connaissance permet de comprendre qu’une situation anatomique normale à un âge est pathologique à un autre. C’est ainsi que de nombreux parents et médecins s’inquiètent à mauvais escient des axes des membres inférieurs de l’enfant au seul motif qu’ils sont différents de ceux d’un adulte.

Il est donc important de connaître l’ontogenèse des axes des membres inférieurs de l’enfant. Ces axes sont décrits dans le plan transversal (leur perturbation est responsable de troubles rotationnels) et dans le plan frontal.

L’anatomie de l’enfant n’est pas celle d’un adulte en format réduit !

3 . 3 . 2  -  Axes transversaux normaux et troubles rotationnels


Généralités

Les os longs des membres inférieurs ont une torsion telle que les grands axes des épiphyses ne sont pas parallèles.

Au niveau du fémur il existe une antétorsion fémorale de 35° à la naissance. Elle diminue en moyenne de 1° par an jusqu’à la fin de la croissance. À la maturité, l’antétorsion fémorale est comprise entre 10 et 15°. Au niveau du tibia, la torsion est nulle à la naissance, puis apparaît une torsion tibiale externe qui augmente doucement jusqu’à 30° en fin de croissance.

Il existe au cours de la croissance un mouvement inversé de torsion fémorale interne et de torsion tibiale externe.

Diagnostic d’un trouble de torsion

Pendant la marche, on regarde la position respective des genoux et des pieds. Normalement, lors de l’appui, le pied est dirigé en dehors (de 8 à 10°) et le genou (la patella) est vu de face.

Si les patellas sont en dedans, il s’agit d’un excès de torsion fémorale interne. Si elles sont en dehors, il s’agit d’une insuffisance de torsion fémorale interne. Si les pieds sont en dedans, il s’agit d’une insuffisance de torsion tibiale externe. Si les pieds sont en dehors, il s’agit d’un excès de torsion tibiale externe.

La combinaison de ces différentes variations de torsion donnera une marche en rotation interne le plus souvent chez le jeune enfant (fig. 6.7) avec des risques de chutes à répétition, et chez le plus grand une marche en rotation externe.

Figure 7 : Morphotype en torsion interne
Les patella sont en dedans (excès de torsion fémorale interne), et les pieds sont en dedans par rapport aux patella (défaut de torsion externe du squelette jambier).

La mesure objective des rotations des membres inférieurs est faite sur un enfant placé en décubitus dorsal en bout de table, jambes pendantes et genoux fléchis à 90°. On peut tester ainsi toutes les amplitudes articulaires et particulièrement les rotations au niveau de la hanche et au niveau du genou.

Ces excès ou insuffisances de torsion ont des conséquences dynamiques sur le cycle de la marche ou sur la course. Schématiquement, les marches en rotation interne peuvent évoluer vers une correction partielle ou totale en cours de croissance. Les marches en rotation externe évoluent peu, sans doute parce que la gêne fonctionnelle est moindre.

Quand demander une consultation spécialisée ?

Une marche en rotation interne n’est pas pathologique jusqu’à l’âge de 7 ans.

Aucun traitement orthopédique (rééducation, attelles, semelles orthopédiques) ne peut prétendre corriger ces défauts. La correction, qui ne peut être que chirurgicale, est réservée aux formes extrêmes (pas du tout de rotation externe par exemple).

3 . 3 . 3  -  Axes frontaux normaux et pathologiques


Généralités

Chez l’enfant arrivé à maturité, le centre de la tête fémorale, le centre du genou et le centre de la cheville se trouvent alignés (fig. 6.8C). Les condyles fémoraux et les chevilles sont au contact.

On parle de genu varum si la distance intercondylienne (DIC) est supérieure à 0 cm.

On parle de genu valgum si la distance intermalléolaire (DIM) est supérieure à 0 cm.

Le morphotype frontal physiologique évolue pendant la croissance en 3 phases (fig. 6.8) :

  • de la naissance à l’âge de 3 ans : genu varum ; il diminue progressivement pour s’annuler entre 18 mois et 3 ans (fig. 6.8A) ;
  • de l’âge de 2 ans à 10 ans : genu valgum ; il est maximal à l’âge de 3 ans chez la fille et 4 ans chez le garçon ; puis le valgus diminue progressivement et se stabilise jusqu’à la puberté (fig. 6.8B) ;
  • à partir de la puberté (11 ans chez la fille, et 13 ans chez le garçon), le morphotype frontal est aligné (fig. 6.8C) ; quand il ne l’est pas parfaitement, les filles sont plutôt en léger genu valgum alors que les garçons tendent plutôt vers le genu varum.
Figure 8A : Évolution du morphotype frontal des membres inférieurs
A. Genu varum. La distance intercondylienne (DIC) est > 0. Ici le varus est évident mais on ne peut mesurer la DIC car les deux chevilles ne sont pas en contact. Situation physiologique de la naissance à 3 ans. B. Genu valgum. La distance intermalléolaire (DIM) est > 0. Situation physiologique de 3 ans à la phase prépubertaire. C. Morphotype aligné. Le centre de la tête fémorale (F), le centre du genou (G) et le centre de la cheville (C) se trouvent alignés. La DIC = 0 cm et la DIM = 0 cm. Situation physiologique à partir de la période pubertaire.

Quand demander des examens radiologiques et orienter vers une consultation spécialisée ?

Ces examens sont nécessaires lorsque les déformations sont observées en dehors des âges de leur normalité ou si elles sont très accentuées.

Ils s’imposent quel que soit l’âge si la déformation est asymétrique et/ou douloureuse.

Un genu varum pouvait amener autrefois à identifier un rachitisme, chez les enfants n’ayant pas reçu une prophylaxie adaptée. Mais le plus souvent en France, il peut révéler un rachitisme vitamino-résistant. La maladie de Blount conduit à un genu varum uni- ou bilatéral chez un enfant de race noire.

Associés à une petite taille, le genu varum ou le genu valgum font rechercher une maladie osseuse constitutionnelle (achondroplasie, dysplasie polyépiphysaire…).

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