10  -  Prévention

10 . 1  -  Prévention individuelle


Une prévention du paludisme est envisageable à l’échelle individuelle. Pour être efficace, cette prévention doit associer une protection contre les piqûres de moustiques et une chimioprophylaxie médicamenteuse. Il ne faut cependant pas oublier qu’aucune protection n’est fiable à 100 %.

a. Lutte contre les piqûres de moustiques

À partir du coucher du soleil
, c’est la première ligne de défense vis-à-vis du paludisme :

  • à l’extérieur des habitations :
    • porter des vêtements longs le soir, si possible imprégnés d’insecticide ;
    • mettre des répulsifs sur les parties découvertes (produits à base de DEET 30 à 50%, IR3535 20 à 35%, ou Picaridine 20 à 30%) (attention au choix des produits chez l’enfant et la femme enceinte) ;
    • utiliser des tortillons fumigènes ;
  • à l’intérieur des habitations :
    • installer des moustiquaires aux portes et aux fenêtres ;
    • et/ou dormir sous une moustiquaire imprégnée d’insecticide ;
    • à défaut de moustiquaire de lit (qui assure incontestablement la protection mécanique la plus efficace), on peut, si on dispose d’une climatisation, associer climatisation et insecticide.

b. Chimioprophylaxie médicamenteuse

Sauf cas particuliers (femmes enceintes), la chimioprophylaxie n’est plus utilisée actuellement pour les populations autochtones des zones d’endémie et y vivant en permanence. En revanche, elle doit être envisagée de manière systématique pour tout sujet non immun se rendant en zone impaludée.

Il n’existe pas de schéma prophylactique idéal. Le choix de la chimioprophylaxie doit être discuté et adapté à chaque voyageur. Il dépend de la zone visitée (intensité de transmission et niveau de résistance aux antipaludiques), de la saison et du sujet concerné (âge, femme enceinte, mode de vie, antécédents médicaux, etc.).

En France, les zones impaludées sont classées en trois groupes en fonction des données épidémiologiques fournies par le Centre national de référence du paludisme permettant d’adapter la prophylaxie à la zone géographique.

Groupe 1 : Zone sans chloroquinorésistance. – Ce groupe concerne essentiellement les pays d’Amérique centrale, Haïti et la République dominicaine.

Groupe 2 : Zone de chloroquinorésistance isolée. – Inde en partie et Sri Lanka.

Groupe 3 : Zone de prévalence élevée de chloroquinorésistance et de multirésistance. – Le nombre de pays classés dans ce groupe augmente constamment. On y trouve maintenant tous les pays d’Afrique subsaharienne. Ce groupe comprend aussi tout le bassin amazonien et les zones dites de multirésistance d’Asie du Sud-Est (en particulier les régions frontalières entre la Thaïlande, le Laos, le Cambodge, le Myanmar et le Vietnam). On y trouve également désormais Madagascar.

Des recommandations officielles sont publiées et réactualisées chaque année dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire. Elles doivent servir de référence pour la prescription d’une chimioprophylaxie individuelle (http://www.invs.sante.fr/beh).

Tableau 5. Chimioprophylaxie antipaludique selon les groupes de chimiorésistance (BEH 2013)
 AdulteFemme enceinteEnfant
Groupe 1Chloroquine 100 mg par jour (Nivaquine 1 cp/jour) Séjour + 4 semaines aprèsChloroquine 1,5 mg/kg/jour (Nivaquine susp. buvable) Séjour + 4 semaines après
Groupes 2 Chloroquine 100 mg/jour + proguanil 200 mg/jour (Nivaquine 1 cp/jour + Paludrine 2 cp/jour ou Savarine 1 cp/jour) Séjour + 4 semaines aprèsChloroquine + proguanil (Nivaquine 1,5 mg/kg/jour + Paludrine 3 mg/kg/jour) Séjour + 4 semaines après
Groupes 2 et 3Atovaquone 250 mg + proguanil 100 mg (Malarone 1 cp/jour) Séjour + 1 semaine après

>5 et < 7kg : 1/2cp/jour (hors AMM) ≥7 et < 11 kg : 3/4 cp/jour (hors AMM) ≥ 11 kg et < 40 kg : Atovaquone
62,5 mg + proguanil 25 mg
(Malarone enfant 1 cp/10 kg/j)
Séjour + 1 semaine après
Groupes 3Méfloquine 250 mg (Lariam 1 cp. par semaine)
10 jours avant + séjour + 3 semaines après
Si > 15 kg : méfloquine 250 mg
(Lariam 5 mg/kg par semaine, cp. sécables)
10 jours avant + séjour + 3 semaines après
Doxycycline 100 mg
(monohydrate de doxycycline)
Séjour + 4 semaines après
DéconseilléeSi > 8 ans : doxycycline 100 mg (monohydrate de doxycycline) Si < 40 kg : doxycycline 50 mg/jour Séjour + 4 semaines après

10 . 2  -  Prévention collective


La prévention collective du paludisme est difficile et, jusqu’à présent, les programmes d’éradication du paludisme à l’échelle mondiale avaient échoué. Le rapport 2011 de l’OMS sur la situation du paludisme dans le monde laisse espérer un début de contrôle. La lutte antipaludique repose actuellement sur plusieurs axes :

  • une prévention de la transmission par l’utilisation généralisée de moustiquaires imprégnées dans toute la population, prioritairement chez les plus exposés (enfants et femmes enceintes) et par une prise en charge rapide et adaptée des accès palustres ;
  • le développement de nouvelles molécules et surtout le développement de combinaisons thérapeutiques reposant sur l’association d’un dérivé de l’artémisinine (molécule issue d’une plante, Artemisia annua, de la pharmacopée traditionnelle chinoise, d’activité très rapide et sans résistance connue jusqu’à présent) avec une ou plusieurs autres molécules (artemisinine-based combination therapy, ou ACT). Sont déjà utilisées ou en développement les combinaisons artésunate-amodiaquine (Coarsucam), artéméther-luméfantrine (Coartem, Riamet), dihydroartémisinine-pipéraquine (Artekin, Eurartesim), etc. Les programmes nationaux de lutte contre le paludisme de nombreux pays africains travaillent actuellement sur l’introduction de ces combinaisons thérapeutiques ;
  • la poursuite de la lutte antivectorielle au niveau des pays : contrôle des gîtes à moustiques, pulvérisation intradomiciliaire d’insecticide ;
  • la recherche d’un vaccin : un candidat vaccin actif sur les formes pré-érythrocytaires est, en 2012, en phase III des essais cliniques.

Il est difficile d’éradiquer le paludisme dans certaines régions où la transmission est très intense, mais on constate cependant que tous les pays qui ont réussi à élever leur niveau de vie ont fait reculer la maladie. La lutte contre le paludisme passe donc aussi par une lutte contre la pauvreté à l’échelle mondiale.

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