5  -  Causes de l’anorexie et de la malnutrition


Les causes sont multiples et souvent intriquées, en particulier à l'hôpital ou en insti tution. Habituellement c'est la présence d'un  hypercatabolisme  qui  précipite  la
survenue d'un état de malnutrition chez un sujet âgé, d'autant plus facilement qu'il avait auparavant des apports alimentaires insuffisants.

5 . 1  -  Les modifications physiologiques liées à l'âge

  • Le  vieillissement  sensoriel  s'accompagne  d'une  élévation  du  seuil  des goûts, aggravé par la carence en zinc et les médicaments. Les détériorations de l'odorat et de la vision sont aussi des facteurs susceptibles de perturber la conception et la prise des mets hédoniques.
  • L'altération de la denture ou un mauvais état gingival sont d'autant plus fréquents que les soins dentaires coûtent cher. Seule une mastication indolore permet une alimentation correcte. La dégradation  de  l'état  bucco-dentaire est responsable d'une insuffisance masticatoire,  imposant  une  alimentation monotone, mal équilibrée et peu appétissante.
  • La muqueuse gastrique s'atrophie avec l'âge. Il en résulte une diminution de sécrétion d'acide chlorhydrique, source de  retard  à  l'évacuation  gastrique. L'achlorhydrie favorise une pullulation de  bactéries  consommatrices  de folates.
  • Le ralentissement du transit intestinal avec  l'âge  est  responsable  de  stase intestinale, de constipation et de pullulation microbienne.


Cependant, le vieillissement n'est pas à lui seul une cause de malnutrition. La malnutrition ne s'installe que lorsque le vieillissement s'accompagne de pathologies dégénératives, infectieuses ou inflammatoires multiples, intriquées ou en cascade.

5 . 2  -  Les insuffisances d'apports alimentaires

  • L'isolement social ou familial  s'aggrave avec l'avance en âge et la disparition du conjoint, des amis ou d'un animal familier.
  • La diminution des ressources concerne essentiellement les veuves et les sujets exclus des systèmes sociaux. L'exclusion relève le plus souvent d'une ignorance des aides.
  • La diminution des capacités physiques :
    • capacité  masticatoire  en  relation avec la denture, la mâchoire ou un appareillage mal adapté.
    • troubles de la déglutition, principalement le fait des accidents vasculaires cérébraux.
    • difficultés à la marche, responsables d'une  diminution  des  possibilités d'approvisionnement.
    • déficits moteurs ou tremblements, également causes de difficulté d'approvisionnement  (portage  des paquets), de préparation culinaire et d'alimentation. 
    • en  institution,  perte  d'autonomie rendant  le  sujet  âgé  totalement dépendant de la qualité et de la quantité de personnel soignant.
  • Les détériorations intellectuelles, telles que les démences.
  • L'accumulation des idées fausses sur l'alimentation : phobie de l’hypercholestérolémie,  ignorance  des  besoins nutritionnels de la personne âgée par elle-même ou par son entourage familial ou personnel soignant, ignorance des aides possibles à domicile pour pallier les conséquences de l'isolement.

5 . 3  -  Les hypercatabolismes

Un  syndrome  d'hypercatabolisme  est déclenché au cours des pathologies infectieuses  (hypermétabolisme  lymphocytaire), des  destructions tissulaires (hypermétabolisme  phagocytaire),  ou  de  la cicatrisation  et  la  réparation  tissulaire comme c'est le cas lors de fractures ou d ' escarres  (hypermétabolisme  fibroblastique). L'intensité et la durée de ce syndrome d'hypercatabolisme dépend de la rapidité  de  guérison  de  l'infection,  de l'étendue des lésions tissulaires et de la vitesse de cicatrisation.

Quelque soit le mécanisme d'activation, il y  a  hyperstimulation  des  monocytesmacrophages.  L'hyperfonctionnement monocytaire se traduit par une augmentation du taux des cytokines (interleukine 1, interleukine 6, TNF). Les cytokines ont un rôle central en orientant le métabolisme de l ' organisme  pour  fournir  aux  cellules concernées (lymphocytes, phagocytes ou fibroblastes) les nutriments dont elles ont besoin  :  acides  aminés  provenant  des muscles, calcium provenant de l'os, acides gras et glucose. Parallèlement, l'IL1 initialise un syndrome fébrile, entraînant une perte en eau. Le métabolisme hépatique est concerné : il y a réduction de synthèse des protéines de transport (albumine, pré-albumine) pour permettre la synthèse des protéines de phase aiguë (CRP, orosomucoïde, macroglobuline,…). Les cytokines ont aussi un effet anorexigène propre.

Les  sujets  âgés  sont  particulièrement menacés au cours des états d'hypercatabolisme car leurs réserves (musculaire et calcique)  ou  leur  régulation  (métabolisme hydrique) sont diminuées. Au cours de ces états,  il  faut  donc  augmenter  les  apports nutritionnels  en  protéines  et  en  eau.  Les apports  recommandés  dans  ces  cas  sont de 35  à  45 kcal/kg de poids corpore l / j o u r dont  1,5  à  2  g  protéines/kg/j  et  le même rapport Glucides/Protides  (2,5 à 3).  Il  faut également  augmenter  les  apports  en  eau de 0,3 l/°C au-dessus de 37°C et les apports en vitamines et oligoéléments aux environs de 2 fois les allocations recommandées.

Les causes de l'hypercatabolisme sont les infections, les cancers et d'une façon plus générale  tous  les  états  inflammatoires aigus  ou  chroniques  (rhumatismes, escarres,…). Certaines défaillances d'organe (insuffisances cardiaques ou respiratoires) augmentent les dépenses énergétiques. L'hyperthyroïdie (fréquente chez le sujet âgé) augmente le catabolismeDéfinitionLe catabolisme est l'ensemble des réactions de dégradations moléculaires de l'organisme considéré. Il est le contraire de l'anabolisme, ensemble des réactions de synthèse. Le catabolisme et l'anabolisme sont les deux composantes du métabolisme.Les réactions de catabolisme sont des oxydations (ou des déshydrogénations) et elles sont thermodynamiquement favorables, c'est-à-dire qu'elles sont exergoniques (cédant de l'énergie, produisant de l'énergie).Les réactions du catabolisme des protides, glucides, lipides, acides nucléiques, etc., sont toutes intimement liées. Il s'agit d'un enchaînement de réactions chimiques.musculaire du fait de l'action spécifique hormonale.

En résumé, les causes d'insuffisance d'apport sont presque toutes accessibles à la thérapeutique dans le cadre d'une prise en charge globale du sujet âgé. Chez un sujet déjà fragilisé par une malnutrition dite "exogène", les maladies ajoutent une composante hypercatabolique, ou malnutrition "endogène". C'est l'association et la répétition dans le temps des causes de malnutrition qui font la gravité de la situation.

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