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6) Suppression androgénique
La découverte de l’hormonosensibilité est due à Charles Huggins ayant reçu le prix Nobel pour ces travaux. La glande prostatique et le cancer de la prostate sont liés à la présence de testostérone, et l’absence de cette dernière entraîne une apoptose massive des cellules. Dans le cas des cellules tumorales, un contingent est capable de survivre et de se développer en l’absence d’androgènes et va être responsable de l’évolution péjorative.
Le blocage androgénique a pour but la suppression de l’effet des androgènes par suppression de leur production, associée ou non à un blocage des récepteurs périphériques aux androgènes. Son efficacité vaut pendant la période transitoire pouvant aller de quelques mois à plusieurs années. En moyenne chez le patient métastatique, l’efficacité est de 3 ans. Elle est donc palliative.
La suppression androgénique par agoniste ou antagoniste de la LHRH a pour but d’obtenir un taux de castration avec une testostéronémie inérieure à 0,5 ng/mL.
La suppression androgénique peut être :
L’hormonothérapie médicale utilise les approches suivantes :
Les traitements sont prescrits en continu ou de façon intermittente.
Les effets secondaires sont nombreux, majoritairement liés à la baisse de la testostérone (figure 10) :
Classiquement, une monothérapie par agoniste ou antagoniste est prescrite en première ligne mais elle associe en cas d’agoniste un anti-androgène chez les patients métastatiques pour prévenir de l’effet « FLARE UP » 10 jours avant et 1 mois après. En cas de cancers métastatiques à haut risque, un blocage androgénique complet (agoniste + anti-androgène ou antagoniste seul) est nécessaire.
Cette hormonosensibilité ne dure cependant qu’un temps. On parle alors de cancer de prostate en phase de résistance à la castration.
Il se définit selon plusieurs critères selon les recommandations de l’AFU :
7) Œstrogènes/estramustine
La prescription d’un autre traitement hormonal chez les patients en phase de résistance à la castration et peu symptomatique peut constituer une nouvelle étape dans l’escalade thérapeutique du cancer de prostate.
Le diéthylbestrol (DES) Distilbène® à la dose de 3 mg/jour a montré une bonne réponse objective du PSA avec une baisse de 40 % de celui-ci et de 20 % des symptômes cliniques. Son usage est limité devant un risque faible, mais non négligeable, thrombo-embolique.
De la même manière, on peut utiliser de l’estramustine (Estracyt®) à raison de 2 gel. × 2/jour ayant les mêmes réponses thérapeutiques.
8) Nouvelles hormonothérapies
De nouveaux traitements antihormonaux sont en cours d’évaluation, redéfinissant ainsi le concept de cancer de prostate résistant à la castration. La molécule la plus avancée est l’acétate d’abiratérone, inhibiteur de la synthèse des androgènes, notamment en inhibant le complexe CYP-17 au sein de la surrénale. L’acétate d’abiratérone (Zytiga®) a obtenu l’AMM en postchimiothérapie (et bientôt en pré-chimiothérapie également), après avoir prouvé dans une phase 3, un gain en survie globale.
D’autres molécules sont en cours de validation :
Les modalités d’action des traitements hormonaux du cancer de la prostate sont résumées dans la figure11.
9) Chimiothérapie
La chimiothérapie a une place reconnue dans le cancer de prostate métastatique résistant à la castration et symptomatique.
Le plus difficile est de trouver le bon moment pour initier le traitement. Actuellement, un patient porteur de métastases hépatiques ou très symptomatiques (douleur) semble être le bon moment pour employer ce traitement.
La molécule de 1re intention est le docétaxel (Taxotère®) associé à de la prednisone, molécule appartenant à la famille des inhibiteurs des microtubules.
En 2e ligne et pour les malades ayant eu une bonne réponse première au docétaxel, le cabazitaxel (Jevtana®) est une nouvelle chimiothérapie en cours d’obtention d’AMM. Il s’agit d’une taxane semi-synthétique ayant montré récemment une amélioration de la survie globale.
10) Biphosphonates/irradiation métabolique
Les biphosphonates (acide zolédronique, Zometa®) inhibent la résorption osseuse liée à l’activité ostéoclastique. Sa place est démontrée dans le cancer de prostate résistant à la castration et a un effet clinique sur l’événement osseux (fracture osseuse, douleur osseuse, hypercalcémie, compression médullaire).
Avant l’utilisation de ce traitement, une panoramique dentaire est nécessaire (risque de nécrose mandibulaire de 5 %).
Il est probable que dans les mois à venir l’alpharadine (chlorure de radium 223) remplace l’acide zolédronique par une efficacité supérieure sur la réduction de la progression des métastases osseuses, sur la réduction des événements osseux types fractures ou tassement, et sur l’augmentation de la survie globale.
11) Chirurgie de l’obstacle sous-vésical et de l’obstruction rénale
Dans les situations palliatives et devant des signes d’obstruction urinaire, il peut se discuter une chirurgie a minima de désobstruction de la voie urinaire.
Deux situations sont donc possibles :
12) Soins palliatifs et soins de support
L’un des objectifs principaux dans la prise en charge du cancer de prostate est le confort avec une bonne qualité de vie du patient.
L’objectif du clinicien est le traitement de tout nouveau symptôme pouvant entraver le quotidien du patient.
La prise en charge se fait de manière pluridisciplinaire et les décisions sont souvent prises en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP), notamment avec l’aide active des équipes de soins palliatifs, du médecin référent et des médecins algologues.
À ce titre, la prise en charge de la douleur peut faire employer :
Le schéma ci-après reprend les différents mécanismes d’action des traitements hormonaux (figure 11).
Le choix thérapeutique dépend du stade, de la différenciation, des troubles mictionnels éventuels, des facteurs de comorbidités, des signes cliniques présents au diagnostic et de l’espérance de vie du patient. Il est donc essentiel d’avoir au moment de la RCP tous les éléments pour pouvoir discuter du dossier.
1) Cancer de prostate localisé
Le traitement curatif tient compte des comorbidités du patient et de son espérance de vie. Il n’est donc envisagé que chez les patients ayant une espérance de vie > 10 ans. Dans le bilan d’extension, l’IRM prostatique est optionnelle, mais souvent réalisée ; par contre la scintigraphie osseuse et le scanner thoraco-abdomino-pelvien n’ont pas leur place. Il est légitime de proposer une surveillance simple chez les patients dont l’espérance de vie est de moins 10 ans (tableau 1).
Traitements standards validés | Prise en charge à discuter avec le patient | En cours d’évaluation |
Prostatectomie radicale | Surveillance active | Ablatherm |
Radiothérapie externe à la dose 76–78 Gy | Protocole de photothérapie (Tookad) |
|
Curiethérapie |
2) Cancer localement avancé
Le raisonnement est le même dans ce sous-groupe de patients : le traitement curatif ne vaut que pour les hommes de moins de 75 ans et ayant une espérance de vie de plus de 10 ans. Le bilan d’extension doit comporter obligatoirement l’IRM prostatique, le scanner thoraco-abdomino-pelvien et la scintigraphie osseuse. Il peut notamment faire changer l’attitude thérapeutique selon la découverte de sites métastatiques ou même d’un franchissement capsulaire avec atteinte des vésicules séminales (tableaux 2 et 3).
Traitements standards validés | En option |
Prostatectomie radicale avec curage ganglionnaire étendu | |
Radiothérapie externe à la dose > 76–78 Gy | Curiethérapie associée à la radiothérapie |
Radiothérapie externe avec une hormonothérapie courte de 6 mois (protocole Bolla) Traitement multimodal association chirurgie radiothérapie et hormonothérapie |
Traitements standards validés | En option |
Hormono-radiothérapie | Hormonothérapie seule |
Prostatectomie radicale avec curage ganglionnaire étendu chez le sujet jeune |
3) Cancer de la prostate métastatique
La suppression androgénique par castration chirurgicale ou par hormonothérapie (agoniste ou antagoniste LHRH) est le traitement de première ligne, quel que soit le nombre de sites métastatiques (ganglionnaire ou viscéral). Elle s’associe toujours, dans le cadre de cette prise en charge palliative, au traitement des symptômes du patient (douleur osseuse, anémie, dysurie…).
Au moment de la progression biologique, après une première ligne d’hormonothérapie (phase de résistance à la castration), il convient :
Après cette seconde ligne d’hormonothérapie, et si le PSA progresse et/ou les signes cliniques, le cancer est appelé « résistant à la castration ».
Dans cette phase, il peut être proposé soit d’autres lignes de manipulations hormonales avec le diéthylbestrol ou prochainement les nouvelles hormonothérapies type acétate d’abiratérone ou MDV3100 (protocole d’hormonothérapie en cours d’évaluation), soit une chimiothérapie à base de docétaxel (Taxotère®) en particulier pour les patients symptomatiques (tableau 4).
Cancer de prostate M + | 1re intention | Réélévation PSA | Si échec : réélévation du PSA | Si échec : réélévation PSA + patient non symptomatique | Si échec et patient symptomatique | Si progression postchimiothérapie |
Traitement | BAC | Arrêt de l’antiandrogène = SYNDROME DE RETRAIT DES ANDROGÈNES | Hormonothérapie de 2nd génération : œstrogène, estracyt | Essai clinique d’hormonothérapie Prochainement abiratérone Chimiothérapie à discuter en cas de patient jeune | Chimiothérapie par Docétaxel | Abiratérone Cabazitaxel Radiothérapie métabolique Prochainement MDV 3100 |
Si le cancer progresse après chimiothérapie, il s’agit d’un cancer résistant à la castration et à la chimiothérapie. L’indication actuelle est l’association de l’acétate d’abiratérone et de la prednisone ou d’une nouvelle ligne de chimiothérapie (cabazitaxel, Jevtana®). Il peut être aussi proposé la reprise de la chimiothérapie par docetaxel – surtout si la réponse initiale à ce traitement était favorable –, ou l’utilisation de la mitoxantrone-prednisone.