6  -  Prostatite


Il s’agit d’une infection potentiellement grave, de bon pronostic si le traitement est bien conduit, mais avec un risque de complications à type de sepsis grave, d’abcès prostatique ou de passage à la chronicité, notamment chez le diabétique et l’immunodéprimé.

L’antibiothérapie est difficile en raison de la mauvaise diffusion prostatique de nombreuses molécules (β-lactamines, aminosides), surtout dans les formes chroniques du fait de la fibrose. La stratégie diagnostique et thérapeutique varie selon la forme clinique.

6 . 1  -  Prostatite aiguë


Le diagnostic microbiologique repose sur l’ECBU et les hémocultures dans les formes sévères. Le massage prostatique est déconseillé plus du fait du caractère douloureux que du risque de dissémination à proprement parler. Le bilan est complété par une échographie vésicale par voie sus-pubienne à la recherche d’une rétention d’urines : mesure du résidu postmictionnel, recherche d’un globe vésical. L’échographie transrectale est déconseillée à la phase aiguë.

En cas d’évolution défavorable, il faut rechercher un abcès prostatique par une IRM ou à défaut par une échographie transrectale. Les principales complications de la prostatite aiguë sont :

  • la rétention d’urines (parfois révélatrice) ;
  • l’épididymite aiguë associée, par infection ascendante par voie déférentielle ;
  • l’abcès prostatique à suspecter devant des signes infectieux persistant malgré 48 h d’antibiothérapie efficace et l’existence au TR d’une zone fluctuante très douloureuse ;
  • le sepsis grave, voire le choc septique, mettant en jeu le pronostic vital
  • et enfin le passage à la chronicité.

L’antibiothérapie est débutée de manière probabiliste, en choisissant :

  • C3G injectable : ceftriaxone (Rocéphine® 1 g/j IV, IM ou SC) ou céfotaxime (Claforan® 1 g × 3/j IV ou IM) ;
  • ou fluoroquinolone (ciprofloxacine : Ciflox® 500 mg × 2/j, lévofloxacine : Tavanic® (à préférer pour le pneumocoque) 500 mg × 2/j, ofloxacine : Oflocet® 200 mg × 2/j) PO (voie IV uniquement si PO impossible), à éviter si prise de fluoroquinolone dans les 6 mois précédents.

En cas de sepsis sévère, il est préférable d’ajouter initialement un aminoside (amikacyne, gentamycine, nétilmicine, tobramycine) pendant 1 à 3 jours (jusqu’à l’apyrexie), puis de proposer un relais par voie orale après obtention de l’antibiogramme en privilégiant les deux seules classes d’antibiotiques à bonne diffusion prostatique : fluoroquinolone et cotrimoxazole. La durée totale du traitement est mal codifiée mais dure classiquement 3 à 4 semaines. Elle peut se limiter à 14 jours dans les formes pauci-symptomatiques à germe très sensible, ou être étendue à 21 jours ou plus en cas d’abcès ou de traitement probabiliste inactif.

Certaines mesures associées sont recommandées comme le traitement symptomatique (antalgiques, antipyrétiques [pas d’AINS] et les α-bloquants en cas de dysurie.

La surveillance clinique est indispensable et s’assure d’un retour à l’apyrexie après 48 h d’antibiothérapie efficace. En cas de rétention d’urines, le drainage vésical sera classiquement assuré par un cathéter sus-pubien.

L’ECBU de contrôle est systématique sous traitement antibiotique en cas de persistance de la fièvre et 4 à 6 semaines après la fin du traitement, afin de dépister une éventuelle prostatite chronique, une rechute ou une récidive.

À distance de l’épisode, il faudra effectuer un bilan à la recherche d’un facteur favorisant :

  • une échographie réno-vésico-prostatique avec mesure du volume prostatique et recherche d’un résidu postmictionnel ;
  • un dosage des PSA si le patient a plus de 50 ans, anomalies cliniques ou facteurs de risque (aucun intérêt du dosage des PSA à la phase aiguë car élévation transitoire inconstante).

En cas d’abcès prostatique, le traitement médical est le plus souvent suffisant. Dans le cas contraire, un drainage à l’aiguille (par voie transrectale ou transpérinéale) ou drainage chirurgical peut être réalisé.

Il faut savoir prendre en charge le cas particulier de la prostatite aiguë iatrogène après biopsies de prostate. Il s’agit d’une urgence médicale qui peut mettre en jeu le pronostic vital. Une hospitalisation initiale est recommandée avec la réalisation d’un ECBU et d’hémocultures. Une bi-antibiothérapie intraveineuse probabiliste est recommandée associant des C3G injectables et un aminoside (en raison de la sélection des germes par l’antibioprophylaxie par fluoroquinolone), adaptée dans un second temps aux données de l’antibiogramme.

6 . 2  -  Prostatite chronique


La symptomatologie est souvent peu bruyante et associe notamment :

  • une pesanteur pelvienne ;
  • des brûlures mictionnelles, une pollakiurie, une dysurie, une nycturie ;
  • des douleurs éjaculatoires, une hémospermie ;
  • des irritations urétrales et des accès fébriles.

La prostate est inconstamment augmentée de volume, irrégulière ou douloureuse. Il faut évoquer ce diagnostic devant toute infection urinaire récidivante chez l’homme. L’ECBU après massage prostatique a un intérêt pour le diagnostic microbiologique (test des 4 verres selon Meares et Stamey). Les autres explorations vont rechercher un facteur favorisant et éliminer un diagnostic différentiel :

  • échographie réno-vésico-prostatique avec mesure du volume prostatique et recherche d’un résidu postmictionnel ;
  • dosage des PSA si > 50 ans, anomalies cliniques ou facteurs de risque (aucun intérêt du dosage des PSA à la phase aiguë car élévation transitoire inconstante) ;
  • éventuellement urétrocystoscopie, selon le contexte, à la recherche d’une sténose urétrale.

Le traitement antibiotique doit être prolongé car les remaniements scléro-fibreux rendent l’éradication bactérienne difficile. Il faut privilégier les fluoroquinololes ou le cotrimoxazole si les germes sont sensibles, car ces antibiotiques ont une meilleure diffusion prostatique. La durée du traitement est mal codifiée, de 4 à 12 semaines selon la situation. Le traitement urologique d’un facteur favorisant doit toujours être envisagé.

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