5  -  Phéochromocytomes et paragangliomes fonctionnels

5 . 1  -  Pathogénie et définition

Ces tumeurs synthétisent des catécholamines de façon plus ou moins continue. L’adrénaline et la noradrénaline sont pour l’essentiel converties en métanéphrines inactives au sein de la tumeur. Seule la fraction non convertie exerce un effet cardiovasculaire : elle élève la PA par la stimulation des récepteurs vasculaires a-adrénergiques et par la stimulation du système rénine angiotensine ; elle accélère le cœur par l’effet cardiaque ß-adrénergique. 

Les PH proprement dits dérivent de la médullosurrénale ; les tumeurs sécrétantes qui dérivent d’autres ganglions sympathiques sont appelés paragangliomes fonctionnelsDéfinitionAnomalie de la fonction d'un organe. Par opposition à lésionnel : l'organe est atteint dans sa structure.. Il existe aussi des paragangliomes non fonctionnels qui n’élèvent pas la PA.

5 . 2  -  Présentation et prévalence

 L’expression la plus fréquente de ces tumeurs est l’HTA, particulière par sa variabilité, la tendance à l'hypotension orthostatique et l’association d’une hyperglycémie. Le PH est spontanément mortel du fait de poussées hypertensives, de troubles du rythme et de l'évolution de la tumeur : 1 cas sur 10 est malin d’emblée et 2 cas bénins sur 10 récidivent dans les 10 ans. 

Le dépistage s’adresse aux hypertendus qui rapportent des céphalées, des sueurs et des palpitations et à ceux dont l’HTA est paroxystique ou associée à un diabète sans surpoids. Il s’adresse également aux patients ayant un syndrome familial prédisposant au PH : la NF1, la maladie de von Hippel Lindau [VHL], la néoplasie endocrinienne multiple de type 2 [NEM2], et les syndromes PH-paragangliomes familiaux, de connaissance récente. L’une de ces quatre maladies est présente dans 30% de l’ensemble des PH, et dans 15% environ des cas de PH apparemment sporadiques. Enfin la recherche d’un PH fait partie de l’enquête étiologique des « incidentalomes DéfinitionTumeur découverte fortuitement, anglicisme : incidental = fortuit en anglais.» (tumeurs surrénales de découverte fortuite). 

C’est une cause rare d’HTA (de l’ordre de 1 sur 1000 hypertendus).

5 . 3  -  Diagnostic positif

Il repose sur la mesure des métanéphrines plasmatiques ou urinaires (Figure 4). On peut utiliser le rapport métanéphrines urinaires totales sur créatinine avec un seuil diagnostique de 0,354 µmol/mmol. Les catécholamines sont produites de façon intermittente par le PH et le stress les élève de façon non spécifique, si bien que la mesure des catécholamines a une médiocre valeur diagnostique. Elle a en revanche une valeur pronostique : une faible proportion d’adrénaline, témoin d’une faible maturité sécrétoire, est associée à un haut risque de récidive.

Figure 4 : Algorithme pour l’exploration et la surveillance des PH et paragangliomes

5 . 4  -  L'imagerie

 Elle précise le nombre, le siège et les rapports de la ou des tumeurs, et détecte d'éventuelles métastases. Les PH de l'adulte sont uniques dans la majorité des cas et le diamètre moyen de la tumeur est de 5 cm. Ils sont donc faciles à localiser par échographie, scanner ou IRM. Les vrais problèmes sont de ne pas méconnaître une tumeur extrasurrénale, c'est-à-dire un paragangliome, ou des tumeurs multiples, et de diagnostiquer les PH malins sur la présence de métastases. 

Dans l’ordre décr oissant de fréquence, les paragangliomes sécrétants siègent dans l’organe de Zuckerkandl, la vessie, les hiles rénaux, le médiastin postérieur, le péricarde et le cou. Ces tumeurs ectopiques différent des PH par un risque supérieur d’évolution maligne. Un paragangliome non sécrétant peut être associé à un PH ou à un paragangliome sécrétant. 

L’imagerie anatomique est systématiquement complétée par une scintigraphie utilisant un traceur spécifique, la MIBG, pour détecter des tumeurs ectopiques ou multiples ou des métastases (voir Figure 4). Les paragangliomes non fonctionnels ne fixent habituellement pas ce traceur.

5 . 5  -  L’enquête génétique

 Même en l’absence d’antécédent familial, il faut dépister une maladie génétique associée : recherche de taches café au lait ou de neurofibromes (NF1), examen ophtalmologique à la recherche de nodules de Lisch (NF1) ou d’hémangioblastomes (VHL). Le diagnostic de NF1 reste fondé sur la clinique car le phénotype de cette maladie est caractéristique chez l’adulte. On recommande désormais un dépistage des autres maladies par un test génétique : recherche de mutation des gènes RET ou VHL pour détecter une NEM2 ou un VHL, et des gènes de la famille SDH pour détecter les paragangliomes familiaux. Ce dépistage a une portée diagnostique pour le patient et sa famille, importe à la sécurité opératoire (présence possible d’hémangioblastome cérébelleux dans le VHL), et a une valeur pronostique: les récidives sont 16 fois plus fréquentes dans les cas familiaux que dans les cas sporadiques.

5 . 6  -  Traitement et surveillance postopératoire

 Le traitement chirurgical est toujours indiqué du fait du risque évolutif, même si la réversion de l’HTA est inconstante, notamment quand l’âge augmente. La chirurgie demande une bonne préparation et une équipe d’anesthésistes et de chirurgiens expérimentés, ce qui justifie une centralisation de la prise en charge des PH.  

Le risque de récidive et la nécessité d’une surveillance à long terme doivent être expliqués au patient. Cette surveillance est annuelle, clinique (symptômes, PA) et biologique (mesure de la glycémie et des métanéphrines), l’imagerie intervenant si la biologie est positive. 

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