Introduction

La coelioscopie (ou laparoscopie) est une technique chirurgicale moderne qui a débuté en 1940 avec Raoul Palmer [ (1) Palmer R., La coelioscopie. Bruxells Med 1948;28:305-12.1]. Née et développée dans un premier temps en gynécologie, elle a par la suite investi et bouleversé tous les champs de la chirurgie en introduisant le concept de chirurgie minimale invasive [ (2) Bruhat AA, Manhes H, Choukroun J, Suzanne F., Essai d’un traitement per coelioscopique de la grossesse extra-utérine : à propos de 26 observations. Rev Fr Gynecol Obstet 1979;72:667-9.2- (5) Bruhat MA., Operative laparoscopy. New York: McGraw Hill; 1991.5]. Sur le principe, elle consiste à opérer dans la cavité abdominale sans réaliser d’ouverture pariétale large contrairement à la laparotomie. La vision du champ opératoire s’effectue sur un écran grâce à une optique fine (ou endoscope) passée à travers la paroi et reliée à une source de lumière et à une caméra. La coelioscopie nécessite l’insufflation d’un gaz dans la cavité péritonéale afin de créer un espace de travail que l’on appelle le pneumopéritoine. Les gestes sont réalisés à l’aide d’une instrumentation spécifique également passée en transpariétal par des trocarts mesurant en général entre 5 et 12 mm (Fig. 1). Loin de n’être qu’une voie d’abord parmi d’autres, la laparoscopie correspond à une nouvelle conception de la chirurgie. Ses avantages sont nombreux : caractère mini-invasif, diminution de la morbidité postopératoire [ (6) Holzer A, Jirecek ST, Illievich UM, Huber J,Wenzl RJ., Laparoscopic versus open myomectomy: a double-blind study to evaluate postoperative pain. Anesth Analg 2006;102:1480-4.6], bénéfice esthétique, vision magnifiée du champ opératoire, précision et efficacité des gestes chirurgicaux, respect de l’anatomie et de la physiologie. Toutefois, elle est très dépendante de la technologie qui l’accompagne et comporte des complications qui lui sont propres [ (7) Garry R., Laparoscopic surgery. Best Pract Res Clin Obstet Gynecol 2006;20:89-104.7- (10) Chapron C, Querleu D, Bruhat MA, Madelenat P, Fernandez H, Pierre F, et al., Surgical complications of diagnostic and operative gynaecological laparoscopy. A series of 29 966 cases. Hum Reprod 1998;13:867-72.10]. Afin de l’entreprendre dans les meilleures conditions, il importe de bien connaître ses spécificités, son environnement et son matériel.

1  -  Spécificités et contraintes de la coelioscopie

1 . 1  -  Paroi fermée

Par définition, la coelioscopie crée un espace opératoire sans ouvrir la paroi. La pression intra-abdominale (PIA) étant physiologiquement négative, la cavité est donc virtuelle. Écarter sans ouvrir, c'est donc mettre la cavité en pression positive.
Cette contrainte de paroi fermée oblige le chirurgien à intervenir sur les tissus au travers de trocarts. Il effectue donc en permanence un transfert de force et d'énergie de l'extérieur vers l'intérieur de la cavité abdominale. De cette particularité découlent plusieurs contraintes ayant chacune leurs conséquences.

1 . 1 . 1  -  Contraintes de pression

La pression positive réalisée par l'insufflation de gaz dans la cavité abdominale peut être responsable de complications médicales. Toutefois, si le fonctionnement de l'insufflateur est bien compris et bien utilisé, et surtout, si le chirurgien connaît la physiologie hémodynamique et respiratoire, l'utilisation de la pression positive à bon escient peut devenir un facteur de sécurité. En effet, les fonctions du gaz sont multiples.

  • Mise en tension de la paroi abdominale : ceci permet d'éloigner la paroi des gros vaisseaux lors de l'introduction des trocarts.
  • Création de l'espace opératoire par écartement des structures les unes des autres : ceci génère la vision et apporte une plus grande sécurité lors de l'application des énergies électriques.
  • Infiltration et dissection des plans par le gaz : cette propriété appelée barodissection est particulièrement intéressante car elle facilite souvent la reconnaissance des plans de clivage.
  • Barohémostase : grâce à la pression positive régnant dans la cavité, il existe un tamponnement qui protège du saignement, mais qui peut aboutir à un saignement différé si une vérification de l'hémostase n'est pas réalisée à faible pression en fin d'intervention. En effet, si on compare les pressions intravasculaires à la pression du pneumopéritoine, le différentiel est toujours en faveur du vaisseau plutôt qu'en faveur du pneumopéritoine. En conséquence, lors d'une plaie vasculaire, il y a hémorragie. Cependant, pour le réseau capillaire, le différentiel s'inverse et devient favorable au pneumopéritoine. Dans ces circonstances, il existe un tamponnement, qui aboutit à une hémostase. Le coelioscopiste peut augmenter provisoirement la PIA à des fins d'hémostase. Ce fait endoscopique est intéressant car plusieurs facteurs d'hémostase peuvent être associés. Le remplissage du cul-desac de Douglas avec un liquide de lavage chaud associé à une élévation de la PIA aboutit à une hémostase plus efficace. Ce phénomène s'apparente à la compresse laparotomique et doit être utilisé avec l'accord de l'anesthésiste.
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