1 - Démarche diagnostique
Les douleurs des membres sont une cause fréquente de consultation, mode d’expression ou de révélation d’un champ très vaste de maladies, nécessitant une démarche diagnostique centrée sur trois objectifs :
– Quel est le type de la douleur ?
– Quelle est la topographie de la lésion ?
– Quelle est la nature de la lésion ?
Avant de se précipiter sur la détermination par l’interrogatoire des caractères sémiologiques élémentaires de la douleur, il faut définir dès les premières minutes de l’entrevue médicale le problème de santé du patient à partir de la plainte principale du malade (ici la douleur), de symptômes éventuellement associés et du contexte perçu. Ceci permet d’évoquer des hypothèses précoces, le plus souvent à partir d’éléments anatomiques permettant de préciser la topographie de la lésion : s’agit-il d’une douleur d’origine articulaire, osseuse, musculotendineuse, neurologique, vasculaire, cutanée… ? Ces hypothèses servent de cadre au recueil d’informations supplémentaires et permettent de sortir du champ d’interrogatoire d’un seul système (locomoteur, par exemple). L’interrogatoire, l’examen clinique et les examens complémentaires permettront de confirmer ou d’infirmer ces hypothèses.
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1 - Caractères sémiologiques élémentaires de la douleur
Le premier temps est de connaître les caractères sémiologiques élémentaires de la douleur : son type (cf. chapitre 7), neuropathique ou par excès de nociception (nociceptive) et, dans ce dernier cas, son rythme, inflammatoire ou mécanique.
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1 - Douleur neuropathique
Il s’agit d’une activation des voies de la douleur, sans stimulation nociceptive.
La douleur neuropathique — préférable au terme « neurogène », ambigu et au terme « désafférentation » qui n’est plus utilisé car il suppose un mécanisme physiopathologique unique — peut être précisée par le Questionnaire DN4 (cf. Annexe en fin de chapitre) qui comprend uniquement les données cliniques fournies par l’interrogatoire et un examen simple de la sensibilité regroupées en dix items répartis en quatre grandes questions. Les deux premières questions, comportant sept items, reposent sur l’interrogatoire pour rechercher les descripteurs caractéristiques de la douleur neuropathique spontanée (« brûlures », « froid douloureux », « décharges électriques »), ainsi que l’association à des sensations anormales (paresthésies, dysesthésies) dans le même territoire (« fourmillements », « picotements », « engourdissement », « démangeaisons »). Les deux dernières questions visent à mettre en évidence un déficit de la sensibilité tactile dans le territoire douloureux (pique/touche) et/ou une douleur déclenchée par le simple frottement (allodynie). Chacun de ces items appelle une réponse par oui ou par non et un score de 1 est donné pour chaque réponse positive. Le score DN4 global correspond simplement à la somme des réponses positives. À partir d’un score de 4 sur 10, considéré comme un seuil, la spécificité pour le diagnostic de douleur neuropathique atteint 90 % et la sensibilité 83 %. Aucun symptôme isolé n’est spécifique ou pathognomonique de douleur neuropathique, mais c’est l’association de plusieurs symptômes qui permet le diagnostic.
La douleur neuropathique combine un fond douloureux permanent à type de brûlure à des accès paroxystiques (décharge électrique en éclair, coup de couteau, etc.) ; elle peut s’accompagner d’une allodynie (réponse douloureuse à une stimulation normalement indolore : effleurement, une source de chaleur ou même un mouvement), d’une hyperalgésie (réponse anormalement intense à une stimulation douloureuse), d’une hyperpathie (douleur extrêmement intense qui se prolonge après l’arrêt du stimulus et dont l’étendue déborde largement la zone stimulée) ; elle n’est pas améliorée par les antalgiques habituellement. La douleur neurogène peut être volontiers reproduite par la pression d’une zone gâchette très localisée et a une systémisation neurologique caractéristique (topographie neurologique radiculaire, tronculaire ou plexique). L’examen neurologique est perturbé : aréflexie, déficit moteur, déficit sensitif dans le territoire concerné à type d’hypoesthésie ou d’anesthésie douloureuse, hypersensibilité (allodynie, hyperesthésie, hyperalgésie). Une composante sympathique peut être associée : sueurs, troubles vasomoteurs, œdème, troubles trophiques.
Fait important, le fait qu’une douleur soit décrite comme une brûlure et/ou soit associée à une allodynie ne suffit pas à la qualifier de « neuropathique ».
Le plus souvent le contexte permet de faire le diagnostic. Les nerfs périphériques peuvent être lésés par un traumatisme (plaie chirurgicale, compression prolongée, étirement), une amputation, une infection (zona), une pathologie chronique (diabète, alcoolisme) ou certains médicaments (du sida, du cancer). Le système nerveux central et la moelle épinière peuvent être lésés en cas de maladie démyélinisante, d’accident vasculaire cérébral, de traumatisme (paraplégie), etc.
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