Avant de commencer…

Les méningites bactériennes ont été individualisées dans ce chapitre en raison de leur fréquence chez l’enfant ainsi que de leur sévérité.

Elles sont liées à l’envahissement du LCR par une bactérie qui s’y développe.

Le diagnostic doit être systématiquement :
- suspecté rapidement sur les données cliniques (plus difficilement évaluables chez le nourrisson) ;
- évalué en terme de gravité sur l’état hémodynamique et neurologique ;
- confirmé par l’étude du liquide céphalorachidien obtenu par ponction lombaire.

La prise en charge thérapeutique initiale repose sur une antibiothérapie IV :
- la plus précoce possible ;
- probabiliste et argumentée sur des données épidémiologiques actualisées :
   -- pneumocoque (S. pneumoniae) : chez le nourrisson (1re bactérie avant 1 an),
   -- méningocoque (N. meningitidis) : à tout âge ;
- avec comme objectif premier la stérilisation rapide du LCR :
   -- C3G injectables dose méningée classique 200 mg/kg/j si N. meningitidis ou H. influenzae b,
   -- C3G injectables dose méningée renforcée 300 mg/kg/j si S. pneumoniae.

Le suivi nécessite des évaluations neurologiques, cognitives et auditives.

Des mesures préventives pour les sujets contacts sont indiquées pour les méningites à méningocoque.

1  -  Pour bien comprendre

1 . 1  -  Épidémiologie

1 . 1 . 1  -  Prévalence et principaux agents infectieux


L’incidence des méningites bactériennes est beaucoup plus élevée chez l’enfant que chez l’adulte.

Elle est estimée tous âges et tous germes confondus à 2,2/100 000 habitants en France, et à 50/100 000 habitants dans les pays en voie de développement.

La mortalité et les séquelles sont très élevées dans les pays en voie de développement.

Elles demeurent élevées également dans les pays industrialisés. En France, les méningites à pneumocoque ont, malgré le recours à des stratégies antibiotiques adaptées, une mortalité évaluée à 10 % et des séquelles chiffrées à 30 % en moyenne.

Deux bactéries prédominent chez l’enfant (nouveau-nés exclus) :

  • Streptococcus pneumoniae : plus fréquent entre les âges de 2 et 12 mois ;
  • Neisseria meningitidis : plus fréquent après l’âge de 12 mois.

1 . 1 . 2  -  Pneumocoque (Streptococcus pneumoniae)


Généralités

S. pneumoniae
est un germe de portage des VAS du jeune enfant.

Les méningites à pneumocoque sont plus fréquentes entre 2 et 12 mois de vie. Elles représentent environ 60 % des méningites bactériennes à ces âges.

Impact de la vaccination

L’impact de la généralisation du vaccin pneumococcique conjugué à 7 valences s’est initialement traduit par une réduction du pourcentage des méningites purulentes liées aux sérotypes inclus dans ce vaccin ainsi que par une réduction de la résistance de ceux-ci aux pénicillines. En 2007, le nombre de cas de méningites à pneumocoque s’était accru, en particulier du fait de l’émergence de sérotypes de remplacement comme le pneumocoque de sérotype 19A non contenu dans le vaccin 7 valences. Ce sérotype représentait en 2010 près de 20 % des pneumocoques responsables de méningites purulentes chez l’enfant.

L’émergence de sérotypes de remplacement (1, 3, 5, 6A, 7F, et surtout 19A) a justifié en 2010 la généralisation de la recommandation du nouveau vaccin pneumococcique conjugué à 13 valences (Prévenar 13®) contenant les 7 valences du Prévenar 7 ® additionnées de 6 autres sérotypes 1, 3, 5, 6A, 7F et surtout 19A.

Depuis 2013, les souches résistantes ont quasiment disparu permettant de simplifier les recommandations thérapeutiques.

Résistances

La sensibilité aux bêtalactamines est actuellement d’environ 10 % des souches de pneumocoque et varie en fonction des sérotypes. Ainsi parmi les souches de sérotypes 19A, respectivement 80 % et 70 % étaient de sensibilité diminuée (I + R) à la pénicilline et à l’amoxicilline et 14 % avaient une sensibilité diminuée au céfotaxime.

La résistance de S. pneumoniae à la pénicilline G est liée à une diminution d’affinité des PLP d’origine chromosomique. L’émergence de cette résistance est liée à la fois à la diffusion de clones résistants et au transfert horizontal de gènes de résistance.

En pédiatrie, la prévalence de la résistance de S. pneumoniae aux bêtalactamines impose d’effectuer une détermination des CMI par la méthode du E-Test® de la pénicilline, de l’amoxicilline mais aussi du céfotaxime ou de la ceftriaxone pour toutes les souches isolées.

1 . 1 . 3  -  Méningocoque (Neisseria meningitidis)


Généralités

N. méningitidis
est une bactérie de portage du rhinopharynx.

Le germe possède une capsule polyosidique déterminant son sérogroupe. Parmi les 12 sérogroupes, celui prédominant en France au cours des infections invasives à méningocoque est le B (2/3 environ), suivi du C (1/3 environ) puis du W135 (fréquence épidémiologique variable) et du Y.

Les méningites à méningocoque sont fréquentes après 12 mois de vie. Elles représentent alors environ 60 % des méningites bactériennes.

Impact de la vaccination

Les recommandations vaccinales effectives depuis 2010 d’un vaccin méningococcique C conjugué ont pour objectif de réduire le nombre d’infections invasives méningococciques de sérogroupe C (dont les méningites) en mettant en place une immunité de groupe.

Résistances

Les CMI de la pénicilline observées chez les souches de N. méningitidis isolées en France sont presque toutes comprises entre 0,1 et 0,5 mg/L. Les C3G injectables sont toujours très sensibles avec des CMI 90 du céfotaxime et de la ceftriaxone < 0,01 mg/L.

L’émergence de souches intermédiaires à la pénicilline n’a pas été associée à des échecs de traitement à posologies augmentées.

De telles données valident le maintien d’un traitement en 1re intention par une C3G injectable (cefotaxime ou ceftriaxone). Celui-ci assurant l’éradication du portage de ce germe, il dispense en outre de prescrire chez l’enfant atteint un traitement complémentaire par la rifampicine.

Deux mécanismes de résistance ont été décrits :

  • le premier est lié à la production de bêtalactamases ; les C3G restent actives vis-à-vis de ces souches ;
  • le second est lié à la diminution de l’affinité des protéines liant les pénicillines (PLP) pour la pénicilline ; l’analyse des séquences des gènes codant les PLP met en évidence la présence de gènes mosaïques selon un mécanisme proche de celui décrit pour S. pneumoniae.

1 . 1 . 4  -  Autres germes


L’incidence des autres bactéries est plus rare.

Le streptocoque du groupe B est le 1er germe responsable des méningites chez les enfants âgés de moins de 2 mois. E. coli est le second germe aux mêmes âges.

Haemophilus influenzae b est actuellement exceptionnellement responsable de méningites depuis la généralisation en France de la vaccination anti-Haemophilus influenzae b.

D’autres bactéries sont responsables de méningites dans des contextes particuliers, habituellement chez des enfants plus âgés : salmonelles (enfants drépanocytaires), staphylocoque coagulase négatif et bacilles Gram négatif (infections nosocomiales), germe opportuniste (immunodéprimés).

Redouter : le pneumocoque surtout avant l’âge de 1 an, le méningocoque à tout âge.

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