3  -  Diagnostic d'une pathologie hémorragique acquise ou constitutionnelle de l'hémostase primaire

Les maladies de l’hémostase primaire incluent les thrombopénies, qui sont fréquentes (item 335), les thrombopathies, le plus souvent acquises, et la maladie de Willebrand, la plus fréquente des pathologies constitutionnelles de l’hémostase.

3 . 1  -  Thrombopathies

Une thrombopathie est évoquée devant des saignements cutanéomuqueux inexpliqués, associés à une numération plaquettaire normale, un TCA et un TQ normaux.

Thrombopathies acquises

  • Thrombopathies médicamenteuses très fréquentes :
    • médicaments inhibant les fonctions plaquettaires : aspirine, anti-inflammatoires non stéroïdiens, thiénopyridines (clopidogrel, prasugrel, etc.) ;
    • inhibiteurs de la recapture de la sérotonine ;
    • pénicillines à doses élevées.
  • Certaines hémopathies : gammapathies monoclonales, syndromes myéloprolifératifs, myélodysplasies.


Thrombopathies constitutionnelles


Beaucoup plus rares, elles sont plus facilement évoquées chez l’enfant et s’il existe des antécédents familiaux de saignement. Leur diagnostic, porté grâce à l’étude fonctionnelle des plaquettes, relève de centres spécialisés : thrombopathies affectant l’adhésion (syndrome de Bernard-Soulier), la sécrétion (déficit enzymatique ou en granules plaquettaires) ou l’agrégation plaquettaire (thrombasthénie de Glanzmann).

3 . 2  -  Maladie de Willebrand

Elle est habituellement recherchée devant des saignements cutanéomuqueux inexpliqués, ou dans le cadre d’une enquête familiale.

Maladie de Willebrand

  • C’est la plus fréquente des maladies constitutionnelles de l’hémostase.
  • La maladie de Willebrand est due à un déficit quantitatif ou qualitatif du vWF, protéine qui permet l’adhésion des plaquettes au sous-endothélium ; un déficit en FVIII est en général associé car le vWF a pour autre fonction de stabiliser le FVIII dans le plasma. La maladie de Willebrand est transmise dans la majorité des cas selon un mode autosomal dominant (déficit quantitatif ou qualitatif) et très rarement autosomal récessif (déficit profond), et affecte les deux sexes.


Le taux plasmatique du wWF est compris chez le sujet normal entre 50 et 150 %. Il est plus bas chez les sujets de groupe O, pour lesquels il peut être voisin de 50 %, voire inférieur.

L’expression clinique de la maladie de Willebrand est très hétérogène. Cliniquement, en cas de déficit en vWF inférieur à 50 %, les saignements rencontrés sont :

  • cutanés : ecchymoses ;
  • muqueux : épistaxis, gingivorragies, ménométrorragies.


Ils peuvent être spontanés ou provoqués lors d’extraction dentaire ou après amygdalectomie, et sont de gravité variable selon le déficit. Ils sont très sévères dans le type 3 (déficit sévère, voire complet en vWF), exceptionnel.

Dans les formes les plus fréquentes (type 1), les signes biologiques typiques sont les suivants :

  • diagnostic d’orientation : syndrome hémorragique cutanéomuqueux avec :
    • nombre de plaquettes normal ;
    • allongement du TCA, variable selon le taux de FVIII plus ou moins abaissé ;
    • le TS et le temps d’occlusion plaquettaire, s’ils sont pratiqués, sont allongés mais peuvent aussi être normaux.
  • confirmation du diagnostic :
    • dosage de l’activité cofacteur du vWF (vWF:RCo) ;
    • taux antigénique (vWF:Ag) ;
    • dosage du FVIII (VIII:C).


Ces analyses permettent de caractériser le type de déficit présenté par le malade : quantitatif (type 1 : le plus courant [vWF:RCo abaissé, < 50 %, dans les mêmes proportions que le vWF:Ag et le VIII:C], type 3 : très rare homozygote avec des taux de vWF < 1 %) ou qualitatif (type 2) [vWF:RCo plus bas que le vWF:Ag et le VIII:C]. La caractérisation phénotypique permet, dans une étape ultime, d’identifier les sous-types rares, mais repose sur des tests très spécialisés

Enfin, dans certains cas, le déficit en vWF est acquis et non constitutionnel.

Les modalités de traitement de la maladie de Willebrand constitutionnelle sont les suivantes :

  • contre-indication de médicaments antiplaquettaires ou anticoagulants, sauf avis spécialisé ;
  • pas d’injection intramusculaire ;
  • pas de chirurgie ni de geste invasif sans traitement approprié ;
  • administration de desmopressine (DDAVP) en première intention dans le déficit de type 1 par voie intraveineuse ou intranasale ;
  • chez les « bons répondeurs » au DDAVP : augmentation très rapide (30 minutes) des taux du vWF (×3 à ×6). La réponse de chaque malade à ce médicament doit être systématiquement évaluée (épreuve thérapeutique). L’administration de desmopressine peut être répétée 12 ou 24 heures après une première injection, mais avec une efficacité moindre. L’effet s’épuise en général au bout de trois injections (tachyphylaxie). Une restriction hydrique est essentielle pour prévenir la survenue d’une hyponatrémie ;
  • administration de concentrés de vWF purifié, par voie intraveineuse, indiquée dans tous les cas où la desmopressine n’est pas efficace ou insuffisante.


Maladie de Willebrand acquise

Elle peut être évoquée chez le sujet âgé et en l’absence d’antécédents familiaux.

Il convient de rechercher systématiquement :

  • une hypothyroïdie ;
  • une cardiopathie valvulaire (par exemple, un rétrécissement aortique) ;
  • une dysprotéinémie monoclonale, plus souvent de type IgM ;
  • une thrombocytémie essentielle ;
  • un autoanticorps souvent difficile à mettre en évidence.

3 . 3  -  Saignements secondaires à une anomalie vasculaire

Ils doivent être distingués des maladies de l’hémostase primaire.

Cliniquement : hémorragies cutanéomuqueuses associées à une numération des plaquettes et à des tests fonctionnels plaquettaires normaux. Le TS, s’il est pratiqué, est classiquement non allongé. Les anomalies vasculaires peuvent être :

  • secondaires, avec un purpura souvent infiltré, contrairement au purpura thrombopénique.
    • Chez l’enfant : purpura rhumatoïde (item 330).
    • Chez l’adulte : purpura vasculaire d’origine immunologique (dysprotéinémie monoclonale), infectieuse ou métabolique (diabète) [item 330].
  • primitives, dues à :
    • une maladie de Rendu-Osler ou télangiectasie hémorragique héréditaire, de transmission autosomale dominante. Épistaxis, hémorragies digestives et télangiectasies au niveau des doigts, du nez, des lèvres et de la bouche ;
    • un syndrome d’Ehler-Danlos, affection génétique rarissime du tissu élastique.
3/8