7  -  Conduite à tenir devant une élévation des transaminases

Il n’y a pas de signe physique ou fonctionnel (en dehors parfois d’une asthénie) attaché à la une élévation chronique et modérée des transaminases. Il existe de nombreuses causes d’élévation modérée des transaminases. Les plus fréquentes sont la consommation excessive chronique d’alcool, le diabète, l’obésité, la prise de médicaments hépatotoxiques, une hépatite virale chronique, une hémochromatose. Un dosage des transaminases est demandé à chaque fois qu’une de ces causes est présente et/ou devant une asthénie.

7 . 1  -  Élévation des transaminases supérieure à dix fois la normale

Cette situation peu fréquente correspond à la démarche diagnostique d’une hépatite aiguë (tableau 4.I). L’interrogatoire cherche une prise médicamenteuse (ex : paracétamol) ou l’exposition à un toxique, des facteurs de risques de contage viral (voyage en zone d’endémie, toxicomanie intraveineuse, relation sexuelle non protégée).  Tout médicament suspect devra être arrêté. La migration lithiasique est suspectée devant des douleurs de type biliaire, un ictère et, en cas d’angiocholite, une fièvre. Des formes sans fièvre ni ictère peuvent rendre difficile ce diagnostic.

Les signes biologiques d’accompagnement (insuffisance hépatique avec baisse du taux de prothrombine) et la cinétique d’évolution ont une valeur pronostique primordiale pour diagnostiquer rapidement une hépatite à évolution grave, fulminante (cf. hépatite virale).

Les causes plus rares d’élévation aiguë des transaminases sont les suivantes :

– foie cardiaque aigu (après une défaillance cardio-vasculaire) ;
– ischémie hépatique aiguë (état de choc, coup de chaleur, troubles du rythme) ;
– hépatite auto-immune en poussée ;
– stéatose micro-vésiculaire qui peut être d’origine alcoolique ou médicamenteuse ;
– syndrome de Budd-Chiari ;
– maladie de Wilson.

Les marqueurs biologiques d’une éventuelle maladie chronique du foie à révélation aiguë doivent être cherchés (antigène HBs, anticorps anti-tissus, bilan du cuivre).

Une échographie cardiaque même chez un sujet asymptomatique peut permettre d’éliminer une  insuffisance cardiaque responsable d’un foie de choc. Une échographie doppler permettra de préciser rapidement la perméabilité des vaisseaux hépatiques.

1. Hépatites virales aiguës (cf. 1re partie)

2. Hépatite médicamenteuse

En cas de maladie aiguë du foie, il faut toujours envisager une cause médica menteuse. Les médicaments métabolisés par le foie, ou leurs métabolites intermédiaires, peuvent être à l’origine de lésions hépatiques. L’induction enzymatique est une augmentation de la synthèse et de l’activité des enzymes de l’hépatocyte (en particulier les cytochromes P450) sous l’effet d’une influence extérieure comme l’exposition à des substances chimiques nombreuses, médicamenteuses ou alimentaires. L’alcool, les barbituriques, en particulier le phénobarbital, et la rifampicine sont des inducteurs enzymatiques.

Le diagnostic d’hépatite médicamenteuse repose sur une enquête très précise sur les médicaments ingérés (même à une seule reprise), leur posologie, leur composition et la chronologie des faits par rapport aux anomalies cliniques et biologiques constatées.

Il existe 3 types cliniques et biologiques d’hépatites médicamenteuses aiguës :

– l’hépatite cholestatique, d’évolution habituellement favorable, quelle que soit la durée de la cholestase ;
– l’hépatite cytolytique, dont le tableau est voisin de celui d’une hépatite virale ;
– les hépatites mixtes qui sont les plus fréquentes.
Certaines hépatites médicamenteuses sont prévisibles car la toxicité est directe :
– un grand nombre de sujets prenant le médicament sont atteints ;
– il existe une relation entre la dose et la toxicité ;
– l’hépatite est reproductible chez l’animal.
Certaines hépatites médicamenteuses sont imprévisibles :
– seul un petit nombre de sujets prenant le médicament est atteint ;
– il n’y a pas de relation entre la dose et l’effet ;
– l’hépatite n’est pas reproductible chez l’animal.
La toxicité imprévisible peut correspondre :
– à un mécanisme immuno-allergique dirigé contre les métabolites hépatiques du médicament ;
– à une mutation génétique individuelle induisant ou accélérant la production de métabolites directement toxiques ;
– ou aux deux mécanismes à la fois.


Le paracétamol est un produit dont la toxicité est prévisible. Le paracétamol peut être transformé en métabolite toxique par le même cytochrome P450 que l’éthanol (avec lequel il entre alors en compétition). Ce cytochrome P450 est induit par la prise chronique d’alcool. De ce fait, la toxicité du paracétamol est augmentée chez l’alcoolique chronique, tout particulièrement dans les jours qui suivent une forte réduction ou un arrêt de la consommation d’alcool. Le jeûne augmente également la toxicité du paracétamol par deux mécanismes :

– la déplétion en glutathion hépatique (qui détoxifie normalement les métabolites toxiques du paracétamol) ;
– l’induction des voies produisant le métabolite toxique.

La dose thérapeutique de 3 grammes par jour chez un adulte (70 mg/kg/j) ne doit pas être dépassée. À forte dose (parfois prise à visée suicidaire), ce produit est responsable d’hépatite cytolytique, parfois associée à une insuffisance rénale aiguë. En cas d’hépatite sévère, le traitement consiste en l’administration intraveineuse ou orale de N-acétylcystéine en urgence. Le transfert en unité spécialisée est indispensable.

En cas d’hépatite médicamenteuse, il faut :

arrêter le médicament en cause ;
– déclarer le cas au centre de pharmacovigilance ;
– remettre au patient une attestation écrite de l’hépatite médicamenteuse ;
– lui remettre la liste de tous les médicaments proscrits car contenant le produit responsable ;
– lui remettre une ordonnance pour un produit de substitution n’appartenant pas à la même famille chimique et donc peu susceptible de réaction croisée.

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