8  -  Particularités des traumatismes maxillofaciaux de l'enfant et du sujet âgé

8 . 1  -  Chez l'enfant – Item 237

L'enfant n'est pas un adulte de taille réduite. Il présente en effet un certain nombre de particularités physiologiques et anatomiques qui expliquent les caractéristiques des fractures survenant à cet âge et qui doivent être prises en compte lors du traitement.

L'enfant est en phase de croissance

Ses os sont plus plastiques que ceux de l'adulte. Ceci explique le caractère souvent moins déplacé des fractures et la fréquence des fractures en bois vert (fig. 4.55).

Figure 4.55 Fractures de l'enfant
Figure 4.55 Fractures de l'enfant


Ce potentiel de croissance explique également que l'enfant est capable de processus de remodelage voire de régénération qui n'existent plus ou de manière beaucoup moins marquée chez l'adulte. Cette caractéristique est particulièrement nette dans les fractures de la région condylienne dont le traitement, chez l'enfant, fait quasi exclusivement appel aux traitements fonctionnels avec de bons résultats fonctionnels et anatomiques.

La croissance du massif facial est essentiellement secondaire, adaptative, liée à l'existence de fonctions :

  • fonction musculaire, plus particulièrement des muscles masticateurs et de la langue : le rétablissement rapide de ces fonctions musculaires à l'issue d'un traumatisme est fondamental pour la poursuite d'une croissance faciale harmonieuse ;
  • fonction articulaire : la mobilité mandibulaire est primordiale pour la croissance mandibulaire et, au-delà, pour la croissance de l'ensemble de la croissance faciale. En cas d'ankylose d'une ou des deux articulations temporomandibulaires, il se produit constamment un déficit parfois très sévère de la croissance mandibulaire du côté atteint aboutissant à des asymétries faciales (ankylose unilatérale) ou à des micromandibulies (cf. fig. 4.35) (ankylose bilatérale) ;
  • fonction dentaire : le rétablissement d'un articulé dentaire correct, véritable guide de croissance pour la mandibule et les maxillaires, est important ;
  • fonction ventilatoire : la ventilation nasale est fondamentale pour le développement des fosses nasales et, au-delà, la croissance des sinus maxillaires et des maxillaires eux-mêmes. De même, la croissance de la pyramide nasale (et, au-delà, des maxillaires) est étroitement dépendante de la croissance de la cloison nasale, notamment de la cloison osseuse (vomer et lame perpendiculaire de l'ethmoïde) ; en cas de traumatisme nasal fracturant ou déplaçant cette cloison, la croissance nasale et maxillaire peut être sévèrement perturbée.

L'enfant est en phase de constitution de sa denture

La denture est exclusivement lactéale jusqu’à l’âge de six ans, mixte jusqu’à l’âge de douze ans puis définitive, à l'exclusion des dents de sagesse (troisièmes molaires) qui ne font leur éruption que vers l’âge de dix-huit ans. Il faut donc tenir compte de la présence de germes de dents définitives dans la mandibule et le maxillaire jusqu’à l’âge de douze ans.

Ceci a des implications pratiques lorsqu'il s'agit de mettre en place d’éventuelles plaques et vis d'ostéosynthèse.
De même les traumatismes dentoalvéolaires, les fractures des portions dentées de la mandibule et les fractures des maxillaires peuvent endommager les germes dentaires et être responsables de troubles de l’éruption des dents définitives (mortification, dents incluses ou retenues, malpositions dentaires, etc.).

Une surveillance dentaire à long terme est donc indispensable lors de la survenue de ce type de fractures.

Épidémiologie

L’épidémiologie des fractures de l'enfant est particulière. Les rixes et les accidents de la voie publique sont moins fréquents chez les enfants. Les causes de traumatismes sont plus fréquemment représentées par les chutes et les accidents domestiques.

Si les études épidémiologiques montrent que fractures sont globalement moins nombreuses chez l'enfant (plasticitéosseuse importante, moins de comportements à risque), certaines fractures sont plus fréquentes comparées à l'adulte ; ce sont notamment les fractures de la région condylienne, plus particulièrement les fractures capitales, le col mandibulaire n’étant pas encore totalement constitué.

Diagnostic

Le diagnostic de fractures du massif facial est plus difficile chez l'enfant. Cette difficulté diagnostique s'explique par le caractère souvent moins déplacé des fractures, par la présence des germes dentaires au niveau de la mandibule et des maxillaires (artefacts conduisant à des faux négatifs), sur l'attitude souvent pusillanime à cet âge et sur la difficulté de réaliser des examens radiologiques, notamment tomodensitométriques, de bonne qualité (agitation, angoisse).

Principes thérapeutiques

Le traitement des fractures est plus volontiers conservateur, fonctionnel ou orthopédique. Cette attitude peu chirurgicale s'explique par les importantes capacités de remodelage chez l'enfant, n'imposant pas toujours une réduction parfaitement anatomique, par le caractère souvent moins déplacé des fractures, par les obstacles anatomiques particuliers à cet âge (germes dentaires) empêchant la mise en place de plaques d'ostéosynthèse et par les troubles de croissance que peut éventuellement entraîner la présence de matériel d'ostéosynthèse métallique. À ce titre, les matériaux résorbables présentent un avantage certain.

8 . 2  -  Chez le sujet âgé

Il existe fréquemment une édentation partielle ou totale, compensée ou non par des prothèses fixes ou amovibles, dont il faudra tenir compte lors de la prise en charge thérapeutique. Les prothèses amovibles, même fracturées, doivent être conservées et réparées. Elles seront utilisées en per-opératoire pour servir de repère lors de la réduction des fractures perturbant l'occlusion.

Les os de la face sont globalement plus fragiles et, du fait de l’édentation, la mandibule et les maxillaires sont souvent atrophiques (cf. fig. 4.24) et soumis à des contraintes mécaniques proportionnellement plus importantes. De plus, au niveau de la mandibule atrophique, les rapports anatomiques du canal mandibulaire sont modifiés (crestalisation). Les techniques d'ostéosynthèses doivent en tenir compte.

Enfin, l’état général et les antécédents parfois lourds des patients âgés en font des patients à risque, pour lesquels l'indication chirurgicale doit être particulièrement pesée en fonction du rapport bénéfice/risque.

18/20