Avant de commencer…

L’infection urinaire (IU) en pédiatrie est :
- souvent sévère chez le nouveau-né et le nourrisson : pyélonéphrite aiguë (PNA) avec risque septique immédiat et risque ultérieur de cicatrices parenchymateuses ;
- habituellement moins grave chez l’enfant plus âgé : cystite aiguë le plus souvent.

Les signes cliniques sont avant tout :
- généraux (fièvre + troubles hémodynamiques) et algiques en cas de PNA ;
- fonctionnels au niveau du bas appareil urinaire en cas de cystite aiguë.

Le diagnostic d’IU est confirmé par l’ECBU :
- exigeant une technique de recueil parfaite (difficile chez le nourrisson) ;
- leucocyturie ≥ 104/mL (examen direct) + bactériurie ≥ 105 UFC/mL (culture).

La prise en charge d’une PNA comporte :
- une hospitalisation systématique pour les nourrissons âgés de moins de 3 mois, discutable et fonction des données cliniques chez les enfants plus âgés ;
- une échographie initiale systématique de l’appareil urinaire ;
- une antibiothérapie en deux phases successives :
   -- traitement initial parentéral (IM ou IV) en ambulatoire ou en hospitalisation,
   -- relais par voie orale après 2 à 4 jours, selon les données de l’antibiogramme de l’ECBU.

1  -  Pour bien comprendre

1 . 1  -  Préambule


Le terme d’infection urinaire (IU) regroupe des contextes cliniques différents :

  • la pyélonéphrite aiguë (PNA) : IU atteignant le parenchyme rénal, avec de possibles complications ;
  • la cystite aiguë : IU localisée à la vessie, habituellement bénigne.

Le diagnostic d’IU ne peut être affirmé que par l’examen des urines, qui met en évidence des quantités significatives de bactéries et de leucocytes.

Ce qui distingue les IU de l’enfant de celles de l’adulte :

  • la fréquence des reflux vésico-urétéraux (RVU) primitifs ou secondaires ;
  • le risque de bactériémie ou de septicémie avant l’âge de 3 mois ;
  • la stratégie antibiotique excluant toute prescription de traitement minute et de quinolones.

1 . 2  -  Épidémiologie


Les IU sont parmi les infections bactériennes les plus fréquentes en pédiatrie.

Leur prévalence dépend de multiples facteurs, notamment de l’âge et du sexe : elles affectent 1 % des enfants âgés de moins de 2 ans, avec une prédominance masculine durant les premiers mois de vie et une prédominance féminine ensuite.

Chez les nourrissons âgés de moins de 1 an, l’IU est une PNA dans 95 % des cas. Toute fièvre inexpliquée à cet âge doit faire suspecter une IU (prévalence de 10 % parmi les fièvres isolées).

E. coli est le germe en cause dans environ 80 % des IU. Les autres bactéries sont : Proteus mirabilis (10 %), les entérocoques et Klebsiella spp. (plus rares).

L’antibiorésistance croissante de l’ensemble des bactéries responsables d’IU oriente le choix de l’antibiothérapie initiale. Environ 50 % des souches de E. coli sont actuellement résistantes ou intermédiaires à l’amoxicilline et 20 à 30 % au cotrimoxazole. Le pourcentage de souches de E. coli productrices de bêtalactamases à spectre étendu (BLSE) augmente progressivement mais reste inférieur à 10 % en France encore actuellement (2014).

Les recommandations concernant la prise en charge de l’IU chez l’enfant doivent s’adapter à l’évolution des résistances bactériennes et à la validation de nouveaux schémas diagnostiques et thérapeutiques.

PNA et cystite aiguë de l’enfant sont d’origine bactérienne dans l’immense majorité des cas. Il existe toutefois des PNA fongiques chez le nouveau-né et le nourrisson, des cystites virales chez le jeune enfant et des cystites interstitielles chez l’enfant plus âgé.

1 . 3  -  Physiopathologie, rôle du reflux vésico-urétéral

1 . 3 . 1  -  Physiopathologie


La flore digestive normale est habituellement le réservoir des bactéries responsables d’IU. Elle colonise le périnée.

L’urine et l’arbre urinaire sont normalement stériles. La colonisation microbienne se fait par un chemin inverse de l’écoulement normal de l’urine : périnée → urètre → vessie → uretère → bassinet → rein. La PNA correspond à une infection du bassinet (pyélo-) et du parenchyme rénal (-néphrite), traduisant une contamination ascendante, et le terme pyélonéphrite n’est donc pas adapté aux rares infections parenchymateuses hématogènes.

Le mécanisme ascendant est favorisé par l’adhésivité bactérienne à l’épithélium des parois des voies urinaires de certains E. coli (dits uropathogènes) du fait de la présence de pili (adhésines bactériennes ayant une structure microfibrillaire capable de se fixer à des récepteurs glycoprotéiques).

Des facteurs favorisants propres à l’âge sont à considérer :

  • nourrisson (propreté non acquise) : port de couches, immaturité vésicale, prépuce étroit ;
  • enfant (propreté acquise) : troubles mictionnels, vulvite, rétention stercorale, oxyurose, hygiène.

La présence d’une anomalie fonctionnelle (dysfonctionnement vésico-sphinctérien, acquis) ou organique (lésion anatomique, congénitale ou acquise) est également un facteur prédisposant.

1 . 3 . 2  -  Reflux vésico-urétéral (RVU)


On distingue le RVU primitif (malformatif) et le RVU secondaire (fonctionnel).

Le RVU primitif est en rapport avec une anomalie congénitale de la jonction urétéro-vésicale.

Le RVU secondaire est lié à une augmentation de la pression vésicale, habituellement dans le cadre d’un trouble mictionnel le plus souvent mis sur le compte d’une hyperactivité vésicale fonctionnelle (anciennement vessie « instable » ou « immature ») associant fuites urinaires, urgences mictionnelles, dysurie et miction en deux temps. Cette pathologie fonctionnelle est souvent favorisée par la rétention stercorale et/ou par des mauvaises habitudes mictionnelles (acquises lors de l’apprentissage de la propreté). Elle peut avoir pour conséquence un RVU, habituellement de faible grade.

Le reflux en lui-même n’est pas responsable de la colonisation de l’urine vésicale, mais véhicule l’infection vers le haut appareil urinaire, et toute PNA de l’enfant est a priori reliée à un RVU, intermittent ou permanent. Cependant, des PNA peuvent survenir en l’absence de RVU identifiable, probablement en rapport avec des E. coli uropathogènes très adhésifs.

La croissance permet la maturation du fonctionnement vésico-sphinctérien (RVU fonctionnels) et l’allongement du trajet intramural (qui fait office de système antireflux naturel au niveau de la paroi vésicale) de l’uretère (RVU malformatifs), et fait ainsi régresser voire disparaître la plupart des RVU.

Germes des IU : E. coli (80 %), Proteus mirabilis (10 %), entérocoques et Klebsiella.

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