1 . 3  -  Particularités thérapeutiques

1 . 3 . 1  -  Principes généraux


De grands progrès thérapeutiques ont été réalisés au cours des dernières années.

Les objectifs actuels de la cancérologie pédiatrique sont d’augmenter encore les taux de guérison, tout en diminuant le risque de séquelles.

La prise en charge spécifique est discutée en réunion de concertation pluridisciplinaire.

Chaque enfant bénéficie d’un programme personnalisé de soins, élaboré par un centre de référence en cancérologie pédiatrique, et souvent réalisable (au moins en partie) au sein d’hôpitaux de proximité.

L’évolution naturelle de la maladie, les options thérapeutiques possibles et les modalités choisies, ainsi que leurs bénéfices et risques, doivent être présentés avec tact et empathie à l’enfant, en tenant compte de son âge et son niveau de compréhension, et à ses parents.

La participation (fréquente) à un protocole d’essai thérapeutique exige un consentement spécifique écrit.

L’enfant bénéficie d’une prise en charge à 100 %.

Un projet d’accueil individualisé (PAI) permet une scolarité adaptée à l’état de santé de l’enfant.

Un soutien psychologique doit être proposé à l’enfant et à sa famille.

Réunion de concertation pluridisciplinaire. Programme personnalisé de soins.

1 . 3 . 2  -  Modalités thérapeutiques


Généralités

Toute urgence symptomatique doit être traitée en priorité.

Le soulagement de douleurs éventuelles est l’une de ces urgences, et est donc également essentiel dès le début de la prise en charge de l’enfant. Une réévaluation clinique de l’enfant doit être réalisée régulièrement.

Les cancers de l’enfant sont caractérisés par une grande chimiosensibilité.

La mise en place d’un cathéter central est très souvent nécessaire pour la réalisation des traitements.

Un suivi au long cours est indispensable.

Il permet de surveiller l’efficacité du traitement antitumoral (rémission, guérison, rechute) et sa tolérance (toxicité précoce), ainsi que les effets secondaires tardifs de la maladie et des traitements (séquelles).

Spécificités à connaître

  • Le plan de traitement de chaque enfant associe de manière variable :
    • une chimiothérapie néoadjuvante (très fréquemment utilisée) destinée à :
      • réduire le volume tumoral et faciliter (ou rendre possible) un geste chirurgical,
      • diminuer le cas échéant le volume et la dose d’irradiation,
      • agir précocement sur les métastases avérées ou infracliniques ;
    • une chirurgie d’exérèse (lorsqu’elle est indiquée et réalisable) ;
    • des traitements postopératoires adjuvants :
      • chimiothérapie (le plus souvent),
      • radiothérapie : indications encore importantes mais de plus en plus restrictives (risque de séquelles dans un organisme en développement, par exemple neuroendocriniennes en cas d’irradiation cérébrale).
  • Les toxicités précoces de la chimiothérapie comprennent des effets secondaires :
    • hématologiques :
      • neutropénie fébrile (indication à une antibiothérapie à large spectre),
      • anémie, thrombopénie (besoins transfusionnels) ;
    • digestifs et nutritionnels :
      • risque de nausées/vomissements, anorexie,
      • mucite, diarrhée/constipation ;
    • alopécie ;
    • et selon les agents de chimiothérapie :
      • allergie,
      • atteintes des fonctions rénale et hépatique,
      • cystite hématurique avec certains agents alkylants,
      • toxicité neurologique périphérique ou rarement centrale.
  • Les séquelles possibles (effets des traitements, de la maladie, ou conjonction des deux) peuvent nécessiter de nombreux suivis spécialisés :
    • toxicités d’organe :
      • cardiaque (anthracyclines),
      • rénale (dérivés du platine, ifosfamide),
      • pulmonaire (irradiation, busulfan, bléomycine) ;
    • retentissement sur les fonctions :
      • neuropsychologiques (HTIC liée à une tumeur cérébrale, irradiation du SNC, chimiothérapies),
      • auditives (dérivés du platine, irradiation, certaines tumeurs ORL ou du SNC),
      • visuelles (certaines tumeurs du SNC, rétinoblastome),
      • endocrines (tumeur de la région hypothalamo-hypophysaire, irradiation du SNC) ;
    • atteintes fonctionnelles et/ou esthétiques (traitements locaux) ;
    • toxicités sur l’ADN de cellules non tumorales :
      • retentissement sur la fertilité : mesures préventives à proposer avant traitement (cryopréservation de sperme chez l’adolescent pubère) ou, le cas échéant, avant certains traitements intensifs (cryopréservation de tissu gonadique dans un cadre établi ou investigatif),
      • majoration du risque de survenue de cancers secondaires.

Retenir les options thérapeutiques, avec les toxicités précoces et les séquelles.

1 . 3 . 3  -  Spécificités des soins palliatifs en cancérologie pédiatrique


Évaluation des symptômes de la phase palliative

La phase palliative en cancérologie se définit par l’absence de traitement efficace connu en termes de guérison mais correspond en fait à une phase thérapeutique très active où l’enfant reste bien sûr un être vivant, en relation avec ses proches et les soignants. Ainsi, 20 % des enfants atteints de cancers décèdent après un traitement palliatif d’un cancer d’emblée réfractaire ou en rechute.

La phase palliative est souvent longtemps imprévisible dans sa durée et sa symptomatologie. Les décisions de traitements doivent être adaptées à l’évolution des symptômes ainsi qu’au cheminement de l’enfant et sa famille, tout en partageant l’ignorance sur la durée prévisible et les symptômes futurs de la phase palliative.

Les symptômes de la phase palliative doivent être recherchés activement, reconnus et évalués afin de pouvoir offrir les soins optimaux :

  • douleurs (voir chapitre 69) ;
  • dyspnée (voir chapitre 29) par atteinte ORL, médiastinale, pleuropéricardique ou pulmonaire, voire dyspnée d’origine centrale ;
  • signes de localisation neurologique ou comitialité par atteinte parenchymateuse ou leptoméningée ;
  • syndromes compressifs autres (insuffisance rénale aiguë par obstacle, compression des voies biliaires, occlusion intestinale, compression médullaire) ;
  • syndrome hémorragique (hémorragie intralésionnelle et/ou contexte d’envahissement médullaire massif, CIVD) ;
  • anxiété, dépression ;
  • troubles de conscience (voir chapitre 67).

Soins, traitements et accompagnement

La thérapeutique palliative doit toujours être active afin de soulager les symptômes sans toutefois recourir à une obstination déraisonnable. Les indications doivent être posées en mobilisant l’ensemble des partenaires de soins : équipe pluridisciplinaire spécialisée de cancérologie pédiatrique, équipe de pédiatrie de proximité, médecin traitant, intervenants professionnels de santé au domicile.

Comme à chaque étape des soins de l’enfant atteint de cancer, la pratique en équipe pluriprofessionnelle, l’écoute attentive et le maintien de l’alliance thérapeutique avec l’enfant et sa famille sont des conditions essentielles à la menée de soins de qualité.

Le dialogue sur la mort et la préparation au deuil ne doit pas être évité.

Les traitements symptomatiques sont au premier plan :

  • prise en charge de la douleur par les antalgiques de niveau I à III, sans oublier le traitement de la composante nociceptive, les co-antalgiques et les moyens non médicamenteux dont la radiothérapie palliative de zones douloureuses précises ;
  • oxygénothérapie en cas d’hypoxie, éventuelle évacuation d’épanchement compressif (pleural, péricardique ou péritonéal) ;
  • suivi psychologique de l’enfant et sa famille, éventuel recours aux traitements psychotropes ;
  • parfois des traitements plus lourds : dérivation urinaire interne ou externe, dérivation digestive, chirurgie de décompression ou radiothérapie en cas de compression médullaire ;
  • utilité du recours à des traitements sédatifs en fin de vie, dans le but d’apaiser efficacement les symptômes douloureux et d’inconfort.

Le recours à des traitements spécifiques oncologiques peut être justifié en phase palliative, en prenant soin de minimiser le risque d’effets secondaires dans ce contexte. Ils peuvent contribuer efficacement au ralentissement de l’évolution de la maladie et au contrôle des symptômes douloureux et d’inconfort.

Ils peuvent également s’avérer nécessaires pour maintenir l’espoir chez l’enfant et sa famille, ce qui n’est pas contradictoire, avec une information adaptée. Si les critères d’éligibilité l’autorisent, ces traitements spécifiques peuvent parfois s’intégrer dans le cadre de protocoles prospectifs de phase I ou II explorant des nouveaux médicaments, selon le souhait de l’enfant lui-même (tenant compte de son âge et de sa volonté de participation aux décisions mais en vérifiant toujours son assentiment) et selon le souhait de ses parents.

Soins palliatifs = soins actifs sans obstination déraisonnable.

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