8  -  Contraception hormonale chez les femmes à risque

8 . 1  -  Femme diabétique

La contraception de la femme diabétique pose le problème du risque métabolique et vasculaire. Elle est cependant indispensable car les grossesses doivent être impérativement planifiées en raison du risque d’aggravation chez la mère des complications dégénératives du diabète au cours de la grossesse et du risque gravidique et fÅ“tal lié à l’hyperglycémie (cf. chapitre 2 : « Diabète gestationnel »).

1. Contraception non hormonale

Le recours à une contraception non hormonale doit être envisagé chez une femme diabétique avec micro ou macroangiopathie, ou après 15 ans d’évolution d’un diabète de type 1.

La contraception locale peut être suffisante chez une diabétique nullipare ayant des rapports sexuels épisodiques, ou désirant une protection contre les infections sexuellement transmissibles.

Le dispositif intra-utérin est la méthode de choix chez la multipare dont le diabète est bien équilibré, sauf s’il existe des antécédents infectieux pelviens ou de grossesse extra-utérine.

2. Contraception hormonale

Le choix d’une contraception hormonale se pose le plus souvent pour une diabétique, insulinodépendante ou non, nullipare ou multipare, et ne pouvant bénéficier d’un dispositif intra-utérin.

a. Estroprogestatifs

Les restrictions formelles à la contraception estroprogestative chez la diabétique restent :

  • le tabagisme, plus que pour toute autre femme, et cela quel que soit l’âge ;
  • le mauvais équilibre du diabète ;
  • l’hypertension artérielle associée ;
  • le surpoids ;
  • le diabète compliqué, a priori.


La crainte d’un risque vasculaire lié à l’utilisation d’estroprogestatifs doit être prise en considération chez une femme diabétique. Classiquement, les estroprogestatifs chez une diabétique de type 1 sont contre-indiqués après 15 ans de diabète, s’il existe une néphropathie ou une rétinopathie compliquée. La présence, en plus du diabète, de facteurs de risque tels que le tabagisme, le surpoids et/ou une dyslipidémie (en particulier une hypertriglycéridémie) fait souvent préférer, pour la femme diabétique, la contraception par des progestatifs.

b. Progestatifs

L’emploi des microprogestatifs peut être limité par leur mauvaise tolérance gynécologique et par l’absence de sécurité contraceptive en cas d’oubli. C’est la raison pour laquelle l’utilisation des progestatifs dérivés de la 19-norprogestérone (macroprogestatifs) constitue une méthode de contraception de plus en plus utilisée chez la femme diabétique, en particulier après 40 ans, lorsque le stérilet est contre-indiqué.

8 . 2  -  Cas de contraception et dyslipidémie

La pilule estroprogestative a peu d’effet chez les patientes normolipidémiques, mais elle peut augmenter de façon très significative les lipides chez la femme dyslipidémique.

L’utilisation de la pilule doit donc être soigneusement évaluée et réservée aux patientes bien corrigées par la diététique ou les hypolipémiants, chez qui l’augmentation des lipides, secondaire à la pilule, est modérée et chez qui la contraception hormonale n’a pas d’alternative acceptable.

La pilule peut être prescrite jusqu’à 3 g/L de cholestérolémie à condition qu’il n’y ait pas d’autres facteurs de risque de thrombose (tabac) et qu’il y ait prescription suivie d’une diététique adaptée (pauvre en graisses saturées).

La pilule ne doit pas être prescrite en cas d’hypertriglycéridémie supérieure à 2 g/ L, mais il peut y avoir discussion si l’anomalie est corrigée.

La contre-indication est formelle si des facteurs de risque surajoutés se cumulent (tabac, par exemple).

En cas d’hyperlipidémie, il semble préférable d’utiliser les contraceptions les plus faiblement dosées en estrogènes, ou encore les microprogestatifs ou les macroprogestatifs.

8 . 3  -  Risque de contraception et thrombose veineuse

1. Facteurs prédisposants

Certaines anomalies de l’hémostase, associées à un risque de thrombose veineuse, sont bien connues chez les femmes jeunes. Il s’agit soit d’anomalies génétiques (déficit en antithrombine, en protéine S ou C, résistance à la protéine C activée, mutation du facteur V Leiden, etc.), soit d’anomalies acquises tels les anticorps anticoagulants circulants de type lupique.

En dehors de ces anomalies, les antécédents personnels et l’existence d’antécédents familiaux de thrombose veineuse représentent également un facteur de risque ainsi que certaines circonstances favorisantes telles que l’obésité, un acte chirurgical (justifiant l’interruption des estroprogestatifs au moins 1 mois avant), ou l’immobilisation prolongée (alitement, fracture, etc.).

2. Dépistage des femmes à risque

Un interrogatoire orienté doit permettre de sélectionner les patientes dites à risque, en fonction de leurs antécédents personnels et/ou familiaux.

Le type de thrombose, notamment son intensité, les récidives, l’âge de survenue (avant ou après 45 ans), la recherche d’un facteur favorisant et, enfin, l’existence de fausses couches à répétition évoquent la présence d’un anticoagulant circulant anticardiolipine de type lupique. Des antécédents familiaux de thrombose avant 45 ans conduisent à la recherche d’une pathologie thrombophilique prédisposante.

Les examens hématologiques suivants doivent alors être demandés chez les femmes à risque avant la mise sous pilule estroprogestative (RMO) :

  • temps de Quick, temps de céphaline activée, qui permettront la détection d’un anticoagulant circulant ;
  • dosage de l’antithrombine, dosage de la protéine C, dosage de la protéine S, test de résistance à la protéine C activée ;
  • recherche d’une mutation du facteur V (Leiden) et d’une mutation du facteur II (prothrombine).


Chez les femmes qui ont un antécédent familial documenté d’anomalie de l’hémostase, cette anomalie sera recherchée systématiquement avant la prescription de la pilule estroprogestative.

3. Prescription

En cas d’antécédent thromboembolique ou d’anomalie de l’hémostase, l’acétate de chlormadinone (Lutéran®) peut être utilisé ou, éventuellement, l’acétate de cyprotérone (Androcur®) ou le lévonorgestrel (Microval®), après avis d’un spécialiste de l’hémostase.

Les estrogènes sont contre-indiqués. Les estrogènes naturels (E2) par voie cutanée semblent neutres sur l’hémostase. Leur prescription devra être envisagée par un spécialiste de l’hémostase.

8 . 4  -  Femmes hypertendues

L’utilisation de contraceptifs oraux s’accompagne d’une élévation modérée de la pression artérielle. Moins de 5 % des utilisatrices de contraception orale présentent une hypertension artérielle sous estroprogestatifs.

En l’absence de facteur de risque associé, en particulier de tabagisme, il est possible de prescrire un estroprogestatif, faiblement dosé en cas d’antécédent d’hypertension artérielle même gravidique. Celle-ci récidivera chez moins de 10 % des femmes.

Enfin, devant une hypertension artérielle bien contrôlée par un traitement chez une femme de moins de 35 ans et ne fumant pas, la contraception estroprogestative peut être proposée sous couvert d’une surveillance rigoureuse.

8 . 5  -  Autres

Migraines et antécédents de vascularite justifient une contraception adaptée et souvent l’avis d’un spécialiste. Le tabagisme est une contre-indication classique, au-dessus de 20 cigarettes par jour. Pour chaque patiente, le bénéfice de la contraception par rapport au risque vasculaire doit être évalué, en tenant compte de l’âge et du nombre de paquets-année.

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