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Besoins en azote et en acides aminés et sources protéiques alimentaires
⇒ Les besoins en azote et acides aminés
Définitions
Le besoin d’un individu en un nutriment (ici azote ou acide aminé) est la quantité de ce nutriment nécessaire au maintien d’une fonction physiologique satisfaisante. Pour les protéines, on considère que le maintien d’un bilan azoté positif en phase de croissance ou nul chez l’adulte, témoigne d’un besoin satisfait. Sa valeur varie bien sûr selon les individus et leur état physiopathologique (âge, sexe...). L’apport idéal pour un individu est celui qui couvre ses besoins.
Les apports conseillés (Recommended Dietary Allowances ou RDA pour les USA et les ANC pour la France) sont ceux qui permettent la couverture des besoins d’une population donnée. Par définition, ces apports sont supérieurs aux besoins de la majorité (cf. note : (97,5 %)) des individus composant cette population. On considère en effet, tout au moins en ce qui concerne l’azote et les acides aminés, qu’il n’y a pas d’inconvénient à apporter une quantité supérieure aux besoins réels. Les niveaux « officiels » des besoins et apports font l’objet de conférences de consensus régulières entre les grands organismes internationaux (OMS, FAO, etc.). Les chiffres varient donc légèrement au fil des années. En ce qui concerne les protéines, les besoins doivent être envisagés à deux niveaux, d’une part en terme de besoin azoté total, d’autre part en terme d’acides aminés essentiels, la qualité de l’azote amené n’étant pas indifférente.
Les besoins en azote
Ils ont été déterminés en mesurant la quantité minimum d’azote ingéré sous forme de protéines d’oeufs ou de lait (protéine de haute qualité) qui permet de garder un bilan azoté neutre (chez l’adulte). Le chiffre obtenu sur un petit groupe d’individus adultes en bonne santé est en moyenne de 0,6 g de protéines/kg/j. Le coefficient de variation de cette moyenne est de 12,5 %, qui correspond à des apports individuels variant de 0,45 à 0,75 g/kg/j (0,75 g/kg. j correspondant donc à la moyenne + 2 DS). Ce dernier chiffre, arrondi à 0,8 g/kg/j est donc retenu comme l’apport conseillé permettant de couvrir les besoins d’une population normale adulte. Ce besoin est très largement couvert dans les pays développés où les apports sont de l’ordre de 1,2 à 1,5 g/kg/j. Les apports conseillés (et les besoins) sont plus élevés chez le nourrisson (2,2 g/kg/j), décroissent progressivement jusqu’à l’âge adulte (0,8 g/kg/j), augmentent au cours de la grossesse et au cours de la lactation (+ 5 à + 15 g de protéine/j). Lorsque les besoins sont exprimés en valeurs absolues, ils sont à peu près constants pendant la première année de vie ( 10 g/j). Ils restent mal connus chez le sujet âgé probablement peu différents de ceux de l’adulte voire supérieurs (1 à 1,2 g/kg/j).
L’exactitude des bilans azotés est ici un élément essentiel pour apprécier ces besoins puisque la surestimation de la balance conduira à la sous-estimation des besoins. De même une attention particulière doit être apportée au contenu énergétique du régime sous lequel a été déterminé le besoin : un apport énergétique excédentaire résultera en une déposition protéique (ce qui correspond à l’augmentation de la masse maigre au cours de l’obésité) et résultera en une sous-estimation des besoins.
Les besoins en acides aminés
Ils sont déterminés par la méthode suivante : des sujets reçoivent une alimentation parfaitement équilibrée contenant tous les nutriments et tous les acides aminés en quantité suffisante à l’exception de l’acide aminé dont on veut mesurer le besoin. En l’absence de cet acide aminé, le bilan azoté est négatif ce qui illustre le fait que l’absence d’un seul acide aminé suffit à ralentir la synthèse protéique (notion d’acide aminé limitant). L’apport en cet acide aminé est alors progressivement augmenté : lorsque le bilan azoté se positive, le besoin est alors couvert.
Là encore, la qualité des résultats obtenus dépend de l’exactitude du bilan azoté. Les résultats obtenus par cette méthode sont actuellement contestés par certains groupes qui ont proposé de mesurer non plus le bilan azoté mais l’oxydation de l’acide aminé par des méthodes isotopiques. Cette oxydation reste minimale tant que les besoins de la synthèse protéique ne sont pas couverts puis augmente régulièrement dès que le besoin est atteint. Les résultats obtenus par cette méthode sont deux à trois fois supérieurs à ceux obtenus classiquement. Pour l’instant, les recommandations alimentaires internationales s’en tiennent aux chiffres obtenus par la méthode classique.
Les besoins de chacun des neuf acides aminés pour l’ensemble des acides aminés essentiels sont, selon l’acide aminé, de 30 à 150 mg/kg/j chez le nourrisson (au total 750 mg/kg/j) et seulement de 5 à 15 mg/kg/j (au total 80 mg/kg/j) chez l’adulte. Ceci correspond aux besoins importants de la synthèse protéique en période de croissance. Les acides aminés essentiels doivent donc représenter chez le nourrisson plus du tiers de l’azote total apporté (ce qui signifie que les protéines alimentaires devront être de haute qualité, cf infra). Chez l’adulte, c’est seulement 10 % de la ration azotée qui devra être composée d’acides aminés essentiels.
Enfin certains acides aminés peuvent être conditionnellement essentiels, ce qui signifie que, à l’occasion d’une circonstance physiopathologique donnée, leur synthèse endogène n’est pas suffisante pour couvrir les besoins. C’est le cas de la cystéine et de la tyrosine qui peuvent normalement être obtenues à partir de la méthionine et de la phénylalanine respectivement. Dans des circonstances telles que la prématurité et l’insuffisance hépatique, ces conversions seront insuffisantes pour couvrir les besoins et un apport exogène devient donc nécessaire. De la même façon, il est probable que les acides aminés du cycle de l’urée (arginine, ornithine et citrulline) deviennent conditionnellement essentiels au cours des insuffisances hépatiques et peut être pour l’arginine en période de croissance rapide. Il faut enfin citer le cas de la taurine, acide aminé libre abondant dans l’organisme mais non incorporé dans les protéines. La taurine est amenée en quantité suffisante par le lait de femme mais pas par le lait de vache et un déficit d’apport en taurine peut résulter en des anomalies de la fonction rétinienne.
Enfin, il faut se souvenir que les critères d’ essentialité sont étroitement fonction de l’état physiologique. Il est très probable que les besoins réels de plusieurs acides aminés au cours des états cataboliques, ou septiques sont différents des besoins décrits ici qui se rapportent uniquement à l’individu normal.
⇒ Les sources protéiques alimentaires
Notion de qualité d’une protéine
Toutes les protéines ne sont pas équivalentes pour remplir les besoins. La qualité (ou valeur nutritionnelle) d’une protéine se définit comme l’efficacité avec laquelle cette protéine satisfait au besoin à la fois en azote et en acides aminés. Le critère le plus classique de qualité est la valeur biologique définit comme suit :
– valeur biologique = fraction de l’azote apporté retenu
par l’organisme/azote absorbé par l’intestin une valeur biologique de 100 est donc une protéine dont l’azote absorbé est efficace à 100 % pour remplacer les pertes azotées endogènes. Un autre critère couramment utilisé est l’utilisation protéique nette :
– utilisation protéique nette = fraction de l’azote retenu/ azote ingéré.
D’autres paramètres tels que le coefficient d’efficacité protéique (CEP) ou le coefficient d’efficacité protéique net (basés sur les gains pondéraux) sont également couramment utilisés. La mesure de ces différents paramètres est plus ou moins facile selon le dosage requis (gain de poids ou dosage d’azote). Surtout, elle dépend du niveau d’apport protéique puisque à niveau d’apport protéique élevé, la proportion d’azote retenu ne sera pas augmentée et la valeur biologique de la protéine sera donc sous-estimée. Enfin la qualité d’une protéine a été volontiers testée chez l’animal de laboratoire, en particulier chez le rat, dont les besoins sont différents de ceux de l’homme.
Cette valeur biologique globale dépend en fait de la structure intrinsèque de la protéine et également de la façon dont les acides aminés constituants sont absorbés par le tube digestif.
a) L’indice chimique :
il est inhérent à une protéine donnée et se définit comme suit :
– indice chimique = mg d’un acide aminé essentiel dans 1 g de protéine/mg du même acide aminé essentiel dans 1 g de protéine de référence.
La protéine de référence la plus courante est l’albumine de l’œuf. Par exemple, si on considère la quantité de lysine contenue dans la farine de blé (35 mg/g de protéine) rapportée à celle contenue dans l’albumine (70 mg/g de protéine) on arrive à un indice chimique pour la lysine et pour la protéine de blé de 50 % (35/70). En théorie, l’indice chimique doit être déterminé pour chaque acide aminé essentiel dans une protéine donnée. En pratique, on se contente d’indiquer l’indice chimique le plus bas parmi ceux des différents acides aminés, cet acide aminé étant appelé acide aminé limitant (en pratique sont concernés, la lysine, les acides aminés soufrés et le tryptophane). L’albumine de l’œuf a été longtemps utilisée comme protéine de référence, mais actuellement la composition de la protéine de référence est déterminée en fonction des besoins propres à chaque situation (nouveau-nés, nourrissons, enfants...).
b) La digestibilité est définie comme la capacité du tube digestif à absorber effectivement l’azote ingéré et se calcule comme suit :
azote ingéré – azote fécal × 100
digestibilité = -------------------------------------------------------------------------------
azote ingéré
La digestibilité « vraie » inclue de plus une correction pour les pertes azotées fécales obligatoires. La digestibilité dépend de la structure de la protéine elle-même mais également des éventuelles modifications que cette structure a pu subir au cours de la préparation des aliments. La modification la plus classique est celle obtenue par la réaction de Maillard. Il s’agit de la liaison d’un sucre réducteur avec le groupe aminé libre de la lysine résultant en un « blocage » de celle-ci. Cette lysine ne pourra donc plus être absorbée et 10 % à 40 % de la lysine ingérée (ce chiffre variant selon le mode de cuisson) seront donc non disponibles, ce qui réduit d’autant la digestibilité de la protéine. Enfin, les interactions avec d’autres nutriments (en particulier les fibres et les polyphénols) peuvent jouer sur la digestibilité d’une protéine.
Au total, la digestibilité est de 95 % à 98 % pour les protéines animales et de 75 % à 95 % pour les protéines végétales.
L’utilisation protéique nette se résume donc au produit de la digestibilité par l’indice chimique : elle est de 40 % environ pour les protéines végétales de type maïs ou mil, 70 % pour les protéines de viande, 87 % pour l’albumine de l’œuf et 95 % pour le lait de femme.
Les sources protéiques alimentaires
Les protéines alimentaires sont classiquement divisées en protéines animales (viande, poisson, laitage et œufs) et en protéines végétales (céréales et légumineuses). La richesse en protéines des aliments varie considérablement (pain 2,7 % ; viande 18 % ; fromage et légumes secs : environ 25 % , exprimée en pourcentage du poids total de l’aliment).
Comme vu plus haut, la qualité de la protéine est également importante à considérer. Classiquement les protéines végétales sont de qualité inférieure aux protéines animales en raison d’une digestibilité plus basse et d’un moindre contenu en acides aminés essentiels, en particulier lysine et acides aminés soufrés. La densité protéique basse et la faible qualité des protéines végétales expliquent très largement l’extrême fréquence des malnutritions protéiques dans les pays en voie de développement en particulier chez l’enfant, très sensible à des apports insuffisants en acides aminés essentiels. Il est cependant tout à fait possible d’obtenir un apport en acides aminés essentiels suffisant avec des protéines végétales en prenant simplement soin de combiner des protéines dont l’acide aminé limitant n’est pas le même (protéines de céréales pauvre en lysine mais normalement riche en acides aminés soufrés et protéines de légumineuses pauvres en acides aminés soufrés mais normalement riches en lysine). Cette « tactique » est volontiers adoptée dans les régimes végétariens.
Le principe de dilution isotopique est le suivant (prenons ici l’exemple de la leucine). On souhaite mesurer le débit de production de la leucine, c’est-à-dire la quantité de leucine arrivant dans le plasma par unité de temps (leucine issue soit de la protéolyse, soit de la prise alimentaire). On introduit dans le plasma un traceur, la leucine marquée (Débit Leu*) à un débit connu et constant (en µmol/kg/min) à l’aide d’un pousse seringue. Lorsque l’état d’équilibre est atteint (stabilité des enrichissements isotopiques mesurés à posteriori), on démontre que le rapport des débits de production de leucine marquée et non marquée est égal au rapport de leurs concentrations respectives, ce qui s’écrit :
Production Leucine/Débit Leu* = Leu/Leu*
ou encore
Production Leucine = Débit Leu*/( Leu*/Leu)
Le débit de traceur étant connu, le rapport [Leu*/Leu] mesuré (spectrométrie de masse), on en déduit le débit de Production de leucine. Cette équation simple n’est valable qu’à l’état stationnaire, c’est-à-dire lorsque ni Leu] ni Leu* ne varient pendant la période de mesure. Dans ces conditions, le débit de production (correspondant à la somme apports exogènes + protéolyse) est égal au débit d’utilisation (soit synthèse protéique + oxydation). En d’autres termes, à l’état stationnaire le pool plasmatique ne variant pas, « ce qui entre est égal à ce qui sort ». Cette contrainte d’obtention d’un état stationnaire est l’une des limites de l’utilisation des traceurs, évidente par exemple au cours de l’étude des repas où la stabilité des concentrations est difficile à obtenir. La nécessité de travailler une fois l’équilibre atteint explique le délai imposé (environ 2 heures pour la leucine) après le début de la perfusion pour obtenir des prélèvements significatifs.
Notes
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(97,5 %) :
Les apports recommandés sont définis comme les apports couvrant les besoins moyens + 2 déviations standards (soit, par définition, 97,5 % de la population) + un supplément variable selon les experts.
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