- Pré-requis et Objectifs
- Cours
L’eau représente 75 % du poids du corps les premières semaines de vie et 60 % à l’âge d’un an. Le nourrisson est très dépendant des apports hydriques du fait de ce contenu en eau élevé et de l’immaturité des fonctions de concentration-dilution des urines. Les besoins hydriques doivent être d’autant plus importants, par kilogramme de poids, que l’enfant est plus jeune.
Il faut être attentif au risque accru de déshydratation lorsque les pertes hydriques sont augmentées : diarrhée, vomissements, fièvre, ou température ambiante élevée.
Les apports hydriques sont couverts initialement par l’alimentation lactée exclusive, puis par l’eau des aliments et des boissons dès le début de la diversification alimentaire.
Les apports hydriques conseillés, exprimés en mL/kg/j, sont à connaître (tableau 50.1).
Âge | Besoins hydriques |
Naissance | 150 mL/kg/j |
< 6 mois | 120 mL/kg/j |
1–2 ans | 100 mL/kg/j |
2–5 ans | 80 mL/kg/j |
> 5 ans | 55 mL/kg/j |
Les besoins énergétiques, exprimés en kilocalories (kcal ; 1 kcal = 4,185 kiloJoules [kJ]), sont d’autant plus élevés que l’enfant est en phase de croissance rapide, notamment au cours des 2 premières années et pendant la puberté. Le poids de naissance double vers 4–5 mois, triple vers un an, et quadruple vers 2,5 ans. Le gain statural est de 25 cm la 1re année, 10 cm la 2e année et 8 cm la 3e année.
L’estimation des besoins énergétiques peut être réalisée par l’analyse des ingesta spontanés d’un groupe d’individus en bonne santé, ou par l’analyse des différentes composantes de la dépense énergétique (DE) totale (dite méthode factorielle).
Les apports énergétiques conseillés sont indiqués dans le tableau 50.2.
Âge | Énergie1 MJ/j | Protéines2 g/j | Fer
mg/j | Vitamine D3 μg/j | Calcium
mg/j |
0–1 mois | 0,385/kg/j | 10,0 | 6–10 | 20–25 | 400–500 |
1–2 mois | 1,6 G 1,5 F | 10,1 | 6–10 | 20–25 | 400 |
2–3 mois | 1,9 G 1,7 F | 9,8 | 6–10 | 20–25 | 400 |
3–4 mois | 2,3 G 2,0 F | 9,1 | 6–10 | 20–25 | 400 |
4–6 mois | 2,4 G 2,1 F | 8,8–9,0 | 6–10 | 20–25 | 400 |
6–12 mois | 2,5 G 2,3 F | 9,4–9,9 | 6–10 | 20–25 | 500 |
1–2 ans | 2,7–4,0* G 2,6–3,8* F | 10,2 | 7 | 10 | 500 |
2–3 ans | 4,5–5,1* G 4,1–4,7* F | 11,7 | 7 | 10 | 500 |
3–4 ans | 4,8–5,4* G 4,5–5,1* F | 7 | 10 | 500 | |
4–5 ans | 5,3–5,9* G 4,9–5,6* F | 15 G 14 F | 7 | 5 | 700 |
5–6 ans | 5,7–6,4* 5,3–6,0* | 16 G 15 F | 7 | 5 | 700 |
6–7 ans | 6,9–7,7* G 6,3–7,1* F | 18 G 17 F | 7 | 5 | 700 |
7–8 ans | 7,3–8,2* G 6,7–7,6* F | 20 G 19 F | 7 | 5 | 900 |
8–9 ans | 7,8–8,8* G 7,2–8,1* F | 22 G 21 F | 7 | 5 | 900 |
9–10 ans | 8,2–9,3* G 7,7–8,6* F | 24 G 25 F | 7 | 5 | 900 |
10–18 ans | 7,3–19,0* G 6,9–14,* F | 27–50$ G 27–43$ F | 10£
13§ G 16§ F | 5 | 1 200 |
La DE de base est la DE mesurée le matin, chez un sujet à jeun depuis 12 heures, éveillé mais au repos, allongé et dans une ambiance proche de la neutralité thermique. Cette notion est souvent remplacée, en particulier pour le jeune enfant chez qui un jeûne prolongé n’est pas possible, par la DE de repos (DER), mesurée dans les mêmes conditions de température et de repos, le plus à distance possible d’un repas. La DER est de l’ordre de 50–70 kcal/kg/j avant 1 an, 40–50 kcal/kg/j de 1 à 10 ans, et 30–40 kcal/kg/j de 10 à 15 ans.
La DE liée à l’activité physique est très variable selon l’âge et le type d’activité physique. Faible avant l’âge de 6 mois (10–20 kcal/kg/j), elle augmente ensuite pour atteindre 25–40 kcal/kg/j jusqu’à 1 an. C’est chez l’adolescent qu’elle est la plus variable : la DE totale peut varier de 2 000 à 3 500 kcal/j chez un garçon de 50 kg selon son activité physique.
La DE de thermorégulation varie en fonction de l’environnement thermique, de l’âge de l’enfant et de sa protection vestimentaire. À titre d’exemple, un nourrisson nu, exposé à une température extérieure qui passe de 32 °C à 28 °C voit sa DE liée à la thermorégulation augmenter de 2–4 kcal/kg/j. L’hyperthermie augmente sa DE de 6–9 kcal/kg/j par degré de température corporelle supplémentaire.
Le coût énergétique de la croissance correspond à l’énergie nécessaire à la synthèse de nouveaux tissus et à l’énergie déposée dans ces tissus sous forme de lipides et de protéines. Le coût énergétique de la croissance est maximal durant les 6 premiers mois de la vie, où il représente 20–25 % des ingesta, avant de diminuer ensuite rapidement. Il est d’environ 5 kcal par gramme de gain pondéral.
Les apports nutritionnels doivent couvrir la dépense énergétique de repos, la thermorégulation, la transformation des nutriments en source d’énergie et l’activité physique. Chez l’enfant et l’adolescent, ils doivent aussi couvrir la croissance. Le coût énergétique de la croissance est maximal durant les 6 premiers mois de la vie où il représente 20 à 25 % des ingesta, avant de diminuer ensuite rapidement.
Apports conseillés en protéines
Les protéines constituent la source d’azote de l’organisme. Elles apportent les acides aminés que l’organisme ne peut synthétiser, dénommés indispensables, assurent le développement musculaire et squelettique, et la production de protéines fonctionnelles (immunoglobulines, hémoglobine, enzymes). Les protéines ne sont pas destinées à contribuer à la couverture des besoins énergétiques.
Les ANC en protéines sont de l’ordre de 10 g/j jusqu’à l’âge de 2 ans, puis d’environ 1 g/kg/j. Les protéines ne devraient pas contribuer à plus de 15 % des apports énergétiques.
Apports conseillés en lipides
En raison de leur densité calorique de 9 kcal/g, les lipides contribuent beaucoup à la couverture des besoins énergétiques. Les apports lipidiques doivent également assurer les besoins en vitamines liposolubles (A, D, E et K), et en acides gras essentiels (AGE). Les lipides devraient contribuer à 45–50 % des apports énergétiques jusque 2–3 ans et 35–40 % ensuite.
Les AGE sont constitués de 2 acides gras polyinsaturés : l’acide linoléique (C18:2n-6) et l’acide α-linolénique (C18:3n-3). Ce sont les constituants indispensables des membranes cellulaires, en particulier du tissu cérébral. Leur carence, très rare dans les pays développés, se manifeste par un retard de croissance staturo-pondéral, des anomalies cutanéophanériennes, des infections à répétition et des perturbations du développement psychomoteur. Les ANC sont pour l’acide linoléique de 2,7 % de l’apport énergétique total (AET) de la naissance à 3 ans et de 4 % de l’AET de 3 à 18 ans, et pour l’acide α-linolénique de 0,45 % de l’AET de la naissance à 3 ans et de 1 % de l’AET de 3 à 18 ans. À partir des AGE se produisent une série d’élongations et de désaturations aboutissant à des acides gras polyinsaturés à longue chaîne (AGPI-LC), principalement l’acide arachidonique (C20:4n-6) pour la série n-6 et l’acide docosahexaénoïque (C22:6 n-3) pour la série n-3. Ces AGPI-LC (présents dans le lait maternel) jouent un rôle très important dans le développement du système nerveux central et de la rétine, ainsi que dans l’immunité et le contrôle de l’inflammation.
Apports conseillés en glucides
Les glucides ont essentiellement un rôle d’apport calorique. Leur source principale pendant les premiers mois d’alimentation lactée exclusive est le lactose (glucose + galactose). Les glucides devraient contribuer à 50–60 % des apports énergétiques.
Les besoins en fer sont importants à couvrir chez le nourrisson, en raison du rôle essentiel du fer dans la synthèse de l’hémoglobine et comme cofacteur de croissance. Le déficit en fer est d’ailleurs le plus fréquent des déficits nutritionnels dans les pays industrialisés.
Quel que soit l’âge, l’absorption intestinale du fer est basse, de l’ordre de 10 % environ, ce qui explique que les ANC atteignent 6–7 mg/j jusqu’à 10 ans pour couvrir des besoins de 1–2 mg/j (tableau 50.2). Le fer héminique (viande, poisson) est mieux absorbé que le fer non héminique (lait, végétaux, œuf). La teneur en fer du lait de vache est très faible, ce qui le rend inadapté à l’alimentation du nourrisson.
Les ANC en fer sont également élevés au moment de la puberté, en particulier pour les filles en raison des pertes menstruelles.
Les ANC en calcium, qui est essentiel pour une minéralisation optimale du squelette, doivent tenir compte du coefficient d’absorption intestinale (fonction de la biodisponibilité du calcium des aliments) et de l’apport en vitamine D.
La puberté est une période clé dans la minéralisation du squelette, où les besoins calciques sont particulièrement élevés (tableau 50.2).
Apports conseillés en vitamine D
La vitamine D joue un rôle essentiel pour l’absorption intestinale du calcium, la minéralisation osseuse et la prévention du rachitisme. Les ANC en vitamine D sont indiqués dans le tableau 50.2. Les réserves en vitamine D du nouveau-né dépendent étroitement de celles de sa mère, et sont le plus souvent basses en Europe.
Le lait maternel contient peu de vitamine D (25–70 UI/L), les préparations lactées sont enrichies en vitamine D mais insuffisamment.
La prévention du déficit en vitamine D repose sur :
Apports conseillés en vitamine KLa vitamine K joue un rôle essentiel dans la synthèse des facteurs de coagulation, en particulier en période néonatale. Les ANC en vitamine K sont de 5–10 μg/j jusqu’à 2 ans.
Afin de prévenir la maladie hémorragique du nouveau-né, il est recommandé de donner 2 mg de vitamine K per os à la naissance et au 3e jour de vie.
Pour tenir compte de la faible teneur en vitamine K du lait maternel, une supplémentation de 2 mg per os par semaine est recommandée pendant la durée de l’allaitement exclusif.
Points clés sur le déficit en vitamine D ou rachitisme
Connaître pour la pratique médicale :
- les besoins hydriques en fonction de l’âge (prescription d’une réhydratation IV) ;
- les recommandations de supplémentation en vitamine D :
-- quotidienne jusqu’à l’âge de 18 mois, quel que soit le mode d’alimentation,
-- puis automno-hivernale jusqu’à l’âge de 5 ans et après 10 ans ;
- la nécessité de supplémentation en vitamine K hebdomadaire en cas d’allaitement exclusif.