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Les candidoses cutanées sont très fréquentes. Certaines professions (cuisinier et autres métiers de la restauration, travaux de ménage) exposent à des lésions des mains à type d’intertrigo (atteinte des plis). L’intertrigo des pieds à Candida est plus rare, favorisé par un climat chaud, le port de chaussures en caoutchouc ou en plastique.
L’aspect clinique d’un intertrigo à Candida est évocateur : il s’agit d’un érythème suintant, lisse, avec sensation de cuisson, parfois douloureux, débutant au fond du pli puis qui s’étend. Les bords sont irréguliers, avec des papules ou pustules satellites d’aspect « émietté ». Le fond du pli est parfois recouvert d’un enduit blanchâtre. L’intertrigo, volontiers symétrique, peut siéger au niveau des plis inguinaux, interfessiers, sous-mammaires et axillaires.
La candidose anale se traduit par un prurit intense avec sensation de brûlure et un érythème suintant, l’extension pouvant se faire vers les plis. Chez les très jeunes enfants, l’atteinte à point de départ péri-anal s’installe volontiers sur une dermatite préexistante (dermatite fessière du nourrisson). L’extension se fait aux fesses et aux aires génitales (figures 28.1 et 28.2).
Les onychomycoses à Candida spp. siègent plus fréquemment au niveau des mains qu’aux pieds (figure 28.3). Les femmes sont plus fréquemment atteintes car plus souvent exposées aux principaux facteurs de risque locaux que sont les contacts prolongés et répétés avec l’eau et les produits d’entretien, le port de gants de protection, les microtraumatismes et les abus de soins de manucure. La contamination résulte d’une auto-inoculation à partir d’un foyer digestif ou génital et C. albicans est l’espèce la plus souvent incriminée. Classiquement, l’onychomycose à Candida débute par une atteinte des tissus péri-unguéaux (périonyxis). Elle se traduit par une tuméfaction tendue, érythémateuse parfois, douloureuse, entourant la tablette unguéale. La pression de l’œdème fait sourdre une sérosité, voire du pus. L’atteinte de l’ongle est secondaire par invasion du bord proximal, puis du bord libre avec un décollement de la tablette unguéale pouvant intéresser toute l’épaisseur de l’ongle. L’évolution peut aboutir à une onycholyse totale.
Des levures du genre Candida sont isolées des muqueuses buccales chez les individus sains. Les pics de prévalence sont observés chez l’enfant de moins de 18 mois et le sujet âgé. Dans le premier cas interviendrait une immaturité du système immunitaire, dans le second la fréquence du port de prothèses dentaires. De nombreux facteurs favorisent la survenue d’une candidose oropharyngée. Ainsi, toute altération de la muqueuse buccale peut constituer le lit d’une candidose : traumatisme consécutif au port d’une prothèse, cancer de la sphère ORL, ulcérations dues à des cytotoxiques, irradiations… Les facteurs iatrogènes peuvent être locaux (corticoïdes inhalés) ou généraux (antibiotiques à large spectre, immunosuppresseurs, corticoïdes, neuroleptiques). L’hyposialie représente l’une des principales causes du développement des candidoses buccales. Parmi les autres terrains favorisants, il faut citer l’infection par le VIH, les tumeurs solides, les hémopathies malignes, le diabète ou d’autres endocrinopathies, ainsi que la malnutrition. Il existe trois formes cliniques de candidoses oropharyngées : pseudomembraneuse, érythémateuse atrophique et hyperplasique.
La forme pseudomembraneuse, ou « muguet », est la plus classique (figure 28.4). Elle débute par un érythème de la muqueuse. En quelques jours apparaissent des lésions blanchâtres, fermes, qui vont confluer, donnant des membranes de couleur blanc jaunâtre sur une muqueuse inflammatoire. Plus ou moins envahissantes, adhérentes aux muqueuses, elles peuvent intéresser toute la muqueuse buccale et envahir le pharynx et l’œsophage chez l’immunodéprimé. Les signes fonctionnels sont une sécheresse, une sensation de goût métallique et de cuisson de la bouche. L’importance des signes fonctionnels chez le sidéen peut conduire à une dysphagie majorant la dénutrition. Il existe aussi des candidoses buccales érythémateuses pures, aussi fréquentes que le muguet.
La forme érythémateuse atrophique est une complication observée chez les patients infectés par le VIH et les porteurs de prothèse dentaire. Les lésions sont alors multifocales, notamment sur le palais et le dos de la langue. La muqueuse est érythémateuse, luisante et la langue dépapillée.
Dans la candidose hyperplasique, ou pseudotumorale, il existe des plaques bourgeonnantes, hyperkératosiques, voire papillomateuses, qui siègent au niveau de la langue ou de la muqueuse jugale. Les plaques sont adhérentes, difficilement détachables. Cette forme s’observe plus volontiers chez les fumeurs et il existerait un risque de transformation maligne de ce type de lésion. Les langues noires villeuses avec hypertrophie de l’extrémité des papilles (villosités) qui prennent une couleur noire ne sont pas des candidoses, elles sont la plupart du temps d’origine iatrogène et ne font pas appel à un traitement antifongique.
La perlèche accompagne volontiers les candidoses oropharyngées. Elle correspond à une inflammation de la commissure labiale et réalise une fissure humide, érythémateuse, squameuse ou croûteuse souvent bilatérale.
La candidose vulvovaginale est l’une de plus fréquentes infections gynécologiques de la femme en période d’activité génitale. Elle est le plus souvent due à C. albicans (80 %) et à C. glabrata (20 %). Les candidoses vulvovaginales sont hormonodépendantes et surviennent dans la seconde partie du cycle menstruel et pendant la grossesse (troisième trimestre). Après la ménopause, la prévalence décroît. La prise d’antibiotiques à large spectre et le diabète mal contrôlé sont des facteurs favorisants.
Les symptômes majeurs de la candidose vulvovaginale sont un prurit et des brûlures vulvaires. Les leucorrhées sont d’abondance variable, classiquement blanchâtres, grumeleuses « en lait caillé » (figure 28.5). Une dysurie et une dyspareunie sont souvent signalées. L’examen gynécologique peut retrouver un érythème et un œdème de la vulve, parfois des fissures ou des excoriations. La diffusion de l’érythème à l’aine et aux plis interfessiers est en faveur de l’étiologie candidosique. Dans 90 % des cas, la candidose vulvovaginale est simple et d’évolution favorable. Dans 10 % des cas, la candidose vulvovaginale est compliquée, sévère et récidivante, définie par quatre épisodes à cultures positives sur une période de 12 mois. La candidose vaginale récidivante peut être la première manifestation clinique de l’infection à VIH chez une femme séropositive.
Chez l’homme, la candidose génitale se manifeste par une balanite (figure 28.6). Le début se fait dans le sillon balanopréputial par un érythème qui intéresse le gland et le prépuce. De petites vésicules sont présentes à sa surface, ainsi que des papules avec, souvent, des plaques blanchâtres. L’éruption peut s’étendre au pénis, au scrotum et à l’aine chez l’obèse. Les formes sévères doivent faire rechercher un diabète.
Les candidoses vulvovaginales ne sont pas considérées comme des infections sexuellement transmissibles (IST).
La présence de levures dans les selles signe rarement une candidose digestive étant donné le caractère commensal de Candida dans le tube digestif. Néanmoins, il existe de réelles candidoses digestives, dont la localisation la plus commune est l’œsophage. Les Candida spp. représentent la première cause d’œsophagite et C. albicans, là encore, est la principale espèce incriminée. Les facteurs de risque sont pratiquement les mêmes que ceux retrouvés dans les localisations oropharyngées. L’œsophagite à Candida est un marqueur de l’infection à VIH. Elle survient lorsque les CD4 sont inférieurs à 150/mm3. Elle est souvent associée à une candidose orale et peut être la première manifestation clinique du sida. Les manifestations de cette localisation sont dominées par la dysphagie et les douleurs rétrosternales. Le diagnostic repose sur l’endoscopie dont l’aspect le plus évocateur est celui de plaques de couleur blanc jaunâtre reposant sur une muqueuse érythémateuse plus ou moins ulcérée.
La candidose cutanéomuqueuse chronique (CCMC) est une affection rare qui touche le plus souvent les jeunes enfants avec une atteinte à C. albicans persistante ou récidivante de la peau, des ongles et des muqueuses. Les lésions unguéales et cutanées peuvent prendre un aspect croûteux, hyperkératosique. Il existe un trouble de l’immunité cellulaire préexistant.
La candidémie est une candidose systémique définie par la présence d’un Candida dans au moins une hémoculture — une seule suffit. Une candidose disséminée correspond à une situation où une levure a été identifiée dans au moins deux sites non contigus, impliquant une dissémination hématogène, bien que les hémocultures soient parfois restées négatives. D’autres termes peuvent être utilisés comme « candidose profonde » ou « candidose invasive ». Leur traitement est identique, mais peut être modulé en fonction des sites anatomiques infectés. Il n’existe pas de symptomatologie spécifique des fongémies et des infections systémiques à Candida spp. Une fièvre persistante sous antibiotiques et accompagnée d’une altération de l’état général est observée dans environ 80 % des cas et une leucocytose dans 50 %. Les candidémies rapidement dépistées peuvent répondre aux antifongiques et au retrait d’un cathéter. Lorsque le dépistage de la candidémie a été tardif ou que l’épisode initial est passé inaperçu, il existe un risque important de localisations uni- ou multiviscérales, qui peuvent apparaître au premier plan des semaines après le premier épisode. Malgré une meilleure prise en charge des candidémies et des candidoses systémiques et l’apparition de nouveaux antifongiques, la mortalité reste élevée (plus de 40 %). C. albicans reste la levure prédominante, dans plus de 50 % des cas.
Les candidoses systémiques se manifestent aussi par des manifestations cutanées qui résultent de la dissémination hématogène, prenant l’aspect de papulo-pustules uniques ou multiples et siégeant préférentiellement au tronc et aux extrémités. De même, des manifestations oculaires sont à rechercher systématiquement en cas de candidémies. L’aspect typique réalisé au fond d’œil est celui de nodules rétiniens blanchâtres ou jaunâtres et duveteux. Chez les toxicomanes par voie intraveineuse, on décrit des folliculites douloureuses de la barbe et du cuir chevelu.
Enfin, d’autres localisations de candidoses disséminées, plus rares, peuvent exister, comme des localisations cardiaques (endocardites avec végétations visibles à l’échographie), ostéoarticulaires (spondylodiscites) ou neurologiques.
La candidose systémique peut être associée aux soins. Le Candida est issu habituellement de la flore commensale du patient, d’origine digestive le plus souvent, parfois cutanée (cathéter veineux central…).
Cette forme particulière de candidose systémique évolue sur le mode chronique et s’observe essentiellement chez des patients ayant une leucémie aiguë dans les suites d’un épisode de neutropénie liée à la chimiothérapie. Elle est due à la reconstitution du nombre et de la fonction des neutrophiles, ce qui la classe parmi les syndromes de restauration immunitaire (IRIS). Elle associe une fièvre résistant aux antibactériens et aux antifongiques, une hépato- et/ou splénomégalie et des douleurs abdominales, qui doivent conduire à pratiquer une échographie, un scanner et, surtout, une IRM qui montre des micronodules intraparenchymateux (figure 28.7). Le diagnostic repose essentiellement sur l’imagerie et la recherche d’anticorps et d’antigènes spécifiques, la biopsie étant peu contributive et les hémocultures souvent négatives.