2  -  Prise en charge systèmatique en salle de naissance et dépistage des principales malformations

Dès la naissance, il convient d'évaluer l'état de l'enfant afin de mettre éventuellement rapidement en route les manœuvres de réanimation. En pratique, cette évaluation se fait par le coefficient d’APGAR, qui permet de juger de façon instantanée l’état du nouveau-né et guide la conduite à tenir.

Les gestes suivant sont systématiquement réalisés :

  • Placer l'enfant sur une table chauffante.
  • Aspirer bouche, pharynx, narines

Si on a la notion d'inhalation de liquide amniotique méconial, il faut aspirer directement en trachéal sous laryngoscope ou après intubation avant de débuter la ventilation.

  • Préciser rapidement, les rythmes cardiaque et respiratoire, la qualité du cri, la couleur du bébé et les réponses à la stimulation cutanée.

2 . 1  -  Cotation du score d’Apgar

Le test d’Apgar a été mis au point en Angleterre par le docteur Virginie APGAR en 1952 à qui elle a donné son nom. Il est aujourd’hui universellement utilisé pour évaluer l’état de santé du nouveau né dès les premiers instants de sa vie.
Ces cinq critères cotés de 0 à 2 permettent de déterminer le score d'Apgar : il est pratiqué à 1, 3, 5 et 10 minutes de vie.

Cette évaluation permet de guider la conduite à tenir vis-à-vis du nouveau-né :

  • Si > à 8 à 1' : bonne adaptation à la vie extra-utérine.
  • Si < à 3 à 1' : état de mort apparente impliquant une réanimation en urgence. (idem si < 5 à 5')
  • Un chiffre intermédiaire, témoin d'une hypoxie-anoxie, justifie une prise en charge adaptée.
Figure 2 : Le score d'Apgar

La cotation est systématiquement pratiquée au bout d'une minute et au bout de 5 minutes de vie. Dans certains cas, pour juger de l'évolution de la situation de l'enfant, elle est refaite à dix minutes de vie, puis éventuellement toutes les dix minutes.


L’ILCOR 2005 définit le nouveau-né normal lorsque la réponse est « oui » aux quatre questions suivantes [International Liaison Committee on Resuscitation (ILCOR) 2005] :

  • Est-ce que le nouveau-né est à terme ?
  • Est-ce que le liquide amniotique est clair et sans infection potentielle ?
  • Est-ce que le nouveau-né respire ou crie ?
  • Est-ce que le nouveau-né a un bon tonus ?


Lorsque les quatre réponses sont « oui », le bébé est considéré comme normal. A partir de cette constatation, il est précisé : « Le nouveau-né n’a pas besoin de réanimation (prise en charge) et ne doit pas être séparé de sa mère. Le nouveau-né peut être séché, placé directement sur la poitrine de la mère, couvert avec un tissu pour maintenir la température.
L’observation de la respiration, de ses mouvements et de sa couleur doit être continuée
»
[International Liaison Committee on Resuscitation (ILCOR) 2005].

2 . 2  -  Vérification de la perméabilité des choanes, de l’œsophage et de l’anus

On s'assure par des gestes simples de la perméabilité des orifices naturels :

  • une petite sonde n°4 ou 6 introduite par chacune des deux narines, et progressant sans obstacle jusqu'au pharynx, vérifie la perméabilité des choanes ;
  • une sonde gastrique n°6 ou 8 introduite par le nez ou la bouche et progressant sans obstacle jusqu'à l'estomac, soit respectivement : distance nez-ombilic ou bouche-ombilic, atteste de l'absence d'atrésie de l'œsophage (la position intragastrique de l'extrémité de la sonde est vérifiée par le test dit de la seringue : on perçoit au stéthoscope, placé sur l'épigastre, l'irruption de l'air injecté à l'aide d'une petite seringue branchée sur la sonde gastrique) ;
  • la mise en place d'un thermomètre rectal vérifie la perméabilité normale de l'anus, en même temps qu'elle s’assure que la température rectale du nouveau-né ne s'est pas abaissée au dessous de 36°C en fin d'examen : une température plus basse justifie la mise en incubateur.
  • Glycémie éventuelle (dextrostix) - risque majoré chez le prématuré, l'hypotrophie, l'enfant de mère diabétique.
  • Examen appareil par appareil (voir suite du cours).
  • Systématiquement :
    • collyre oculaire (prévention conjonctivite à gonocoque), (voir suite du cours)
    • administration de vitamine K (5 mg) (prévention de la maladie hémorragique du nouveau-né).


Tous ces gestes doivent être effectués avec le maximum d'asepsie.

Tout nouveau né bénéficie dans les dix premières minutes de vie de cinq mesures principales.

1) La vérification du cordon ombilical

2) La prévention de l'hypothermie

3) La désobstruction bucco-pharyngée
Elle n'est pas toujours pratiquée chez le nouveau-né normal, car il est en règle parfaitement susceptible d'éliminer tout seul, en criant et en déglutissant, le liquide contenu dans ses voies respiratoires supérieures. Si elle est effectuée, l'aspiration des fosses nasales et du pharynx doit être brève (risque d'apnée réflexe) et non traumatisante pour les muqueuses (il ne faut aspirer que lors du retrait de la sonde).

Vidéo 1 : examen de la perméabilité œsophagienne du nouveau-né
P. Rambaud

4) L'établissement d'une bonne relation mère-enfant (voir suite du cours)

5) L'identification de l'enfant
Le nom et le prénom de l'enfant sont inscrits sur deux étiquettes qui sont glissées dans des bracelets en plastique transparent. On fixe ensuite un bracelet à chacun des deux poignets de l'enfant, après avoir fait vérifier par les parents la bonne identification du nouveau né.

2 . 3  -  Les autres éléments de l’accueil en salle de naissance

Une fois passées les premières minutes de vie, et alors que le nouveau né est encore en salle de naissance avec sa mère, cinq autres mesures doivent compléter l'accueil néonatal.

1) La pesée
L'étude de l'AUDIPOG (1996) fournit des données récentes précises sur le poids de naissance, la taille et le périmètre céphalique normaux à partir d'un effectif de près de 100 000 naissances survenues dans 22 maternités de la France (tabl. II) : on s’y réfère pour juger du caractère normal ou non de la croissance intra-utérine.

2) La désinfection oculaire
Elle a pour but de prévenir la conjonctivite néonatale autrefois due au gonocoque (ou ophtalmie purulente du nouveau né), fréquemment responsable de cécité.
A l'heure actuelle, le germe le plus souvent responsable des conjonctivites (ou ophtalmies) néonatales est Chlamydia trachomatis ; les autres agents infectieux couramment retrouvés sont : Staphylococcus aureus, Escherichia coli, Proteus, Klebsiella et Streptococcus viridens ; le gonocoque n'est plus qu'en cinquième position des agents responsables.
Il n'y a pas actuellement de prophylaxie idéale, mais une désinfection oculaire systématique reste indispensable. Elle peut être assurée par une administration unique d’un collyre ophtalmique comme : Bétadine à 2,5 %, ou l'instillation biquotidienne pendant 24-48 h d'un collyre antibiotique (par exemple oxytétracycline = Posicycline®). A chaque instillation, on dépose une goutte de collyre à l'angle interne de chaque œil, de telle sorte qu'elle se répande à tous les niveaux du sac conjonctival.

3) L'administration de vitamine K1
Tout nouveau-né se trouve potentiellement en situation d'hypovitaminose K, en raison d'une faible teneur hépatique (1/5 de la teneur adulte) en vitamine K1 exogène (ou phylloquinone), d'une insuffisante production de vitamine K2 endogène (ou menaquinones) par la flore bactérienne intestinale, du fait du non établissement de celle-ci.
L'administration systématique de vitamine K1 au nouveau-né est donc impérative, dans le but de prévenir la maladie hémorragique du nouveau-né, qui se manifeste par des hémorragies, surtout digestives, qui surviennent vers la 36-48ème heure de vie. Chez l'enfant à terme sain, l'apport oral de 2 mg de vitamine K1 avec le premier biberon ou la première tétée est efficace (vitamine K1 Delagrange® ou Roche® : 2mg = 0,2ml).

4) L'établissement du carnet de santé
L'ensemble des constatations effectuées dans les premières minutes de vie et les gestes pratiqués doivent être consignés dans le carnet de santé qui est attribué à l'enfant, pour ne plus ultérieurement le quitter. Dans sa nouvelle version (1.1.2006), ce carnet de santé renferme de très judicieux "Conseils aux parents" du nouveau-né (pages 12 à 17), qu'il convient de les inciter à consulter attentivement.
Lien vers http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/carnet_de_sante.pdf

Figure 3 : Valeurs des percentiles du poids des garçons en fonction de l'âge gestationnel (AG)
étude 1996 de L'AUDIPOG

5) Le dépistage des malformations congénitales graves (voir suite du cours)
Avant d'être habillé, le nouveau-né doit bénéficier, dès la salle de naissance, d'un premier examen clinique rapide destiné à s'assurer de l'absence de toute malformation congénitale immédiatement préoccupante.
On vérifie par l'inspection l'absence d'anomalie visible : au niveau du faciès, au niveau des membres, au niveau du tronc (face antérieure et face postérieure), au niveau des organes génitaux externes et du palais.

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