L’interrogatoire précise :
– les antécédents ;
– les consommations médicamenteuses susceptibles de favoriser une hémorragie digestive occulte (antiagrégants, anticoagulants, anti-inflammatoires, etc.) ;
– les troubles gynécologiques éventuels et l’abondance et durée des règles (présence de caillots) ;
– les troubles digestifs éventuels (douleurs, diarrhée, rectorragies, méléna).
L’absence de signes digestifs n’exclut pas l’existence d’une lésion digestive responsable d’un saignement.
L’examen clinique cherche :
– une masse tumorale, notamment par le toucher rectal ;
– des stigmates cutanéo-muqueux d’une maladie de Rendu-Osler (angiomes cutanés, télangiectasies linguales) ;
– certaines anomalies associées à une polypose (kystes sébacés, ostéomes mandibulaires, tumeurs desmoïdes, lentiginose péri-orificielle).
1. Examen gynécologique
Il est indiqué chez la femme en période d’activité génitale. Cependant, la mise en évidence d’une lésion génitale est rare en l’absence de signes cliniques tels qu’une période menstruelle supérieure à 5 jours, la présence de caillots ou la nécessité de changements anormalement fréquents de protection.
Les saignements peuvent être favorisés par un dispositif intra-utérin (stérilet) ou une maladie de la coagulation (maladie de Willebrand). Des ménorragies ou des méno-métrorragies doivent faire réaliser des explorations gynécologiques (examen clinique, spéculum, frottis, échographie).
(2)La maladie de von Willebrand : une diathèse hémorragique fréquente et méconnue.
2. Explorations digestives
L’exploration endoscopique digestive (endoscopie oeso-gastro-duodénale et coloscopie totale) est essentielle dans ce bilan étiologique pour identifier la cause la plus habituelle d’une anémie par carence martiale : une lésion digestive à l’origine d’un saignement distillant (c’est-à-dire chronique et à débit très faible).
La recherche biochimique de sang dans les selles ne doit pas être faite car elle est réservée aux malades asymptomatiques dans le cadre du dépistage de masse du cancer colorectal. Un malade ayant une anémie ferriprive ne doit pas être considéré comme asymptomatique. La recherche de sang occulte dans les selles n’a aucun impact sur la démarche diagnostique. Un résultat positif semble augmenter la probabilité de mettre en évidence une lésion digestive mais un résultat négatif n’exclut pas la responsabilité d’une lésion digestive.
La séquence optimale de réalisation des examens endoscopiques n’est pas établie. Leur ordre peut être dicté par l’existence de symptômes. L’endoscopie oeso-gastro-duodénale est souvent réalisée la première, l’indication de la coloscopie se faisant dans un second temps, en fonction des résultats de l’endoscopie oeso-gastro-duodénale. Mais l’option de réaliser dans le même temps, sous anesthésie générale, endoscopie oeso-gastro-duodénale et coloscopie totale, peut être retenue.
Compte tenu de la prévalence du cancer colique, le bilan digestif après 50 ans doit comporter une coloscopie systématique. Avant cet âge, les examens à réaliser sont à discuter au cas par cas en sachant que les lésions digestives à l’origine d’une anémie par carence martiale sont plus souvent des lésions digestives hautes.
Si l’endoscopie oeso-gastro-duodénale n’identifie pas de lésion, elle doit comporter des biopsies duodénales systématiques (recherche d’atrophie villositaire). La réalisation concomitante de biopsies gastriques (antrales et fundiques) (recherche de gastrite atrophique) est recommandée.
Il convient de respecter certains principes dans l’interprétation des résultats des examens endoscopiques :
– en l’absence d’érosions intra-herniaires, une hernie hiatale, même volumineuse ne peut être retenue comme seule cause d’anémie par carence martiale ;
– en cas de traitement prolongé par AINS, chez un sujet de plus de 50 ans, l’exploration ne doit pas se limiter au tube digestif haut, même si une lésion est identifiée à ce niveau par l’endoscopie oeso-gastro-duodénale, car la présence d’un cancer colique n’est pas exceptionnelle ;
– un polype colique non ulcéré de taille inférieure à 15 mm ne peut être considéré comme la cause d’une anémie ferriprive ;
– la responsabilité d’une maladie hémorroïdaire ne peut être qu’un diagnostic d’élimination, après avoir exclu formellement une autre lésion sur le tube digestif.
(1) De la pratique des biopsies œso-gastro-duodénales.