2 . 3  -  Enquête étiologique

2 . 3 . 1  -  Enquête clinique minutieuse

  • Les circonstances de survenue doivent être recueillies :
    • âge de l’enfant ;
    • contexte particulier ;
    • survenue de l’hypoglycémie au jeûne court ou long, épisode unique ou récidive.
  • L’anamnèse doit écarter les situations pathologiques sévères conduisant de manière non spécifique à une hypoglycémie, résultant soit :
    • d’une carence en glycogène ou en substrat pour la néoglucogenèse : dénutrition sévère, insuffisance hépatique profonde aiguë ou chronique ;
    • d’une augmentation de la consommation de glucose : certaines tumeurs, septicémie ;
    • d’une fuite urinaire massive de glucose : tubulopathie de Fanconi-Bickel ;
    • ou encore d’une intoxication alcoolique ou la prise de médicaments : insuline, cibenzoline, gatifloxacine, pentamidine, quinine, indométacine, glucagon.
  • L’examen clinique doit être complet, au 1er rang duquel un examen neurologique rigoureux ainsi que la recherche d’une hépatomégalie.

2 . 3 . 2  -  Enquête paraclinique


Bilan de 1re intention


Toute hypoglycémie doit être authentifiée par une glycémie veineuse ; cette confirmation ne devant pas retarder la prise en charge thérapeutique. L’enquête paraclinique est systématique et prélevée avant resucrage (en dehors d’une situation d’urgence vitale).

  • Au moment de l’hypoglycémie (avant resucrage) :
    • glycémie veineuse ;
    • GH, cortisol, insuline et peptide-C ;
    • et en cas d’hypoglycémie au jeûne court : test au glucagon (voir infra).
  • Au plus proche de l’hypoglycémie (éventuellement juste après resucrage) :
    • lactate, ionogramme sanguin ;
    • 3-hydroxybutyrate ;
    • IGF1 ;
    • profil des acylcarnitines plasmatiques (déficits de la β-oxydation des acides gras) ;
    • dosage de toxiques et de médicaments selon le contexte (ex. : alcoolémie, sulfamides hypoglycémiants, antiarythmiques…) ;
    • uricémie, triglycéridémie, transaminases, CPK ;
    • bandelette urinaire : recherche de cétonurie et glycosurie ;
    • chromatographie des acides organiques urinaires.

Bilan de 2e intention

En l’absence de diagnostic au terme des premiers résultats biologiques, ou si les prélèvements en hypoglycémie n’ont pas pu être réalisés, des explorations complémentaires peuvent être conduites dans des services spécialisés (en pédiatrie : service de métabolisme ou d’endocrinologie).

En cas d’hypoglycémie au jeûne long, et après avoir vérifié la normalité du bilan métabolique après un jeûne physiologique (en particulier cortisolémie et profil des acylcarnitines plasmatiques normaux), une épreuve de jeûne peut être réalisée (durée adaptée à l’âge de l’enfant, au maximum 24 h). Des dosages hormonaux (insuline, peptide-C, cortisol, GH) et métaboliques (profil des acylcarnitines plasmatiques, lactatémie, 3OH-butyrate, chromatographie des acides organiques urinaires) sont prélevés régulièrement pendant l’épreuve et au cours de l’éventuelle hypoglycémie, afin de vérifier l’adaptation des sécrétions hormonales au jeûne prolongé et l’intégrité de la néoglucogenèse.

En cas d’hypoglycémie au jeûne court, un cycle glycémie-lactate avant et après chaque repas et/ou une HGPO (hyperglycémie provoquée par voie orale) sont indiqués. L’HGPO consiste, après ingestion d’une forte quantité de glucose, à mesurer régulièrement la glycémie et l’insuline pendant 2 à 4 heures.

Enquête paraclinique au plus proche de l’hypoglycémie, idéalement avant resucrage.

2 . 3 . 3  -  Orientation diagnostique


L’enquête clinique permet souvent d’avoir une orientation diagnostique éclairée.

Les situations pathologiques sévères conduisant de manière non spécifique à une hypoglycémie doivent être identifiées (voir supra).

Une défaillance multiviscérale oriente vers une insuffisance surrénalienne, un déficit de l’oxydation des acides gras.

Les hypoglycémies au jeûne court, doivent particulièrement évoquer un hyperinsulinisme ou une glycogénose (ou, chez le nouveau-né, un panhypopituitarisme).

Une hépatomégalie oriente vers une glycogénose.

Il convient d’apprécier la réponse au test au glucagon (injection de 1 mg de glucagon en SC avec contrôle de glycémie capillaire à 5 puis 10, 15 et 30 minutes). Le test est positif lorsque l’augmentation de glycémie est supérieure à 30 mg/dL ; orientant vers un mécanisme incluant un excès d’insuline. Un test négatif oriente vers une glycogénose.

L’hypoglycémie au jeûne long oriente vers un déficit hormonal, un défaut de la néoglycogenèse, un déficit de la β-oxydation des acides gras.

Une cétose doit toujours être recherchée : l’absence de cétose au jeûne long est anormale et oriente vers un déficit de la β-oxydation des acides gras. En revanche, les déficits de la néoglycogenèse s’accompagnent d’une forte cétose.

La présence d’une hyperlactatémie au moment de l’hypoglycémie signe un dysfonctionnement primaire (ex. : déficit en fructose 1,6-biphosphatase, glycogénose de type I) ou secondaire (ex. : déficit de la β-oxydation des acides gras) de la néoglucogenèse.

Le diagnostic peut également être orienté par la quantité de glucose nécessaire pour corriger l’hypoglycémie.

Si la correction de l’hypoglycémie nécessite des apports supraphysiologiques en glucose, le mécanisme en cause implique obligatoirement l’excès d’un facteur hypoglycémiant tel que l’insuline (par exemple, si un nouveau-né requiert des apports continus de glucose > 10–12 mg/kg/min).

Éléments d’orientation : jeûne court/long, hépatomégalie, cétose, hyperlactatémie.

2 . 3 . 4  -  Arbre diagnostique (fig. 62.1)

Figure 1: Arbre diagnostique des hypoglycémies de l’enfant (causes les plus fréquentes)
hG : hypoglycémie. F1, 6BP : fructose 1,6-biphosphatase, enzyme impliquée dans la néoglucogenèse. βOAG : β-oxydation des acides gras (permet à la mitochondrie d’utiliser les graisses pour fabriquer de l’ATP, notamment lors de la néoglucogenèse). Ggnose : glycogénose.

Maladie de la dégradation du glycogène (types I, III, VI, IX, conduisant à une hépatomégalie par surcharge hépatique en glycogène) ou de sa synthèse (type 0).

Hyperinsulinisme : l’excès d’insuline provoque une hypoglycémie. Cette insuline peut être d’origine exogène (surdosage en insuline chez un diabétique insulinodépendant), lié à une anomalie primaire du fonctionnement de la cellule β du pancréas (hyperinsulinisme congénital) ou lié à un processus tumoral de ces dernières (insulinome). Certains médicaments peuvent également provoquer des hypoglycémies par hyperinsulinisme (ex. : sulfamides hypoglycémiants).

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