2  -  Evolution du cadre législatif

2 . 1  -  Evolution des textes juridiques

Un décret de 1941, adopté sous le gouvernement de Vichy, soucieux de préserver l’image de la famille, constitue le fondement moderne du droit de l’accouchement sous le secret en liant pour la première fois la gratuité de la prise en charge des frais d’hébergement et d’accouchement et le secret de l’identité des parturientes.
« Pendant le mois qui précédera et le mois qui suivra l'accouchement, toute femme enceinte devra, sur sa demande, être reçue gratuitement et sans qu'elle ait besoin de justifier de son identité, dans tout établissement hospitalier public susceptible de lui donner les soins que comporte son état. »
Ce texte sera plusieurs fois repris dans différents décrets et modifié notamment par les lois du 8 janvier 1993 et enfin par la loi du 22 janvier 2002 pour devenir l’actuel article L. 222-6 du CASF. Les frais d’hébergement et d’accouchement sont alors pris en charge par l’ASE, dont dépend l’établissement hospitalier (public ou privé conventionné). Ainsi, la mère peut demander lors de son admission dans un établissement hospitalier que le secret de son admission et de son identité soit préservé (article 326 du CC). Aucune pièce d'identité n'est alors exigée et aucune enquête n'est entreprise (article R1112-28 du CSP).
La déclaration de naissance sera faite dans le délai légal par le personnel hospitalier qui a assisté à l’accouchement et il ne sera fait aucune mention sur le registre d’état civil du nom de la mère, ni du père sauf si ce dernier se fait connaître. La mère peut donner les prénoms qu’elle souhaite à l’enfant ou à défaut il sera choisi trois prénoms dont le dernier tiendra lieu de nom patronymique (article 57 du CC).
L’enfant sera recueilli par les services de l’ASE ou un organisme français autorisé pour l’adoption et un procès verbal sera alors établi (article L 224-5 du CASF) ; il comportera le consentement à l’adoption de la mère ou des deux parents ainsi que la mention des informations qui ont été données (cf chapitre 4.3).
La femme dispose d’un délai de rétractation de 2 mois (article 348-3 du CC) à l’issue duquel l’enfant deviendra pupille de l’Etat (article L 224-4 du CASF) et pourra être placé en vue d’une adoption plénière (article 351 du CC).

Parallèlement à l’évolution de la législation encadrant l’accouchement secret, de nombreux rapports sur le statut et la protection de l’enfant ont montré que la quête des origines est une étape naturelle et nécessaire dans le processus de construction de la personnalité de chacun.
De plus, la revendication croissante de personnes nées sous le secret de connaître leurs origines a abouti à la loi Mattéi du 5 juillet 1996. Cette loi ne supprime pas la possibilité de demander le secret mais apporte des aménagements : elle institue un droit relatif, qui dépend de la volonté de la mère et non un droit absolu de connaître ses origines.
La dernière réforme est la loi relative à l’accès aux origines initiée par la ministre de la Famille Ségolène Royal ; elle crée une instance le CNAOP dont la mission est de faciliter l’accès aux origines des personnes adoptées ou pupilles de l’Etat.
Ainsi, la femme qui ne veut pas établir de filiation peut cependant laisser son identité sous pli cacheté. L’enfant pourra alors demander au CNAOP, seul habilité à ouvrir l’enveloppe de rentrer en contact avec la mère. Cependant, la levée du secret sera toujours soumise à sa seule volonté ; la mère doit en effet donner son accord pour lever le secret, mais peut également choisir de maintenir son identité secrète même après sa mort. La levée du secret ne crée bien sûr, aucune filiation avec les mères biologiques.

Il est à noter qu’une femme qui ne veut pas établir de filiation n’est pas obligée d’accoucher dans le secret et peut quand même laisser son identité «ouvertement », l’enfant pourra y accéder plus tard. De même, l’accouchement dans le secret ne doit pas être confondu avec la demande de confidentialité dont peut bénéficier toute personne hospitalisée.

2 . 2  -  Le CNAOP

Cette instance est composée de 17 membres : 2 magistrats, 6 représentants des ministères concernés, 1 représentant des conseils généraux, 6 représentants des associations et 2 personnalités qualifiées.
Elle intervient :

  • en recueillant les informations, identifiantes ou non, laissées par la mère au moment de la naissance sous pli fermé ;
  • en centralisant les demandes des enfants abandonnés à la naissance qui souhaitent tenter d’identifier leur mère biologique. En effet, si la mère n’est pas restée totalement anonyme, le CNAOP tente de la retrouver et d’entrer en contact avec elle dans le respect de sa vie privée afin de recueillir sa volonté quant à la levée du secret de son identité, à la communication de son identité et à une éventuelle rencontre avec l’adopté.


Le CNAOP reçoit la demande d’accès aux origines personnelles :

  • si la personne est majeure, par elle-même ;
  • si elle est mineure et en âge de discernement, par elle-même avec accord des représentants légaux;
  • si elle est majeure sous tutelle, par son tuteur ;
  • si elle est décédée, par ses descendants en ligne directe majeurs.


Il reçoit également :

  • les déclarations de levée de secret de la mère ou le cas échéant du père de naissance ;
  • les déclarations d’identité des descendants, ascendants ou collatéraux de la mère ou du père ;
  • les demandes éventuelles des pères et mères s’enquérant de la recherche éventuelle par l’enfant.


Dans ces cas, les pièces seront seulement versées au dossier mais n’entraineront aucune démarche. En effet, la loi ne permet pas aux parents de naissance de retrouver leur enfant sauf si celui-ci en a fait auparavant la demande.

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