A. Mesures thérapeutiques générales
1. Mesures communes à tous les terrains
Elles comportent d’abord des conseils d’hygiène universels pour le malade et son entourage (hygiène des mains, absence de partage des objets de toilette et des couverts, désinfection des toilettes).
La mesure essentielle du traitement symptomatique de toute diarrhée aiguë consiste à compenser les pertes en eau et en sodium. Le volume de liquide à compenser correspond à la perte soudaine de poids corporel. Sauf déshydratation sévère et vomissements incoercibles, la restauration hydrosodée doit être tentée per os, par des boissons abondantes (eau plate, boissons gazeuses) associées à une alimentation salée (à défaut biscuits salés ou sachets de sel) et riche en glucose (amidon du riz et des pâtes, sucrose), le transport actif du glucose dans l’entérocyte favorisant l’absorption concomitante hydrosodée. En cas de fortes nausées, la réhydratation doit débuter par des tentatives d’ingestion de petits volumes à intervalles rapprochés. À noter que le Coca-cola contient de l’eau et du glucose, mais est presque complètement désodé et ne dispense donc pas d’apports salés.
Les ralentisseurs du transit (surtout lopéramide et oxyde de lopéramide), le racécadotril (anti-sécrétoire) ou certains produits inertes supposés renforcer la barrière muqueuse intestinale (diosmectite), sont efficaces pour réduire la durée de la diarrhée. Les ralentisseurs du transit sont contre-indiqués en cas d’iléocolite avérée ou suspectée (diarrhée hémorragique ou avec fièvre élevée) car ils sont susceptibles d’aggraver les lésions intestinales par réduction de la clairance fécale des agents pathogènes.
Le traitement des symptômes associés fait appel aux anti-pyrétiques en cas de fièvre, aux anti-spasmodiques (phosphoglucinol) ou aux antalgiques banals en cas de douleurs spasmodiques, aux anti-émétisants (dompéridone, métoclopramide) en cas de nausées et/ou vomissements (ENC 345).
2. Mesures particulières à l’enfant et aux sujets âgés
La prise en charge de la diarrhée du nourrisson comporte des spécificités importantes, et n’est pas traitée ici. Certains agents infectieux sont particulièrement fréquents chez l’enfant (rotavirus, calicivirus, adénovirus, astrovirus) ou propres à l’enfant (E. coli entéro-pathogènes (EPEC)). La diarrhée à E. coli entérohémorragiques se complique plus volontiers de syndrome hémolytique et urémique chez l’enfant et le sujet âgé.
En institution gériatrique, tous les éléments sont réunis pour augmenter le risque d’infection intestinale : restauration collective, admission de convalescents ayant récemment séjourné en milieu hospitalier, contamination féco-orale accrue par l’existence de patients déments et/ou incontinents. Au-dessus de 75 ans, la mortalité par diarrhée infectieuse n’est pas négligeable, liée aux accidents de déshydratation pendant la diarrhée, à un pic de mortalité 8-10 jours après le début de la diarrhée alors que celle-ci a souvent disparu (cette mortalité est attribuée aux conséquences à moyen terme d’une hypoperfusion des organes vitaux pendant la phase de déshydratation), et enfin aux formes graves de colites à Clostridium difficile (en particulier dues au nouveau variant du germe, plus agressif, endémique dans le continent américain et maintenant en Europe).
L’enfant et le sujet très âgé ressentent moins la soif que l’adulte. Les compensations des pertes hydro-électrolytiques avec support glucosé peuvent se faire chez eux par les solutions de réhydratation orale du commerce (type Adiaril) qui contiennent du sodium (50 mmol/L), du glucose, du potassium, du chlore et un agent alcalinisant. Ce sont des sachets à reconstituer dans 200 mL d’eau. Chez le sujet très âgé, il faut administrer la solution sur la base de 1 à 2 litres le premier jour, en alternance avec de l’eau ; dès que la diarrhée régresse, l’utilisation des solutions doit être interrompue, pour éviter le risque secondaire d’inflation hydrosodée (œdèmes, hypertension artérielle) et d’hypernatrémie.
(3) Épidémiologie des diarrhées aiguës infectieuses en France et en Europe.
B. Traitement d’urgence de la diarrhée
Une hospitalisation en urgence est nécessaire en cas de syndrome septicémique et/ou de déshydratation sévère. Le traitement comporte, après les prélèvements microbiologiques et ceux évaluant les pertes hydro-électrolytiques :
– un traitement antibiotique probabiliste en urgence (cf. explorations et traitements probabiliste nécessaire d’emblée) ;
– la compensation par voie intraveineuse des pertes hydro-électrolytiques :
• hydriques sur la base de la perte de poids soudaine,
• sodées sur la base d’une perte d’environ 50 mmol/L de sodium dans les selles,
• potassiques si besoin (diarrhée profuse, vomissements associés).
Une alcalinisation (par du bicarbonate 14/°°) [?] peut être nécessaire, la diarrhée aiguë étant une des causes possibles des rares acidoses métaboliques avec hypokaliémie.
C. Traitement de la diarrhée et de la colite des antibiotiques
La plupart des cas de diarrhée bénigne des antibiotiques, liés à une dysbiose de la flore intestinale ou à une forme mineure d’infection à Clostridium difficile, régresse rapidement à l’arrêt de l’antibiothérapie.
La diarrhée franche et la colite à Clostridium difficile sont traitées en première intention par du métronidazole per os, sur la base d’1 gramme par jour pendant 10 jours. En cas d’échec et/ou de colite sévère, le recours à la vancomycine per os (500 mg à 2 grammes/jour) peut être discuté. En cas d’échec et de menace du pronostic vital, une colectomie en urgence peut être indiquée. Environ 20 % des patients ayant eu une infection à Clostridium difficile, en particulier les sujets âgés, rechutent, à la faveur ou non d’une nouvelle antibiothérapie, du fait d’une réponse immunitaire insuffisante n’ayant pu aboutir à une élimination définitive du germe. La reprise du
métronidazole est en général efficace (pas ou peu de résistance acquise). Le risque d’une rechute ultérieure est réduit par la co-prescription d’une levure, Saccharomyces boulardii.
Les colites hémorragiques à Klebsiella oxytoca régressent en général rapidement à l’arrêt de l’antibiothérapie responsable. Si ce n’est pas le cas, un traitement par quinolones est indiqué.