2  -  Quels sont les principaux tableaux cliniques de douleurs pelviennes chroniques cycliques ?

La première question est : s'agit-il de douleurs périodiques, rythmées par les règles ?

Les trois principaux syndromes douloureux cycliques sont :

2 . 1  -  Le syndrome intermenstruel

Sur le plan clinique, ce syndrome du 15e jour est fait de l'association de :

  • Douleur :
    • Elle peut résumer le tableau clinique : il s'agit d'une pesanteur pelvienne, plus souvent diffuse que latéralisée, irradiant vers la région lombaire, vers les cuisses, vers le périnée,
    • Cette douleur, d'intensité variable, est en règle modérée, n'imposant pas l'arrêt de l'activité,
    • Rarement, le syndrome douloureux est d'une telle acuité qu'il peut faire croire à un ventre aigu,
    • Mais le caractère cyclique de la douleur, son apparition au milieu du cycle vers le 14e jour, la brièveté de cette algie pelvienne, se manifestant pendant quelques heures au plus, sont autant d'éléments permettant de faire le diagnostic.
  • hémorragie intermenstruelle :
    • Elle est constante microscopiquement mais peut passer inaperçue cliniquement,
    • Elle est peu abondante, souvent limitée à quelques gouttes,
    • Elle ne dure que quelques heures, ou au maximum 1 ou 2 jours.
  • gonflement abdomino-pelvien :
    • La sensation d'un gonflement abdomino-pelvien vient souvent compléter le tableau.


L'examen gynécologique


Il ne révèle que les signes d'imprégnation œstrogéniqueDéfinitionŒstrogène : Groupe de stéroïdes, dont la fonction, à l'état naturel, est d'être une hormone sexuelle femelle primaire. Ils sont produits en premier lieu par le développement des follicules des ovaires, le corps jaune (corpus luteum) et le placenta. Certains œstrogènes sont également produits en petites quantités par d'autres tissus tels le foie, la surrénale, les seins et le tissu adipeux. Ces sources secondaires d'œstrogènes sont particulièrement importantes chez les femmes lors de la post-ménopause. Les trois œstrogènes naturels sont l'estradiol, l'estriol et l'estrone. Bien que les œstrogènes soient présents dans les deux sexes, on en trouve une quantité significativement plus importante chez les femmes que chez les hommes. Elles favorisent le développement des caractères sexuels secondaires, comme les seins, et sont également impliquées dans le contrôle du cycle menstruel, ce qui explique pourquoi la plupart des pilules contraceptives en contiennent. L'usage d'œstrogènes, en particulier associés à la progestérone, est un traitement (traitement de substitution hormonale) controversé des symptômes de la ménopause. En plus de leurs rôles dans la reproduction, féminine mais aussi masculine, les œstrogènes sont impliqués dans le développement du système nerveux central, dans l'homéostasie du squelette et du système cardiovasculaire. Ils ont également des effets sur le foie et le tissu adipeux. au voisinage de l'ovulation : glaire cervicale claire (parfois striée de sang), filante, abondante, cristallisant en feuille de fougère.

Les examens complémentaires : ils sont inutiles au diagnostic, tout au plus peut-on être amené, pour éliminer une autre étiologie dans les formes aiguës, à réaliser une échographie qui permettrait de retrouver une lame liquidienne, rétro-utérine, hypo-échogène (la cœlioscopieDéfinitionCœlioscopie ou laparoscopie : Technique chirurgicale mini-invasive de diagnostic (cœlioscopie proprement dite) et d'intervention (cœliochirurgie) sur la cavité abdominale, de plus en plus utilisée sur l'appareil digestif (chirurgie viscérale), en gynécologie, et en urologie. Elle fait partie des techniques d'endoscopie chirurgicale. (voir cœlioscopie et examen cœlioscopique) permettrait de rattacher ce syndrome à l'ovulation : follicule rompu, hémorragie dans le cul-de-sac de Douglas).

NB : Physiopathologie : Le syndrome intermenstruel est la traduction clinique exagérée de l'œstrusDéfinitionŒstrus ou chaleurs : Période durant laquelle une femme est fécondable Pour la femme, cette période infertile correspond à la première partie du cycle menstruel. ovarien (ponte ovulaire) ; l'hémorragie est liée à la chute des œstrogènes à l'ovulation. Cette exagération d'un phénomène physiologique est liée à l'association d'un terrain neurovégétatif et d'un terrain psychique particulier.


Traitement

Les formes mineures répondent bien aux antalgiques banals et aux antispasmodiques. Les formes plus invalidantes justifient d'un blocage de l'ovulation, par les œstroprogestatifDéfinitionŒstroprogestatif : Produit inhibiteur de l'ovulation, associant un progestatif et un œstrogène.s par exemple. Enfin, l'explication du caractère physiologique de l'ovulation et des signes qui l'accompagnent, n'est jamais inutile.

2 . 2  -  Le syndrome prémenstruel

(Cf. Item 26 : Anomalies du cycle menstruel – Métrorragies ).

Il s'agit d'un cortège de manifestations apparaissant dans la semaine précédant les règles, et disparaissant soit la veille de la menstruation, soit au premier jour de celle-ci.

Le syndrome prémenstruel s'observe plus volontiers sur un terrain particulier : femme longiligne, intellectuelle et souvent de structure névrotique.

Sur le plan clinique, il associe :

  • Une congestion pelvienne : Elle est abdomino-pelvienne, elle associe un ballonnement intestinal et une sensation de pesanteur douloureuse.
  • Des troubles psychiques : ils sont le plus souvent mineurs : il s'agit d'une instabilité caractérielle, avec irritabilité et anxiété. Très rarement, les troubles psychiques sont graves : tendance dépressive avec impulsions suicidaires, voire syndrome mélancolique. Il est à noter que le suicide chez la femme se produit habituellement en phase prémenstruelle, ainsi que certains gestes criminels tels que les meurtres passionnels.


L'examen gynécologique : Il montre parfois :

  • Des lésions témoignant d'une infection génitale antérieure. En fait, le plus souvent, il ne révèle rien d'anormal, si ce n'est un utérus un peu gros, congestif, qui revient à la normale après les règles. La physiopathologie du syndrome prémenstruel reste encore obscure. S'il existe de manière indiscutable des anomalies de la perméabilité vasculaire avec des phénomènes congestifs responsables d'œdèmes au niveau tissulaire, les causes de ces phénomènes sont encore mal cernées.
  • Enfin les facteurs psychologiques pourraient intervenir de plusieurs façons :
    • Perturbation des mécanismes de l'ovulation,
    • Modification du tonus neurovégétatif au niveau des vaisseaux,
    • Variations du sympathique rénal pouvant induire une rétention hydrosodée.


La synthèse de ces différents éléments est difficile à réaliser. Cependant, on peut estimer qu'un déséquilibre de la balance œstroprogestative en 2e moitié de cycle au profit des œstrogènes, est le facteur déclenchant principal de la rétention liquidienne au niveau tissulaire.


Traitement

Le traitement à visée pathogénique fait appel aux progestatifs, qu'ils soient dérivés de l'hormone naturelle ou de synthèse. Ils ont tous, prescrits en deuxième moitié de cycle, une efficacité sur le syndrome prémenstruel. On évitera simplement les produits dotés d'une trop forte activité androgénique.

Le traitement à visée symptomatique suffit souvent. Ainsi les toniques veineux, en diminuant l'œdème tissulaire, améliorent en règle les doléances cliniques. Les diurétiques quant à eux, sont rarement nécessaires, ce d'autant que certains d'entre eux peuvent aggraver l'hyperaldostéronismeDéfinitionSécrétion anormalement élevée d'aldostérone, hormone – sécrétée par la glande corticosurrénale – qui règle la quantité de sodium et de potassium dans l'organisme et contrôle la volémie (volume sanguin circulant)..

Enfin les conseils d'hygiène de vie sont souvent nécessaires, repos, détente, sommeil… Parfois, une psychothérapie et l'adjonction de drogues tranquillisantes ne sont pas superflues. Soulignons que, en raison de l'évolution capricieuse de ce syndrome et de sa composante psychologique, l'appréciation des résultats thérapeutiques est assez délicate.

2 . 3  -  Dysménorrhée ou algoménorrhée

Le syndrome de la menstruation douloureuse est d'une fréquence extrême, intéressant plus de la moitié des femmes. Cependant si l'on ne retient que les cas ou la douleur menstruelle entraine une gêne, voire impose l'arrêt de l'activité, on peut en chiffrer la fréquence à une femme sur 10.

Il convient de diviser les algoménorrhéeDéfinitionMenstruations difficiles et douloureuses, survenant généralement au deuxième jour des règles, puis s'aggravant progressivement. On distingue les dysménorrhées primaires correspondant à des perturbations du cycle ovulatoire non associées à une atteinte des organes reproducteurs, des dysménorrhées secondaires appelées également dysménorrhées acquises qui sont des règles douloureuses dues à une véritable maladie, c'est-à-dire à une lésion des organes reproducteurs.s en 2 grands groupes :

  • Les algoménorrhées fonctionnelles, qui sont volontiers primaires,
  • Les algoménorrhées organiques, qui sont souvent secondaires, apparaissant après une période pendant laquelle les règles étaient « normales ».

2 . 3 . 1  -  Les algoménorrhées essentielles

Elles représentent les 3/4 des cas. Il s'agit le plus souvent d'un syndrome douloureux se manifestant dès l'adolescence.

Physiopathologie :

Plusieurs facteurs sont intriqués dans la genèse des douleurs :

  • Les facteurs psychologiques, largement surestimés par le passé, semblent en fait n'être que des facteurs modulants et non déclenchants. On peut parler « d'un abaissement du seuil de la douleur » chez certaines femmes, secondaire à des perturbations psychologiques.

2 . 3 . 2  -  Les algoménorrhées « organiques »

Ce sont souvent des algoménorrhées secondaires, observées chez des femmes multipares ou nullipares de plus de 25 ans. On recherche l'anomalie organique (cervicale, utérine ou annexielle) et l'on s'aidera des examens complémentaires de l'appareil génital (en particulier, hystérosalpingographieDéfinitionHystérosalpingographie ou hystérographie : Examen de la cavité utérine et des trompes qui ne sont pas visibles sur des radiographies standards. Cet examen est très utile dans les bilans de stérilité, d'infections répétitives, de saignements génitaux, de douleurs… Elle recherche des anomalies telles qu'une tumeur, un fibrome ou un rétrécissement des voies génitales. (voir hystérosalpingographie), cœlioscopie et surtout IRM). Plusieurs causes classiques, peuvent ainsi être retrouvées :

  • L'endométriose :
    • Elle est au premier rang des causes d'algoménorrhée organique. Caractérisée par le développement, dans divers tissus, de foyers cellulaires clos ayant les caractères de l'endomètre. L'endométriose affecte les femmes en âge de procréer. L'algoménorrhée endométriosique est tardive, apparaissant le 2e ou le 3e jour des menstruations, et dure jusqu'à la fin des règles. Elle s'associe à des douleurs pelviennes sans rythme, mais comportant une recrudescence prémenstruelle et parfois à une dyspareunie profonde.
    • Le diagnostic d'endométriose repose sur la clinique (foyer d'endométriose visible sur le col, palpable au niveau des ligaments utérosacrés et du cul-de-sac de Douglas) et surtout sur la cœlioscopie qui appréciera l'étendue des lésions et l'IRM.

2 . 3 . 3  -  Traitement des algoménorrhées

Le traitement des algoménorrhées organiques est toujours à visée étiologique :


Le traitement des algoménorrhées fonctionnelles :

  • Le traitement à visée symptomatique :
    • Les antalgiques et les antispasmodiques peuvent suffire dans les formes mineures,
    • Les progestatifs prescrits en 2e moitié de cycle peuvent également avoir un effet bénéfique grâce à leurs propriétés myorelaxantes sur l'utérus.
  • La psychothérapie : les facteurs psychiques n'ont pas l'importance qu'on leur accordait autrefois. L'apparition de thérapeutiques efficaces a fait diminuer le lot de ces patientes que l'on confiait parfois un peu rapidement au psychiatre.
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