Importance de l’éducation thérapeutique, visant à l’autonomisation maximale du patient :
Définir des objectifs thérapeutiques personnalisés et acceptés (tableau 13.IV), y compris les objectifs de réduction du risque cardiovasculaire (cf. « Diabète de type 2 »). S’appuyer sur les principaux enseignements des études DCCT/EDIC (cf. encadré).
Objectifs glycémiques idéaux chez les diabétiques de type 1 non âgés | |||
Le matin à jeun Avant les repas 2 heures après les repas Au coucher À 3 heures du matin HbA1c Hypoglycémies modérées Hypoglycémies « sévères » Nombre d’autocontrôles Nombre d’injections | 1-1,20 g/L 0,8-1,2 g/L 1,2-1,8 g/L env 1,2 g/L > 0,8 g/L <= 7 % 0-5 / semaine 0 3-6 / jour 3-5 ou pompe |
Une insulinothérapie intensifiée réduit l’hémoglobine glyquée, retarde et réduit la gravité des complications micro et macroangiopathiques. Il existe une certaine mémoire du déséquilibre métabolique qui retentit sur l’histoire naturelle des complications, même après l’amélioration du contrôle glycémique. L’insulinothérapie intensifiée augmente le risque d’hypoglycémie sévère. L’objectif métabolique, la valeur cible de l’HbA1c, est une côte mal taillée entre ces deux risques. On remarquera toutefois que l’étude DCCT remonte aux années 1980-1990 et que les insulines utilisées étaient constituées exclusivement d’insuline humaine. Les analogues de l’insuline de durée d’action courte ou longue ont le mérite de diminuer significativement le risque d’hypoglycémies sévères chez les patients avec diabète autoimmun, même s’ils ne l’annulent pas complètement. Cela conduit à des exigences actuelles renforcées en termes d’objectif d’HbA1c.
L’objectif idéal est ainsi une HbA1c <= 7 % pour un sujet adulte. Pour les enfants, un objectif supérieur est envisageable compte tenu du risque de retentissement des hypoglycémies sévères. Il en est de même à l’autre extrémité de la vie, chez le vieillard.
Ces objectifs pourront être obtenus grâce à l’établissement d’un contrat de confiance entre le patient et l’équipe soignante. Il faut signaler certaines attitudes médicales contre-productives assez fréquentes, telles que menacer le malade des complications (la peur n’est pas un bon moteur au volontarisme, elle paralyse plutôt), banaliser les contraintes (vivre avec un diabète n’est pas si simple que cela), répondre aux problèmes par une escalade technologique (la pompe n’améliorera pas un patient en plein déni de son diabète ou une femme présentant des troubles du comportement alimentaire), se résigner au déséquilibre sans avoir tout tenté encore et encore pour améliorer l’HbA1c, ignorer les demandes du patient en termes de contrôle du poids, de mode de vie, etc.
Études DCCT [4] et DCCT/EDIC [5] (+++)
Objectifs
Montrer la possibilité de diminuer la fréquence des complications microangiopathiques et neurologiques du diabète de type 1 en maintenant la glycémie à un niveau proche de la normale.
Plan expérimental
Étude prospective randomisée sur 6 ans, incluant 1 441 patients.
Patients
1 441 patients sur 29 centres aux États-Unis, recrutés pendant 6 ans avec un suivi moyen de 6,5 ans, présentant les critères classiques majeurs de diabète de type 1 : diabétiques depuis au moins un an, ayant une moyenne d’âge de 26 ans. Deux cohortes sont définies parmi ces patients : une cohorte est indemne de toute complication, donc suivie en prévention primaire ; une cohorte avec présence de complications débutantes est suivie en prévention secondaire d’aggravation.
Intervention
Un groupe traité par insulinothérapie dite « conventionnelle », consistant en 1 ou 2 injections quotidiennes d’insuline sans adaptation des doses. Un groupe traité par insulinothérapie dite intensive, consistant en 3 à 4 injections quotidiennes ou la mise en place d’une pompe à insuline, avec autocontrôle glycémique quatre fois par jour et adaptation des doses d’insuline visant à obtenir une glycémie inférieure à 1,20 g/L à jeun, et inférieure à 1,80 g/ L en postprandial.
Critères du jugement
Fond d’œil tous les 6 mois avec cotation de la rétinopathie sur une échelle de 25 points. Microalbuminurie annuelle, recherche clinique d’une neuropathie, évaluation clinique de la macroangiopathie, incidence des hypoglycémies sévères.
Principaux résultats
99 % des patients sont restés jusqu’au bout dans l’étude. La différence d’équilibre glycémique entre les 2 groupes est significative et stable pendant toute la durée de l’étude : 2 % d’HbA1c de différence, p < 0,001. L’insulinothérapie « intensive » réduit de manière significative le risque d’apparition d’une rétinopathie (incidence diminuée de 50 % sur 6 ans), ou d’aggravation de la rétinopathie (risque de progression diminué de 50 % sur 6 ans). L’insulinothérapie « intensive » diminue le risque d’apparition ou d’aggravation de la microalbuminurie de 30 à 40 %. De même, le risque d’apparition d’une neuropathie diminue de 70 % sur 5 ans. Les résultats ont conduit à l’arrêt prématuré de l’étude.
Le risque de complications macroangiopathiques était faible compte tenu de l’âge moyen bas des patients et de l’absence de facteurs de risque cardiovasculaire associés. Celui-ci ne diffère pas significativement d’un groupe à l’autre.
Le nombre d’hypoglycémies sévères est plus important dans le groupe traité de manière intensive mais sans séquelles neurologiques ni coma mortel.
Poursuite de l’étude DCCT : étude EDIC
Une grande partie des sujets de la première étude a continué à être suivie. Les patients du groupe contrôle ont intensifié leur insulinothérapie et ceux du groupe intensif, un peu moins sollicités, ont relâché leur effort. Les deux groupes se sont retrouvés avec des valeurs proches d’HbA1c autour de 7,8 %. Cette prolongation de l’étude a permis de montrer que l’incidence des complications de macroangiopathie avait aussi été influencée favorablement par la qualité de l’équilibre pendant la période DCCT dans le groupe intensif. Elle a aussi permis de mettre en évidence cette mémoire métabolique du déséquilibre qui retentit sur l’histoire naturelle des complications micro et macroangiopathiques, même après amélioration du contrôle glycémique.
Conclusion
Obtenir une moyenne glycémique proche de la normale permet de retarder l’apparition ou de ralentir la progression de la rétinopathie, de la néphropathie, de la neuropathie et de la coronaropathie dans le diabète de type 1. Un déséquilibre pendant plusieurs années pénalise le patient, même après amélioration du contrôle glycémique.