Des recommandations sur la « prise en charge de l’ulcère de jambe à prédominance veineuse hors pansement » ont été publiées en novembre 2006 (HAS).


 Haute Autorité de Santé (HAS). Prise en charge de l’ulcère de jambe à prédominance veineuse hors pansement. HAS; 2006. Haute Autorité de Santé (HAS). Prise en charge de l’ulcère de jambe à prédominance veineuse hors pansement. HAS; 2006.

L’ulcère de jambe se définit comme une plaie de la jambe ne cicatrisant pas depuis plus d’un mois. Il s’agit de la complication d’une maladie vasculaire sous-jacente souvent ancienne ou grave qui règle le pronostic et la conduite thérapeutique. L’ulcère de jambe, très fréquent, est invalidant et à l’origine de très nombreuses hospitalisations.

Physiopathologie

Ulcère veineux

La physiopathologie de l’ulcère de jambe veineux pur est une hypertension veineuse ambulatoire qui peut être secondaire à :
  • des reflux dans les veines superficielles, perforantes (incompétence valvulaire superficielle et varices dans la maladie veineuse essentielle) ;
  • des reflux dans les veines profondes et/ou à une obstruction dans les veines profondes (étiologie post-thrombotique) ;
  • et/ou à une déficience de la pompe musculaire du mollet.

L’hypertension veineuse ambulatoire conduit à des anomalies de la microcirculation et à une souffrance tissulaire, comme en témoignent les troubles trophiques d’insuffisance veineuse. Sur ces téguments fragilisés, un simple petit traumatisme peut être à l’origine de l’ulcère.

L’ulcère mixte à prédominance veineuse est défini comme un ulcère de mécanisme préférentiellement veineux mais s’accompagnant d’une AOMI modérée qui n’explique pas à elle seule la présence de l’ulcère.

La physiopathologie de la microangiopathie veineuse est encore mal élucidée :
  • capillaires cutanés dilatés, et raréfiés ;
  • la destruction capillaire semble due à une adhésion et à une activation des leucocytes dans la microcirculation avec production de radicaux libres et d’enzymes toxiques pour le capillaire et pour le tissu interstitiel ;
  • l’hypothèse d’un manchon de fibrine péricapillaire gênant la diffusion de l’oxygène est moins probable ;
  • d’autres mécanismes sont invoqués : piégeage des facteurs de croissance réduisant les capacités de cicatrisation de la peau, dilatation capillaire avec fuite capillaire et œdème ;
  • une microangiopathie lymphatique par surcharge secondaire à la fuite capillaire est souvent associée.


Ulcère artériel

Les lésions cutanées observées sont directement en rapport avec l’ischémie par défaut de perfusion artérielle du membre.

1  -  Diagnostic

1 . 1  -  Ulcère

L’examen clinique détermine :

  • le nombre d’ulcères (Figure 1), unique ou multiple ;
  • la taille ;
  • le siège : sus- et rétromalléolaire interne, malléolaire externe, face antéro-externe de jambe, distal (orteils)… et le caractère uni- ou bilatéral ;
  • le fond : propre ou surinfecté, purulent, bourgeonnant, en voie de cicatrisation ou recouvert d’un enduit jaunâtre adhérent (fibrine) voire d’une zone nécrotique noirâtre ;
  • importance de l’exudat ;
  • la nature des bords : bords souples au même niveau que l’ulcère (bon pronostic) ; ou au contraire durs et faisant saillie au-dessus de l’ulcère.
Figure 1 : Ulcère veineux sus-malléolaire interne, à fond fibrineux

1 . 2  -  Peau périulcéreuse

Elle est rarement normale. Elle est le reflet des complications cutanées de la maladie vasculaire sous-jacente.

1 . 2 . 1  -  Artériopathie

La peau est blanche ou cyanique, froide, luisante et dépilée.

1 . 2 . 2  -  Insuffisance veineuse

Les troubles trophiques caractéristiques sont :

  • des lésions dermo-épidermiques : plaques érythémato-squameuses, prurigineuses, débutant souvent dans la région malléolaire interne et pouvant s’étendre au reste de la jambe. Elles sont également appelées eczéma variqueux (Figure 2) ;
  • des lésions de capillarite :
    • la dermite ocre qui forme de larges placards malléolaires internes ou des faces antérieures des tibias. Rouge violacé en phase initiale, ils deviennent rapidement bruns en raison des dépôts indélébiles d’hémosidérine,
    • l’atrophie blanche qui correspond à l’obstruction des petits vaisseaux dermiques. Elle se présente sous la forme de plaques de petite taille, irrégulière, atrophiques et de couleur ivoirine parfois parcourues de fines télangiectasies. Souvent douloureuse, sa tendance à l’ulcération est très importante,
    • les capillarites hypertrophiques qui ont un aspect de chevelus capillaires malléolaires ou du dos du pied ;
  • des lésions d’hypodermite :
    • l’hypodermite aiguë ou subaiguë qui se manifeste par un tableau de grosse jambe rouge et douloureuse, d’apparition progressive, non fébrile,
    • la lipodermatosclérose (hypodermite scléreuse) qui peut survenir à la suite de plusieurs épisodes d’hypodermite aiguë ou se constituer d’emblée, insidieusement. Le mollet est dur, la peau est scléreuse, souvent pigmentée et impossible à pincer réalisant une véritable guêtre rétractile.
Figure 2 : Ulcère veineux avec dermatite de stase périulcéreuse

Chez un même malade, plusieurs types de lésions peuvent s’associer.

1 . 3  -  Examen vasculaire

Tout ulcère de jambe justifie un examen clinique vasculaire complet.

1 . 3 . 1  -  Interrogatoire

Il recherche :

  • des signes d’insuffisance veineuse essentielle ou post-phlébitique : douleurs à type de crampe au repos, œdème vespéral ;
  • des antécédents personnels ou familiaux de varices traitées ou non, de thromboses veineuses profondes, superficielles ou d’embolie pulmonaire, des antécédents de traumatismes ou de chirurgie des membres inférieurs ;
  • des antécédents obstétricaux et les autres antécédents médicaux et chirurgicaux ;
  • des signes d’artériopathie : claudication intermittente, douleurs de décubitus.

1 . 3 . 2  -  Examen clinique

L’examen clinique comprend :

  • la palpation des pouls périphériques ;
  • l’auscultation des artères des membres et du cou ;
  • la recherche de varices des membres inférieurs et leur localisation (inspection, palpation, percussion) ;
  • la recherche de télangiectasies, veines réticulaires, couronne phlébectasique de la cheville et du pied (cf. « Troubles trophiques ») ;
  • la recherche systématique de facteurs de risque vasculaire : diabète, hypertension artérielle, trouble métabolique, tabagisme, antécédents d’accident vasculaire cérébral ou d’ischémie myocardique ;
  • la présence de cicatrices d’anciens ulcères.

1 . 4  -  Évaluation du degré de handicap locomoteur

Cette évaluation fait partie du bilan diagnostique.

Les malades handicapés par une ankylose de la cheville elle-même souvent secondaire à l’ulcère, une coxarthrose, une gonarthrose, des déformations orthopédiques des pieds (hallux valgus, affaissements plantaires…) ont moins de chances de succès thérapeutique et de récupération fonctionnelle.

Au terme de ce quadruple examen, il sera possible d’évoquer les principales causes de l’ulcère.

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