Introduction

La pneumocystose est une mycose pulmonaire due à un champignon cosmopolite opportuniste transmissible, dénommé Pneumocystis jirovecii, survenant majoritairement chez les patients immunodéprimés. L’infection se présente essentiellement comme une pneumopathie, tandis que les localisations extrapulmonaires sont rares. Les premières descriptions de pneumopathies à Pneumocystis jirovecii (PPC) ont été faites dans les années quarante chez des nourrissons malnutris en Europe de l’Est. Des cas ont été ensuite signalés dans le monde chez des nourrissons prématurés, des patients immunodéprimés cancéreux et transplantés de rein. En 1981, le CDC aux États-Unis a signalé une épidémie survenant dans un contexte de lymphopénie sanguine chez des homosexuels ou héroïnomanes. Le sida a été alors défini sur la base de ces observations. Le VIH a été identifié en 1983 et, jusqu’en 1996, la pneumocystose en France a été étroitement liée à la pandémie de cette infection virale. La PPC représentait la plus fréquente des infections opportunistes classant les patients infectés par le VIH au stade de sida, soit 25 % à 30 % des cas. Elle est encore aujourd’hui la première infection opportuniste dans ce contexte en France métropolitaine, malgré la diminution globale de l’incidence du sida depuis la disponibilité des traitements antirétroviraux. La pneumocystose concerne également les patients présentant d’autres déficits immunitaires en rapport avec des traitements cytostatiques et immunomodulateurs pour des cancers, des greffes de cellules souches hématopoïétiques, des transplantations d’organes, ou en rapport avec des maladies de système.

1  -  Épidémiologie

1 . 1  -  Agent pathogène

Différentes espèces du genre Pneumocystis sont retrouvées chez les mammifères, P. jirovecii étant l’espèce inféodée à l’Homme. On décrit deux formes de cet ascomycète et des formes de transition :

  • les asques (kystes) matures, qui sont ovoïdes ou sphériques et mesurent 4 μm à 7 μm de diamètre ; les asques vides ont une forme de ballon dégonflé caractéristique ;
  • les formes trophiques ou trophozoïtes (équivalents des spores), qui sont très variables en forme et en taille (environ 2 μm). Ils sont mononucléés et amiboïdes et sont munis d’élongations, dénommées les filopodes, visibles en microscopie électronique, et qui leur permettent de s’arrimer très étroitement aux cellules épithéliales pulmonaires de type I où ils se multiplient activement. C’est à partir des grandes formes trophiques que se forment les asques ;

1 . 2  -  Cycle

Le cycle de P. jirovecii n’est pas complètement élucidé (figure 31.1). Les stades connus sont extracellulaires et retrouvés essentiellement dans l’alvéole pulmonaire de l’Homme, plus rarement dans d’autres organes dans un contexte d’infection extrapulmonaire. La contamination par voie aérienne a été démontrée chez des modèles murins. Ce mode d’acquisition est admis pour P. jirovecii chez l’Homme, mais les stades inhalés infectants restent inconnus. Les asques contiennent huit ascospores qui, après libération et selon un cycle hypothétique, donneront des petites formes trophiques puis des plus grandes formes trophiques polymorphes. Les formes trophiques par conjugaison donneront de nouveaux asques qui, après maturation, libéreront de nouvelles ascospores.

Fig. 31.1 Cycle hypothétique de Pneumocystis jirovecii dans l’alvéole pulmonaire
Fig. 31.1 Cycle hypothétique de Pneumocystis jirovecii dans l’alvéole pulmonaire.

1 . 3  -  Modes de transmission

L’ancien concept de réactivation de formes quiescentes portées de façon chronique depuis l’enfance pour expliquer la survenue de la PPC en cas d’immunodépression est actuellement récusé. En fait, la pneumonie à Pneumocystis résulte soit de l’acquisition de novo de P. jirovecii à partir d’une source extérieure, soit de l’aggravation d’un état de colonisation pulmonaire par P. jirovecii qui correspond alors à la phase d’incubation de l’infection. Aucun réservoir environnemental pour aucune espèce de Pneumocystis n’a été à ce jour caractérisé. Dans ce contexte, la spécificité des espèces de Pneumocystis pour leur mammifère hôte permet d’écarter un réservoir animal pour P. jirovecii et de retenir un réservoir strictement humain. Les sources de P. jirovecii sont représentées par les populations humaines infectées elles-mêmes. Celles-ci comportent les patients développant une pneumonie à Pneumocystis ainsi que les sujets transitoirement colonisés par le champignon. De plus, la transmission interindividuelle de P. jirovecii par voie aérienne est désormais admise chez l’Homme. Elle peut être à l’origine de « cas groupés » ou d’épidémies dans les services hospitaliers accueillant des patients immunodéprimés (transplantés rénaux).

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