3  -  Relation hôte-parasite et pathogénicité

3 . 1  -  Relation hôte-parasite

Le conflit plus ou moins pathogène entre le parasite et son hôte peut, cliniquement et biologiquement, s’étendre du portage asymptomatique à la maladie aiguë ou chronique. L’équilibre nécessaire à la survie du parasite et de l’hôte est fragile et cette « paix armée », définie par E. Sergent (à propos du paludisme), dans la relation entre le parasite et son hôte dépend de facteurs propres aux parasites et de ceux résultant des défenses de l’hôte. L’hôte parasité va réagir par des mécanismes de défense aspécifiques (réactions inflammatoires, allergiques…) et des réponses spécifiques (réactions immunes humorale et cellulaire dirigées contre une forme parasitaire ou le parasite dans son ensemble). Les parasites sont diversement virulents et la pathogénicité reste en partie liée à la charge parasitaire et à la capacité des parasites à contourner les défenses de l’hôte.
La spécificité parasitaire est le résultat dans le temps d’une adaptation du parasite aux conditions de vie dans son hôte : un parasite d’origine animale récemment introduit chez l’Homme, peu adapté et peu spécifique, entraîne généralement une maladie bruyante et grave, alors qu’un parasite anciennement adapté à l’Homme, donc plus spécifique, engendre le plus souvent une maladie mieux supportée, chronique et tenace.
La symptomatologie est également en rapport avec la localisation des parasites : les ectoparasites sont relativement bien supportés, les parasites du tube digestif le sont moins, les parasites des tissus différenciés sont souvent gravement pathogènes, en particulier lorsqu’ils sont intracellulaires.

3 . 2  -  Mode d’action des parasites

3 . 2 . 1  -  Action spoliatrice

Le parasite vivant aux dépens de son hôte est spoliateur par définition. Les spoliations souvent mineures s’expriment davantage si les parasites sont nombreux (anémie ankylostomienne). La perte sanguine est le résultat d’une hématophagie et de gaspillage par micro-hémorragies (ankylostomes hématophages broutant la muqueuse duodénale), d’hémolyse (hématozoaires du paludisme). L’atteinte hématologique peut être aussi arégénérative centrale (pancytopénie des leishmanioses viscérales). La spoliation en nutriments intestinaux est rarement en cause.

3 . 2 . 2  -  Action mécanique, traumatique

Elle est fréquente, fonction de la taille et du nombre des parasites, de leur localisation et de leurs éventuelles migrations ectopiques. Elle peut être microscopique (éclatement de leucocytes pour les leishmanies et d’hématies dans le cas des Plasmodium) ou macroscopique, bruyante, comme les occlusions lymphatique (filariose lymphatique), biliaire (douves) ou intestinale (paquet d’ascaris), la migration ectopique, la perforation ou l’agression par un ver, ou encore la compression (kyste hydatique). Tout parasite perforant une muqueuse ou le revêtement cutané peut constituer une porte d’entrée microbienne pouvant générer des septicémies.

3 . 2 . 3  -  Action irritative

Elle peut être réflexe : spasmes intestinaux de l’intestin agressé, diarrhées (tænia, ascaris), épisodes de toux au passage pulmonaire de formes vermineuses larvaires…

3 . 2 . 4  -  Action toxique

Elle est due à l’émission de produits d’excrétion-sécrétion toxiques d’arthropodes dans les plaies de piqûre ou de produits métabolisés par le parasite et qui ont des actions allergisantes, voire anaphylactiques (fissuration de kyste hydatique), histolytiques (amibes), pyrogènes (paludisme) ou nécrotiques (tiques). L’action toxique est souvent majorée à la mort du parasite, suite à un traumatisme ou au cours du traitement (lyse sous thérapeutique des microfilaires).

3 . 2 . 5  -  Action favorisante d’infection

C’est la coexistence entre un parasite et une bactérie, comme dans le couple schistosomes-salmonelles où la salmonelle enchâssée à la surface du schistosome échappe à la thérapeutique curative complète. Cette coexistence est plus discutable dans la relation entre l’appendicite et l’oxyure.

3 . 2 . 6  -  Notion de complexe pathogène

Ces modes d’action, souvent multiples et plus ou moins spécifiques d’un parasite, se mêlent à ceux d’autres agents infectieux parasitaires, bactériens ou viraux sur un terrain nutritionnel déficient, propre aux pays en voie de développement (anémie : paludisme + ankylostomose + carence d’apport en fer et en folates).

3 . 3  -  Réactions excessives de l’hôte

Certaines réactions excessives de l’hôte à l’infestation parasitaire peuvent être pathogènes. Il peut s’agir de processus cellulaires, tissulaires et immunopathologiques :

  • hyperéosinophilies élevées et prolongées (loaose, toxocarose…), générant des lésions tissulaires (cœur, cerveau, poumon, rein) ;
  • anémie majorée, dans le cas du paludisme, par la séquestration splénique d’hématies non parasitées ; granulomes : réactions inflammatoires excessives autour d’un œuf (schistosomoses) modifiant les fonctions tissulaires et, dans certains cas, implication dans des phénomènes de cancérisation (schistosomose urinaire et cancer de la vessie) ;
  • développement sclérofibreux excessif (éléphantiasis des filarioses lymphatiques) ; implication des complexes immuns (néphropathies du paludisme, de la loaose, choriorétinite de l’onchocercose…).

4 . 4  -  Facilitation parasitaire et échappement

Le parasite coévoluant avec son hôte s’organise pour assurer sa survie (adaptation) par différents moyens : une très forte fécondité comme dans le cas des tæniasis (T. saginata peut produire plus de cent millions d’œufs par an !), la polyembryonie au stade larvaire (rédies des schistosomes dans le mollusque), une résistance particulière au milieu extérieur (l’œuf d’ascaris peut survivre plusieurs années), une longévité du parasite (plus de dix ans pour P. malariae, l’anguillule, les schistosomes ou les filaires) et des adaptations du parasite (mimétisme moléculaire chez les schistosomes, variation antigénique des trypanosomes, enkystement des larves de trichine dans la fibre musculaire).

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