Poux, puces, punaises et tiques sont des ectoparasites hématophages. Ils provoquent des lésions plus ou moins typiques et de gravité généralement modérée. Certains sont vecteurs de maladies virales, bactériennes ou parasitaires pouvant être sévères.

1  -  Épidémiologie

1 . 1  -  Poux

Les poux sont des insectes au corps aplati dorsoventralement. Leur couleur à jeun varie en fonction de leur hôte habituel, allant du jaune très clair chez les sujets blonds, au noir chez les sujets très bruns. Gorgés de sang, ils deviennent brun-rouge. Ils sont cosmopolites. On distingue trois formes cliniques dues à des parasites spécifiques de l’Homme :

la pédiculose à Pediculus capitis, ou pou de tête (figure 23.1), ectoparasitose bénigne, très fréquente en France, notamment dans les collectivités d’enfants jeunes ;

la pédiculose à Pediculus humanus, ou pou de corps. Cette pédiculose, devenue rare en France, ne touche plus que les personnes à hygiène défectueuse, principalement les « sans domicile fixe ». Les poux de corps peuvent transmettre le typhus exanthématique (dû à Rickettsia prowazekii), la fièvre récurrente à poux (due à Borrelia recurrentis) et la fièvre des tranchées (due à Bartonella quintana) ;

la pthirose, ou « pédiculose » à Pthirus pubis, communément dénommée morpion, est bénigne et plus rare (figure 23.2), il s’agit d’une infection sexuellement transmissible (IST)  (vidéo 8).

Fig. 23.1 Pediculus capitis, adultes femelle (gauche) et mâle (droite)
Fig. 23.1 Pediculus capitis, adultes femelle (gauche) et mâle (droite).
Fig. 23.2 Pthirus pubis (morpion), adulte
Fig. 23.2 Pthirus pubis (morpion), adulte

Poux de tête et poux de corps sont morphologiquement très voisins, les poux de corps étant généralement plus grands (2,5 mm à 3,5 mm) que les poux de tête (2 mm à 3 mm).

Le morpion se distingue des deux précédents par sa taille plus petite, moins de 2 mm, par sa forme plus trapue et par ses deuxième et troisième paires de pattes plus larges et plus puissantes que la première.

Chez les trois espèces, la femelle est légèrement plus grande que le mâle. Les poux ne sautent pas et ne volent pas. Chacune de leurs pattes se termine par une griffe qui se replie sur le tarse pour former une pince puissante avec laquelle ils s’accrochent solidement aux cheveux, aux fibres des vêtements, aux cils ou aux poils.

Les poux vivent 1 à 2 mois. Ils se nourrissent du sang de leurs hôtes qu’ils piquent deux à quatre fois par jour. Ils s’accouplent plusieurs fois au cours de leur vie et la femelle fécondée pond cinq à dix œufs par jour pendant 1 mois, sauf pour Pthirus pubis qui ne pond pas plus de trois œufs par jour. Ces œufs, nommés lentes, mesurent près de 1 mm ; à leur ponte, ils sont collés aux cheveux (Pediculus capitis) (figure 23.3), très près du cuir chevelu, aux fibres textiles (Pediculus humanus) ou aux poils ou cils (Pthirus pubis) grâce à une substance produite par la femelle, dénommée cément, qui durcit au contact de l’air et fixe solidement l’œuf sur son support (figure 23.4). L’éclosion survient au bout d’une semaine, donnant naissance à une larve. Cette dernière ressemble à l’adulte en plus petit et mesure environ 1 mm.

Fig. 23.3 Pediculus capitis et son œuf
Fig. 23.3 Pediculus capitis et son œuf.
Fig. 23.4 Lente de Pediculus capitis (MEB ; × 150)
Fig. 23.4 Lente de Pediculus capitis (MEB ; × 150).

Le stade adulte est atteint en 12 à 15 jours (après trois mues et un stade nymphal). Il se passe ainsi 18 à 20 jours depuis la ponte de l’œuf jusqu’à l’apparition de l’adulte.

Pediculus capitis ne vit que sur le cuir chevelu humain où il se cache entre les cheveux. Hors de ce milieu et sans repas sanguin, il meurt en 1 à 2 jours. La transmission d’un sujet à l’autre a lieu lors d’un contact direct, cheveux contre cheveux. Elle est possible par l’intermédiaire de brosses à cheveux ou de peignes. Lors d’une infestation massive (plusieurs centaines de poux sur une tête), les parasites peuvent quitter le cuir chevelu et se retrouver sur le col des vêtements, les écharpes, voire sur l’oreiller : dans ces conditions, ces objets deviennent temporairement contaminants.

Pediculus humanus vit à la face interne des vêtements et ne va sur la peau que pour se nourrir. Dans les vêtements ou dans la literie, il peut survivre sans se nourrir pendant 2 à 3 jours. Ce sont donc les vêtements ou la literie contaminés qui assurent essentiellement la transmission des poux de corps.

Pthirus pubis vit accroché aux poils du pubis, il se retrouve parfois au niveau des poils sous-axillaires, de la barbe, des sourcils, des cils et, chez l’enfant, éventuellement au niveau des cheveux. La transmission d’un sujet à l’autre est directe, lors d’un contact. La pthirose est considérée comme une infection sexuellement transmissible.

1 . 2  -  Puces

Les puces sont des insectes de l’ordre des Siphonaptères, de petite taille (1 mm à 8 mm) et à corps aplati latéro-latéralement (figure 23.5). La tête porte des antennes courtes. La troisième paire de pattes est adaptée au saut. On distingue plus de 3 000 espèces dont Pulex irritans, Xenopsylla cheopis (puce du rat), Ctenocephalides felis (puce du chat), C. canis (puce du chien) vivant au voisinage de l’Homme.

Fig. 23.5 Puce adulte mâle (Xenopsylla)
Fig. 23.5 Puce adulte mâle (Xenopsylla).

Les puces, hématophages uniquement à l’état adulte, vivent aux dépens des mammifères et des oiseaux. Certaines peuvent transmettre le bacille de la peste (Yersinia pestis), des rickettsies (en particulier Rickettsia mooseri, agent du typhus murin), des bartonelles, et jouer le rôle d’hôte intermédiaire de certains cestodes (Hymenolepis…).

Une autre espèce (Tunga penetrans) peut entraîner une tungose (cf. chapitre 25).

Les larves vivent et se nourrissent sur le sol et donnent des nymphes immobiles d’où émergent des adultes 8 à 10 jours plus tard (figure 23.6). Une diapause peut s’établir à l’état nymphal en cas d’absence d’hôtes (maison inoccupée). Divers stimulus déclenchent la sortie de l’insecte (ébranlement du sol, de l’air, lumière, chaleur…), ce qui explique les invasions domiciliaires de puces dénommées parfois « puces de parquet ».

Fig. 23.6 Cycle évolutif des puces
Fig. 23.6 Cycle évolutif des puces

1 . 3  -  Punaises

Les punaises sont des insectes pour la plupart parasites de plantes, mais deux familles sont hématophages à tous leurs stades d’évolution (Réduvidés et Cimicidés) et peuvent se nourrir aux dépens de l’Homme.

Les Réduvidés comportent des espèces de grande taille (2 cm à 3 cm pour les adultes de Triatoma ou de Rhodnius), à corps et tête allongés. Les ailes sont généralement fonctionnelles. En Amérique du Sud, elles peuvent transmettre à l’Homme, via leurs déjections, la maladie de Chagas, ou trypanosomose américaine (cf. chapitre 9).

Les Cimicidés sont des insectes lenticulaires, plats, de 3 mm à 5 mm, de couleur jaune à brun-roux. Cimex lectularius et Cimex hemipterus, ou punaises des lits, sont reconnaissables à leur « col Médicis » dû à une échancrure du bord antérieur du thorax où se loge la tête (figure 23.7). Le thorax porte la base de la première paire d’ailes, non fonctionnelles. Elles n’ont aucun rôle vecteur. On assiste actuellement à une recrudescence des invasions domiciliaires dont le diagnostic peut être fait en inspectant la literie à la recherche des déjections des punaises (figure 23.8).

Fig. 23.7 Punaise de lit adulte femelle (Cimex lectularius)
Fig. 23.7 Punaise de lit adulte femelle (Cimex lectularius).
Fig. 23.8 Aspect typique des déjections de punaises sur un matelas
Fig. 23.8 Aspect typique des déjections de punaises sur un matelas

Les punaises hématophages vivent au voisinage de leur hôte : gîtes d’animaux ou habitations humaines. Elles sont actives la nuit et leur repas est très rapide. La piqûre est indolore, rapidement prurigineuse pouvant entraîner des réactions inflammatoires importantes (figure 23.9). Elles dégagent souvent une odeur sui generis désagréable, surtout quand elles pullulent.

Fig. 23.9 Réaction érythémateuse après piqûres de punaises des lits
Fig. 23.9 Réaction érythémateuse après piqûres de punaises des lits.

1 . 4  -  Tiques

Les tiques sont des parasites hématophages à tous les stades de leur évolution mais dont la plus grande partie de l’existence se passe à l’état libre. Acariens de grande taille (de 1 mm pour les larves hexapodes à 1 cm ou plus pour les adultes octopodes gorgés), au corps globuleux et sans segmentation extérieure, elles possèdent un rostre, appareil de fixation sur la peau et permettant la nutrition.

Il existe deux familles à biologie bien distincte : Ixodidae et Argasidae.

Chez les Ixodidae, le rostre est antéroterminal et la face dorsale du corps porte un écusson ou bouclier rigide, d’où le nom de tiques dures (figure 23.10). Cette famille représente environ 800 espèces de distribution mondiale appartenant à divers genres : Ixodes, Rhipicephalus, Dermacentor, Haemaphysalis, Hyalomma

Fig. 23.10 Tique adulte mâle du genre Dermacentor
Fig. 23.10 Tique adulte mâle du genre Dermacentor.

Dans le genre Ixodes, la femelle dépose de 1 000 à 20 000 œufs et meurt après la ponte. De l’œuf sort une larve hexapode qui se gorge de sang sur un animal pendant 8 jours, tombe sur le sol et se métamorphose en nymphe en quelques semaines. Celle-ci se gorge à son tour en 8 jours, tombe au sol et se transforme en adulte en quelques mois. Celui-ci cherche un troisième hôte, pour se nourrir en 8 jours. Les Ixodes doivent donc trouver trois hôtes successifs pour assurer leur développement. Certaines espèces, exophiles, chassent à l’affût sur les végétaux comme Ixodes ricinus, espèce des forêts des zones tempérées, fréquente en France et pouvant transmettre entre autres la borréliose de Lyme, l’encéphalite à tique, la babésiose (figure 23.11).

Fig. 23.11 Ixodes ricinus, à l’affût
Fig. 23.11 Ixodes ricinus, à l’affût. La première paire de pattes, ici dressées, est munie d’un organe sensoriel.

Chez les Argasidae, le rostre est ventral, la face dorsale est dépourvue d’écusson, d’où le nom de tiques molles (figure 23.12). Cette famille représente 160 espèces de distribution mondiale réparties en deux genres principaux Ornithodoros et Argas.

Fig. 23.12 Tique adulte femelle du genre Ornithodoros (O. savignyi)
Fig. 23.12 Tique adulte femelle du genre Ornithodoros (O. savignyi).

Ce sont des parasites temporaires, le plus souvent endophiles ou se cachant dans des petites cavités naturelles (roches, sol, terriers, écorces). Ils se caractérisent également par une très grande sédentarité qui aboutit à des générations successives dans le même microhabitat, expliquant la répartition en foyers des maladies qu’elles transmettent. La femelle pond de 20 à 200 œufs après chaque repas sanguin et vit plusieurs années. Les larves hexapodes restent fixées sur l’hôte de 2 à 5 jours puis, repues, elles se laissent tomber dans le biotope (nid, terrier…) de l’hôte et se transforment en nymphes. Il y aura plusieurs stades nymphaux (un après chaque repas sanguin) avant l’émergence des adultes. Nymphes et adultes se nourrissent en quelques minutes.

Les tiques ont une importance considérable en pathologie humaine et vétérinaire. En effet, en dehors de l’action neurotrope voire paralysante de la salive élaborée par une femelle gravide, elles ont un rôle de réservoir et de vecteur de nombreuses maladies virales (arboviroses), bactériennes (borrélioses, rickettsioses, ehrlichioses) et parasitaires (babésioses, filarioses). La plupart des germes sont à transmission trans-stadiale, voire trans-ovarienne, ce qui permet leur pérennité à l’intérieur d’une population de tiques et le caractère parfois focal des maladies transmises.

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