5 . 2 . 3  -  Bilan audiologique

5 . 2 . 3 . 1  -  Tests de dépistage


Ils peuvent être utilisés par tout médecin (généraliste, pédiatre, PMI, ORL…). Les trois certificats obligatoires du carnet de santé (circulaire ministérielle de 1977) à la naissance, au 9e mois et au 24e mois comportent une rubrique sur l’état de l’audition. L’incidence de la surdité profonde à la naissance est de 1,3 %.
Un enfant entendant à la naissance peut devenir malentendant. Cette notion d’évolutivité plaide à la fois pour le dépistage néonatal et au cours des premières années.
Les tests de dépistage sont réalisés :

  • à la naissance, le dépistage est réalisé en période néonatale et il fait appel à deux techniques d’audiométrie objective :
    • otoémissions acoustiques (5 % de faux positifs),
    • PEA automatisés (1 % de faux positifs),
    • le dépistage systématique effectué dans les milieux à haut risque de surdité (services de néonatologie…) peut faire appel à l’observation des réponses réflexes à une stimulation sonore par générateur de bruit calibré, de 60 à 100 dB, et aux PEA ;
  • vers 4 mois (examen non obligatoire) : c’est l’étude des réactions auditives aux bruits familiers : voix de la mère, biberon, porte… ;
  • au 9e mois : on utilise les bruits familiers et les jouets sonores divers, calibrés en fréquence et en intensité ;
  • au 24e mois : la voix chuchotée, la voix haute, les jouets sonores sont les stimuli les plus souvent utilisés ;
  • à l’entrée à l’école vers 6 ans : les surdités sévères ou profondes ont en général été dépistées. L’audiogramme du médecin scolaire peut révéler une hypoacousie légère ou moyenne.

5 . 2 . 3 . 2  -  Mesure de l’audition de l'enfant


Elle est faite par le médecin spécialiste ORL.

À tout âge et dès la naissance

L’audiométrie objective fait actuellement appel à l’enregistrement des potentiels évoqués auditifs (PEA) et des OEAP (otoémissions acoustiques provoquées). Elle permet de fixer le niveau de la surdité à 10 dB près (mais sur les fréquences aiguës seulement).

Entre 3 mois et 5 ans
On peut utiliser l’audiométrie par réflexe conditionné, réalisée par des médecins ORL. Elle repose sur l’établissement d’un réflexe conditionné dont le stimulus est un son qui provoque après apprentissage :

  • un geste automatico-réflexe (l’enfant tourne la tête vers la source sonore : réflexe d’orientation conditionné ou ROC) ;
  • ou un geste volontaire à but ludique (l’enfant appuie sur un bouton faisant apparaître des images amusantes [peep-show] ou mettant en marche un train jouet [train-show]) ;
  • ces gestes indiquent à l’observateur que l’enfant a perçu le son ;
  • lorsque le conditionnement est établi, il est ainsi possible, en diminuant progressivement l’intensité sonore de déterminer fréquence par fréquence le seuil auditif, donc d’établir un audiogramme précis à 10-15 dB près.

À partir de 5 ans (niveau du développement psychomoteur de l’enfant)
Les techniques d’audiométrie tonale subjective de l’adulte peuvent être utilisées.

5 . 2 . 4  -  Bilan orthophonique et examen psychologique avec détermination du QI


Ils sont indispensables pour compléter le bilan d’une surdité de l’enfant.

Remarque
Le diagnostic d’une surdité de l’enfant est souvent difficile.
Il ne faut pas méconnaître une surdité devant tout signe d’appel (retard de langage ou de parole, retard scolaire ou troubles du comportement).

Diagnostic différentiel
: a contrario, il ne faut pas prendre pour une surdité toute absence ou retard de langage, car les causes d’origine extra-auditive sont :

  • autisme, troubles envahissant du développement ;
  • troubles neurologiques, dysphasies ;
  • retard psychomoteur.

L’examen audiométrique objectif reste la clé du diagnostic dans les cas douteux.

5 . 3  -  Causes des surdités de l’enfant

5 . 3 . 1  -  Surdités d’origine génétique (50 à 60 % des cas)

5 . 3 . 1 . 1  -  Surdités de transmission


Surdités moyennes (toujours moins de 60 dB de perte), elles sont compatibles avec une acquisition spontanée du langage, qui est cependant plus ou moins perturbée, lorsqu’elles sont bilatérales.
Les aplasies de l’oreille externe et/ou moyenne par malformation de la 1re fente et du 1er arc branchial sont uni- ou bilatérales :

  • isolées ;
  • ou associées à d’autres malformations du premier arc (exemple : syndromes otomandibulaires).

La maladie de Lobstein (maladie des os de verre) associe à la surdité une fragilité osseuse, des sclérotiques bleues, une hyperlaxité ligamentaire.

5 . 3 . 1 . 2  -  Surdités de perception


Unilatérales, elles n’ont pas de conséquence majeure sur le développement du langage ou sur le plan social ; elles sont souvent de découverte fortuite.
Bilatérales, elles se répartissent en :

  • surdités isolées (non syndromiques), non évolutives, génétiques, en général récessives, constituant 60 % des surdités sévères ou profondes de l’enfant (la mutation la plus fréquemment retrouvée concerne le gène codant pour la connexine 26) ;
  • surdités associées (syndromiques) à d’autres malformations réalisant de nombreux, mais très rares syndromes plus ou moins complexes ;
  • Exemples :
    • syndrome d’Usher : rétinite pigmentaire,
    • syndrome de Wardenburg : mèche blanche, hétérochromie irienne,
    • syndrome de Pendred : goitre avec hypothyroïdie,
    • syndrome d’Alport : insuffisance rénale,
    • syndrome de Jerwell-Lange-Nielsen : altérations cardiaques (troubles ECG : QT long) ; risque de mort subite,
    • mucopolysaccharidoses (thésaurismoses) : maladie de Hurler (gargoïlisme), maladie de Morquio.

5 . 3 . 2  -  Surdités acquises (40 à 50 % des cas)


Elles peuvent être congénitales ou post-natales.

5 . 3 . 2 . 1  -  Prénatales


Les embryopathies et les fÅ“topathies constituent près de 15 % des surdités bilatérales sévères ou profondes.

  • TORCH syndrome :
    • Toxoplasmose ;
    • O pour « Others » (syphilis, HIV) ;
    • Rubéole ;
    • CMV ;
    • Herpès.
  • Les atteintes toxiques : aminosides donnés à la mère, certains médicaments tératogènes (thalidomide).

5 . 3 . 2 . 2  -  Néonatales


Quinze pour cent des surdités sévères ou profondes sont dues à/au :

  • traumatisme obstétrical ;
  • l’anoxie néonatale ;
  • la prématurité ;
  • l’incompatibilité Rhésus (ictère nucléaire) entraînant des lésions de l’oreille interne et/ou des centres nerveux auditifs.

5 . 3 . 2 . 3  -  Post-natales


Elles sont classiques chez l’adulte, notamment :

  • traumatiques ;
  • toxiques ;
  • infectieuses générales (méningite) ou locales (otites), particulièrement l’otite séromuqueuse à tympan fermé, responsable de nombreuses hypoacousies légères ou moyennes de l’âge préscolaire ou scolaire.

5 . 4  -  Prise en charge de l’enfant sourd

5 . 4 . 1  -  Surdités de transmission


Elles peuvent bénéficier d’un traitement médical ou chirurgical.

5 . 4 . 2  -  Surdités de perception


Toutes les surdités de perception moyennes à profondes doivent être appareillées précocement. Une prise en charge orthophonique y est associée systématiquement : acquisition et correction du langage parlé (ancienne « démutisation »). Les résultats thérapeutiques seront d’autant meilleurs que :

  • la surdité est moins profonde ;
  • la rééducation est plus précoce ;
  • les possibilités intellectuelles (QI) sont plus grandes ;
  • l’enfant est bien entouré par le milieu familial.

En cas de surdité de perception bilatérale sévère ou profonde avec des résultats prothétiques insuffisants, il faut envisager la mise en place d’un implant cochléaire (prothèse électronique avec électrodes de stimulation implantées dans la cochlée).
L’apprentissage du langage oral par des méthodes fait essentiellement appel :

  • aux perceptions auditives restantes ou par l’appareillage ;
  • et à un soutien visuel adapté (lecture labiale, langage parlé complété).

La langue des signes est proposée en cas de surdité profonde bilatérale sans espoir de réhabilitation auditive efficace par des prothèses adaptées : acoustique ou implant cochléaire.
La rééducation de début précoce associe médecin ORL, pédiatre, pédopsychiatre, pédagogue, orthophoniste, audioprothésiste.
Cette équipe se charge autant de l’accompagnement parental que de l’enfant sourd jusqu’à l’adolescence, afin de maintenir idéalement l’enfant dans son milieu familial, puis en milieu scolaire normo-entendant. Ceci est maintenant possible même pour les sourds profonds grâce à l’implant cochléaire.
Parfois, selon l’environnement, l’existence d’un handicap associé majeur ou l’absence d’un soutien familial efficace impose le placement de l’enfant dans un institut spécialisé (en général à partir de 3 ans).

8/10