2  -  Les allergènes

Les allergènes sont des antigènes qui entraînent la production d'IgE chez les individus génétiquement prédisposés.

Les allergènes sont nommés selon une nomenclature précise. Les 3 premières lettres indiquent le genre (ex : Fel pour Felis : chat) (la quatrième lettre indique l'espèce (ex d pour domesticus) suivie d'un numéro de purification (ex : Fel d 1).

Il s'agit le plus souvent de protéines et principalement de protéines très conservées au cours de l'évolution des espèces, comme les protéines enzymatiques.

Les allergènes sont classés en 5 grandes catégories :

  • les pneumallergènes (inhalés),
  • les trophallergènes (ingérés),
  • les allergènes transcutanés,
  • les allergènes médicamenteux,
  • les allergènes professionnels,
  • les venins.


Les allergènes les plus souvent en cause sont ceux :

  • des pollens, dont ceux des graminées, des herbacées et des arbres (en particulier bouleau, frêne, au nord, olivier, cyprès, au sud),
  • des acariens, dont les Dermatophagoïdes (Der p),
  • des animaux domestiques dont le chat (Fel d), le chien, le cheval,
  • du lait, de l'œuf, de l'arachide, des fruits exotiques,
  • des venins d'hyménoptères (abeille, guêpe, frelon).

2 . 1  -  Les pneumallergènes (inhalés)

Ils sont responsables de manifestations allergiques ORL (rhinite), pulmonaires (asthme, alvéolite) et de conjonctivites. Les pneumallergènes de grandes tailles (>10µ) provoquent rhinites et conjonctivites. Les pneumallergènes de taille inférieure à 10µ peuvent être responsables d'asthme. Seuls les pneumallergènes de taille inférieure à 4µ peuvent atteindre les alvéoles (alvéolites allergiques).

Les pneumallergènes sont soit saisonniers soit péri-annuels.

Les pneumallergènes saisonniers les plus fréquents sont les pollens :

  • de graminées (ivraie, phléole, dactyle) de l'été à l'automne,
  • d'arbres (bouleau, aulne, chêne) de l'hiver au printemps,
  • d'herbacés (ambroisies) au printemps.


Les calendriers polliniques varient d'une région à l'autre et d'une saison à l'autre. Ils sont facilement accessibles (minitel ou internet). Les malades peuvent ainsi prendre des mesures préventives. Ces calendriers sont également d'une aide précieuse pour les médecins (recherche de l'allergène responsable de manifestations allergiques, conseils au patient).

Les pneumallergènes péri-annuels les plus fréquents sont :

  • les acariens (Dermatophagoïdes pteronissinus),
  • les pneumallergènes d'animaux domestiques dont principalement les chats,
  • les pneumallergènes commensaux dont les pneumallergènes de bactéries, de champignons opportunistes (Aspergillus) et non opportunistes (Trichophyton). Les trichophytons semblent avoir une pénétration transcutanée plutôt que par inhalation.

2 . 2  -  Les trophallergènes (ingérés)

L'allergie alimentaire est le premier événement pathologique allergique qui apparaît chez le sujet atopique. La sensibilisation survient dans les premiers mois de la vie.

L'allaitement maternel ne semble pas modifier le futur de l'enfant atopique, en termes de survenue des manifestations cliniques. Tout au plus, la dermatite atopique surviendrait plus tard ; cependant on sait maintenant que les allergènes peuvent passer parfois la barrière placentaire et être ingérés avec le lait de la mère. Le régime alimentaire de la femme allaitante n'a pas d'influence significative sur la survenue des maladies allergiques chez l'enfant, ou au prix d'efforts très importants, pour un bénéfice modeste et limité aux atteintes cutanées. Chez le nourrisson aux antécédents atopiques familiaux, il est conseillé de ne pas diversifier trop tôt l'alimentation.

Les allergies alimentaires de mécanisme IgE-dépendant sont rares chez l'adulte (moins de 2 % des adultes dans la population générale) mais fréquentes chez l'enfant (10 % de enfants, voire davantage).
La prévalence de l'allergie alimentaire reste mal connue, présente chez 30-50 % des enfants atteints de dermatite atopique, 20 % des adultes allergiques, 2-8 % des asthmes et 10 % des chocs anaphylactiques. Des variations sont notées d'un pays à l'autre avec une origine alimentaire dans 40 % des chocs anaphylactiques aux USA.

Chez l'adulte, les allergènes alimentaires les plus fréquents sont d'origine animales (poisson de mer, crustacés, moules, huîtres), d'origine végétales (farines, cacahuètes, noix, amandes). Les drupacées (pomme, pêche, abricot), les ombellifères (carotte, céleri), les œufs, les crustacés, les poissons et le lait seraient responsables de 55 % des allergies alimentaires, 17 % seraient dues au farine de blé, aux légumineuses, à la banane, à l'avocat et au kiwi. Chez l'adulte, chacun des autres allergènes est responsable de moins de 2 % d'allergie (arachide, bœuf…). Ils sont responsables de manifestations digestives (5 % des cas) mais surtout systémiques : cutanéo-muqueuses (80 % des cas), chocs (5 % des cas) ou respiratoires, oculaires ou autre (10 % des cas).

Chez l'enfant, contrairement à l'adulte, les allergènes alimentaires les plus fréquents sont essentiellement les protéines du lait de vache et l'œuf avant l'âge de 1an ; le lait, l'albumine de l'œuf, les farines et l'arachide (cacahuètes) entre 1 an et 5 ans. Les manifestations digestives et cutanées prédominent.


L'allergie aux protéines du lait de vache


Les premiers symptômes apparaissent pendant les 3 premiers mois de la vie. Les manifestations aiguës associent volontiers vomissements et diarrhées, et sont le résultat d'une hypersensibilité immédiate IgE-dépendante. D'autres tableaux à expression digestive prédominante sont caractéristiques : gastroduodénite avec vomissements, hématémèse et stagnation pondérale, et colite avec diarrhée, douleurs et ballonnements abdominaux, et anémie. Le tableau d'entéropathie au lait de vache se caractérise par une atrophie villositaire. Une hypersensibilité retardée de type IV en est responsable. Sa présentation clinique associe diarrhée, ballonnements abdominaux, stagnation pondérale et anémie, conséquence d'une malabsorption digestive chronique et réalise un tableau proche de celui de la maladie cœliaque. On distingue les tableaux de malabsorption chronique (maladie cœliaque), des intolérances au gluten asymptomatiques. C'est souvent chez un nourrisson âgé de 9-18 mois qu'elle est reconnue, avec une diarrhée chronique, une malnutrition, un ballonnement abdominal, précédée d'une cassure de la courbe staturo-pondérale. Des tableaux plus insidieux et tardifs en sont des équivalents à minima avec douleurs abdominales, constipation, anorexie, retard statural.

Une myriade de symptômes extra-digestifs est possiblement associée à une allergie alimentaire, dont un tableau systémique de gravité variable, mais pouvant revêtir celle du choc anaphylactique. Les manifestations cutanées sont fréquentes, avec urticaires, œdème de Quincke ou tableau de dermatite atopique. Des manifestations respiratoires hautes et basses (rhinorrhée, bronchospasme) sont classiques mais plus rares, ainsi qu'une symptomatologie neurologique (irritabilité et insomnie).

Chez l'adulte, les principales manifestations cliniques sont un œdème labio-bucco-pharyngé et un prurit (syndrome oral de Lessof), ou une poussée urticarienne. Le choc anaphylactique ou ses équivalents sont fréquents.

Chez l'enfant comme chez l'adulte, l'allergie « croisée » avec des allergènes inhalés peut être à l'origine de manifestations anaphylactiques chez les patients connus pour être sensibilisés à ces allergènes ; la survenue de ce type d'accident est imprévisible, elle semble plus fréquente chez les patients polysensibilisés ou dont le taux d'IgE spécifique est très élevé. Il existe en effet d'importantes similitudes antigéniques entre des agents de natures différentes : les pollens de bouleau et la pomme ; les pollens de graminées et le céleri, le coriandre, le persil ; le latex et le kiwi, la banane, la noix, la châtaigne, l'avocat ; les acariens et les mollusques (escargots), les blattes et les crustacés (crevettes), par exemple. À côté de ces allergies croisées, les allergènes masqués sont de plus en plus suspectés, notamment dans l'alimentation industrielle, où les constituants protéiques ne sont pas toujours identifiés.

Le diagnostic d'allergie alimentaire est facile en cas de manifestations cliniques évocatrices à type d'urticaire ou de rhinite et/ou conjonctivite survenant précocement (quelques minutes ou dizaine de minutes) après l'exposition à l'allergène, surtout si elles sont associées à un prurit et/ou un œdème des lèvres et du palais (syndrome oral). Le diagnostic est plus difficile en cas de manifestations digestives isolées en particulier chez l'enfant.

Les urticaires sont des manifestations fréquentes dont beaucoup ne donnent pas lieu à une consultation médicale, car les symptômes disparaissent rapidement, et leur étiologie est soit évidente pour le patient ou son entourage (aliment, médicament…), soit reste inexpliquée. Les urticaires alimentaires peuvent être secondaires à une histamino-libération ou être médiée par un mécanisme IgE-dépendant. Les principaux aliments en cause sont ceux contenant les protéines du lait de vache, du soja, de l'arachide, de l'œuf, mais aussi des colorants, des conservateurs. L'origine alimentaire d'une urticaire aiguë, très souvent suspectée et invoquée par le patient lui-même, est souvent évoquée par excès (et par facilité) par le médecin. Elle doit être mise à l'épreuve d'un interrogatoire précis quant aux circonstances de l'apparition de l'urticaire, et en cas de doute, de tests allergologiques.

Les manifestations systémiques sont fréquentes chez l'enfant (urticaire). Elles peuvent être graves (œdème de Quincke) voire mortelles (choc) chez l'adulte. Les manifestations systémiques sévères semblent de plus en plus fréquentes également chez l'enfant (en particulier dans le cadre de l'allergie à l'arachide).

Enfin, il faut reconnaître les réactions dues à des aliments riches en histamine ou histamino-libérateurs (chocolat, fraise…). Dans ce cas, il n'y a pas intervention des IgE, mais un simple passage systémique des médiateurs (l'histamine, en particulier), à partir de la lumière intestinale. Ces manifestations, communes chez l'enfant, disparaissent souvent à l'âge adulte.

2 . 3  -  Les allergènes transcutanés

(Voir Item 114 : dermatite de contact ).

2 . 4  -  Les allergènes médicamenteux

(Rédaction en cours)

2 . 5  -  Les allergènes professionnels

(Rédaction en cours)

2 . 6  -  Les venins d'hyménoptères

Les venins d'hyménoptères (guêpes, abeilles…) sont très allergisants.
Près de 20 % de la population est sensibilisée (présence d'IgE spécifiques sériques), mais tous les sujets sensibilisés ne font pas de manifestations allergiques systémiques.

Les manifestations cliniques sont dominées par le risque de choc surtout chez l'adulte. Les manifestations les plus fréquentes sont :

  • cutanées : érythème associé à un œdème supérieur à 8 cm au point de piqûre survenant 1 à 2 heures après la piqûre. Il atteint son maximum à 24-48 heures et disparaît en une semaine environ. Cette réaction est à distinguer de la réaction non allergique locale au point de piqûre (apparition immédiate, petite taille, disparaissant plus rapidement) ; lorsque la piqûre a atteint un membre, l'atteinte du segment de membre non piqué est un argument en faveur d'une réaction allergique ;
  • systémiques : urticaire, œdème de Quincke, choc anaphylactique.
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