5  -  Énoncer les principes du traitement

5 . 1  -  Traitement antitumoral

5 . 1 . 1  -  Patients concernés

Il est admis que les MM asymptomatiques, à faible tumorale (stade I de Durie et Salmon), ne justifient pas la mise en route immédiate d'une chimiothérapie. Ces patients feront l'objet d'une surveillance clinique et biologique attentive, la chimiothérapie devenant indiquée en cas d'évolutivité vers un MM symptomatique (stade II ou III de Durie et Salmon). Les MM symptomatiques, habituellement stades II ou III de Durie et Salmon, justifient d'emblée la prescription d'une chimiothérapie. L'âge très avancé ne doit pas être en soi un motif d'abstention thérapeutique mais le traitement sera évidemment adapté.

5 . 1 . 2  -  Médicaments

Les médicaments les plus actifs dans le MM sont :
- les alkylants [Melphalan (Alkéran®) ou Cyclophosphamide (Endoxan®)]
- les corticoïdes (Dexaméthasone)
- le thalidomide
- le bortezomib (Velcade®)
- le lénalidomide (Revlimid®)

Il faut y ajouter les bisphosphonates [clodronate, pamidronate, acide zolédronique], indiqués pour traiter les épisodes hypercalcémiques mais également en traitement au long cours, associés à la chimiothérapie, pour réduire l'atteinte osseuse. Certains patients bénéficient, pour prévenir ou traiter l'anémie, d'un traitement par l'érythropoïétine recombinante (époïétine α ou β, darbépoïétine).

5 . 1 . 3  -  Indications thérapeutiques

Schématiquement, les patients les plus jeunes (< ou = 65 ans le plus souvent) font l'objet d'un traitement intensif, reposant sur le melphalan à forte posologie, supporté par une autogreffe de cellules souches du sang périphérique. Les patients les plus âgés reçoivent habituellement une chimiothérapie conventionnelle dont la référence est en 2007 en France l'association melphalan-prednisone-thalidomide.

5 . 2  -  Traitement symptomatique

Il est essentiel et associera de façon variable :

  • Traitement de l'anémie par l'érythropoïétine recombinante ou les transfusions.
  • Traitement des infections par une antibiothérapie précoce, en évitant si possible les antibiotiques néphrotoxiques. Il n'est pas de pratique courante de prévenir les complications infectieuses par la perfusion d'immunoglobulines polyvalentes à forte posologie. La vaccination contre la grippe n'est pas contre-indiquée. Le recours à la vaccination anti-pneumococcique est discuté.
  • Traitement de l'ostéopathie . La chimiothérapie est en fait le plus efficace des traitements antalgiques. L'existence des douleurs osseuses doit faire prescrire des antalgiques en quantité suffisante, débutant par le paracétamol mais en n'hésitant pas à utiliser les morphiniques. La radiothérapie localisée peut être indiquée sur un foyer tumoral particulièrement douloureux ou sur un site douloureux circonscrit, persistant malgré la chimiothérapie. Une lésion lytique à haut risque de fracture, sur un fémur ou un humérus, pourra justifier une chirurgie orthopédique préventive (enclouage centromédullaire), complétée par la radiothérapie localisée.
  • Les épidurites et compressions médullaires sont des urgences. Il faudra faire la part, après l'IRM et un avis neurochirurgical, entre les patients nécessitant une laminectomie décompressive (souvent suivie d'une radiothérapie) et ceux pour lesquels la chirurgie pourra être évitée grâce à la radiothérapie, volontiers associée à la dexaméthasone à forte posologie.
  • Traitement de l'insuffisance rénale . Elle doit être prévenue par le maintien d'une bonne hydratation et le traitement des épisodes de déshydratation. Il faut s'abstenir le plus possible de la prescription de drogues néphrotoxiques, prévenir et traiter les épisodes d'hypercalcémie et les infections urinaires. L'injection de produits de contraste iodés expose au risque d'insuffisance rénale. De rares patients devront avoir recours à l'épuration extra-rénale.
  • Traitement de l'hypercalcémie . Les épisodes hypercalcémiques sont devenus moins fréquents, du fait de l'utilisation large des bisphosphonates. L'hypercalcémie est une urgence thérapeutique dont le traitement repose maintenant sur l'hydradation et les bisphosphonates.
  • Traitement du syndrome d'hyperviscosité par les échanges plasmatiques (plasmaphérèses) et la mise en route rapide du traitement hématologique spécifique.

5 . 3  -  Évolution sous traitement

L'évolution du MM symptomatique ne se conçoit que traitée. La réponse thérapeutique est jugée sur la disparition des signes cliniques et la réduction des anomalies biologiques, en particulier du taux de la protéine monoclonale sérique et/ou urinaire (critère usuel de réponse). La réponse complète se définit par la normalisation de la moelle osseuse et la disparition du composant monoclonal en immunofixation.
Les patients répondeurs atteignent une phase d'indolence de la maladie, dite « phase de plateau », à des niveaux divers de masse tumorale, pendant laquelle la poursuite de la chimiothérapie par les alkylants est inutile, voire préjudiciable (accroissement du risque de syndrome myélodysplasique secondaire). La « phase de plateau » correspond à une diminution de l'activité proliférante de la tumeur. De durée variable (12 à 30 mois pour la première phase de plateau), elle est toujours suivie d'une rechute, justifiant la reprise de la chimiothérapie. Une à quatre rechutes environ sépareront le diagnostic du décès avec, à chaque reprise évolutive, des réponses plus rares (chimiorésistance) et plus courtes, la dégradation de l'état osseux et la multiplication des complications. Le schéma évolutif classique du MM est présenté sur la Figure 9.

Figure 9 : Schéma évolutif classique du MM

Le MM est une affection hétérogène, avec des survies allant de quelques jours à plus de 10 ans. La médiane de survie est en 2007 probablement de 50 à 70 mois, le MM restant une hémopathie presque toujours non-curable. Le terme de guérison peut être avancé avec prudence chez de rares patients ayant reçu une allogreffe de cellules souches hématopoïétiques. Les traitements intensifs les plus récents, utilisés chez des patients n'ayant pas de facteurs pronostiques défavorables au diagnostic, pourraient permettre des survies très prolongées confinant peut-être à la guérison. Les médicaments les plus récemment introduits, thalidomide, bortezomib et lénalidomide participent de façon importante à l'amélioration du pronostic.

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