6  -  Évolution et traitement

6 . 1  -  Évolution générale et pronostic

En l'absence de tout traitement, la leucémie aiguë est mortelle en quelques semaines essentiellement par complications hémorragiques et/ou infectieuses. Ce délai peut cependant être nettement prolongé dans certains cas, par un traitement symptomatique (transfusions et traitement des complications infectieuses). Cette attitude est proposée chez les patients de plus de 75 ans chez qui on ne peut envisager de chimiothérapie du fait de la toxicité.

Le pronostic des LA traitées dépend d'un certain nombre de facteurs, dont les plus significatifs sont l'âge (mauvais pronostic surtout après 60 ans), l'existence ou non de comorbidités, la leucocytose (mauvais pronostic si élevée, le seuil variant suivant les formes), la réponse au traitement initial (l'obtention d'une rémission complète est un facteur majeur), et la cytogénétique. Dans les LAM, cet examen définit trois groupes pronostiques : favorable [t(15;17), t(8;21), inv(16)] ; intermédiaire (dont les LAM avec caryotype normal) ; défavorable (caryotypes complexes, anomalies des chromosomes 5 et 7). Dans les LAL, l'hyperdiploïdie (> 50 chromosomes) a un bon pronostic, l'hypodiploïdie (< 45 chromosomes) et la t(9;22) sont associées à un mauvais pronostic.

Le but du traitement de la leucémie aiguë est double : obtenir une rémission (disparition de la maladie détectable) et éviter les rechutes. Ce traitement repose principalement sur une chimiothérapie intensive, et s'accompagne au moins dans sa phase initiale d'une insuffisance médullaire sévère et prolongée. De plus en plus les stratégies sont adaptées aux facteurs pronostiques.

6 . 2  -  Les moyens

6 . 2 . 1  -  Chimiothérapie

Différents médicaments sont utilisés, toujours associés de façon à bénéficier de différents mécanismes d'action et à empêcher certaines résistances. Les anthracyclines et la cytosine arabinoside sont la base du traitement des LAM. On les utilise aussi dans les LAL, avec d'autres drogues plus spécifiques de cette maladie comme la vincristine, l'asparaginase, le méthotrexate (intraveineux et/ou intrathécal), et les corticoïdes.

6 . 2 . 2  -  Radiothérapie

Elle n'est utilisée que dans deux indications : irradiation prophylactique ou curative des localisations neuroméningées (LAL de l'adulte et leucémies aiguës monoblastiques), et irradiation corporelle totale utilisée en préparation aux greffes de cellules souches hématopoïétiques.

6 . 2 . 3  -  Greffe de cellules-souches hématopoïétiques

Allogénique : les cellules sont prélevées chez un donneur sain, HLA identique, familial ou non. L'allogreffe permet de réaliser une préparation chimio- et/ou radiothérapique à visée cytotoxique, mais elle a également un effet curatif propre du fait de réaction immunitaire anti-leucémique du greffon. Par contre, elle est responsable d'une mortalité toxique élevée (autour de 15 %) et ne peut pas être proposée aux sujets âgés.

Autogreffe : les cellules sont prélevées chez le malade en rémission. Dans ce cas, on ne bénéficie pas d'effet immunitaire anti-leucémique et le seul intérêt de l'autogreffe est de pouvoir réaliser une préparation chimio/radiothérapique intensive.

6 . 2 . 4  -  Thérapeutiques « ciblées »

Dans certaines leucémie, on utilise des agents à visée différenciante (cas de l'acide rétinoïque dans les LAM3) ou bloquant spécifiquement un signal intracellulaire dérégulé (cas des inhibiteurs de tyrosine-kinases dans les proliférations avec chromosome Philadelphie).

6 . 3  -  La conduite du traitement

À l'heure actuelle, ce traitement ne se conçoit que dans des centres spécialisés, et suivant des protocoles précis.

Le traitement se divise en trois grandes phases quelque soit la leucémie :

6 . 3 . 1  -  Induction

Toujours sous forme de chimiothérapie intensive entraînant une aplasie d'au moins 2-3 semaines, elle vise à obtenir un état de rémission c'est-à-dire une disparition de tous signes cliniques et biologiques détectables. En pratique, on parle de rémission complète lorsque la moelle contient moins de 5 % de cellules jeunes en cytologie, et lorsque l'hémogramme est normal. Cette rémission correspond à une diminution suffisante de la masse tumorale au niveau cytologique mais pas à une élimination totale des cellules leucémiques (souvent encore détectable par des techniques sensibles, quand il existe une anomalie spécifique).

6 . 3 . 2  -  Consolidation

Elle cherche à réduire encore le nombre de cellules leucémiques résiduelles. On utilise dans cette phase des traitements intensifs nécessitant de longs séjours à l'hôpital (chimiothérapie, autogreffe, allogreffe). Chez l'adulte, hors formes de bon pronostic, on fait le plus souvent une allogreffe en première rémission alors que chez l'enfant on attend une éventuelle rechute ou on réserve ce traitement à des cas de très mauvais pronostic.

6 . 3 . 3  -  Entretien

Se fait essentiellement dans les LAL et LA promyélocytaires, sur une période d'environ deux ans.

6 . 4  -  Les résultats

6 . 4 . 1  -  Leucémies Aiguës Lymphoblastiques (LAL) de l'enfant

On obtient globalement plus de 90 % de rémission complète, et plus de 70 % de guérison.

6 . 4 . 2  -  Leucémies Aiguës Lymphoblastiques (LAL) de l'adulte

Le taux de rémission complète chez l'adulte jeune est de 80 %, mais les rechutes sont fréquentes avec seulement 20 à 30 % de rémissions persistantes (50 % si on peut faire une allogreffe).

6 . 4 . 3  -  Leucémies Aiguës Myéloïdes (LAM)

On obtient en moyenne 70 % de rémissions complètes (80 % avant 60 ans, 50 % au delà) et 30 à 40 % de rémissions prolongées (50 % si allogreffe, moins de 25 % après 60 ans).

6 . 4 . 4  -  Les rechutes

Elles surviennent le plus souvent dans les deux premières années de rémission. Le taux de nouvelle rémission est plus faible et la durée plus courte que dans la première poussée, sauf en cas d'utilisation de modalités thérapeutiques différentes (par exemple greffe si non utilisée initialement).

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