6  -  Prise en charge thérapeutique d’un trouble de l’érection


Le traitement étiologique d’un TE n’est possible que dans un nombre réduit de cas.

Il s’agit essentiellement :

  • des troubles psychogènes purs (psychothérapie, psychotropes) ;
  • d’une étiologie chirurgicalement curable (pathologie artérielle traumatique) ;
  • ou d’une cause endocrinienne.


Le plus souvent, le TE résulte de facteurs de risque multiples et associés, justifiant leur prise en charge spécifique (modification d’un traitement antihypertenseur, optimisation glycémique, arrêt du tabac, prise en charge psycho-sexologique, etc.).

Nous aborderons ici la prise en charge d’un trouble endocrinien à l’origine d’un TE, et les traitements pharmacologiques d’un TE.

6 . 1  -  Prise en charge d’un trouble endocrinien

Un hypogonadisme sera substitué par des androgènes administrés par voie orale, ou mieux par voie intramusculaire ou transdermique. Précisons que seuls les patients atteints d’un hypogonadisme biologiquement prouvé relèveront sans équivoque d’une substitution androgénique. Il s’agit de patients souffrant d’une baisse de la libido associée au TE et d’une testostéronémie abaissée (testostérone totale < 3 ng/mL).

En revanche, le niveau de preuve de l’efficacité d’un traitement androgénique pour un TE isolé sans hypogonadisme avéré (testostérone libre isolément abaissée et/ou testostérone normale ou discrètement abaissée) reste faible. Le traitement androgénique est contre-indiqué en cas de nodule prostatique palpable, de PSA > 3 ng/mL, ou de signes compressifs, et sa mise en place nécessitera une surveillance clinique régulière du volume prostatique et des PSA. Une surveillance du bilan hépatique et de l’hématocrite devra aussi être réalisée. Les modalités du traitement androgénique sont détaillées dans le chapitre 7 : « Ménopause et andropause ».

L’hypogonadisme secondaire à une hyperprolactinémie sera corrigé le plus souvent grâce au traitement par agoniste dopaminergique (ParlodelÒ, NorprolacÒ, DostinexÒ).

6 . 2  -  Traitements pharmacologiques d’un TE

La prise en charge thérapeutique d’un TE nécessite toujours celle des facteurs de risque de TE (HTA, diabète, dépression, etc.) qui doit précéder ou accompagner l’utilisation d’un traitement pharmacologique du TE. L’obtention chez un diabétique d’une HbA1c < 7 % fait partie des cibles thérapeutiques prioritaires, mais aucune étude n’a démontré que l’obtention d’un tel objectif glycémique réduisait à elle seule la prévalence des TE chez le diabétique. La prise en charge psycho-sexologique est un adjuvant thérapeutique important, même si aucune étude clinique n’a démontré une réduction de la prévalence des TE avec sa mise en Ĺ“uvre.

Le traitement pharmacologique de première intention sera le traitement oral par les inhibiteurs des phosphodiestérases de type 5. Ces molécules bloquent la dégradation enzymatique du GMPc dans les corps caverneux et induisent une relaxation des fibres musculaires lisses et une vasodilatation pénienne. Elles ont prouvé leur efficacité dans l’amélioration des TE chez le non-diabétique comme chez le diabétique. Leurs caractéristiques sont résumées dans le tableau 21.II. Les études cliniques n’ont pas montré d’aggravation d’une coronaropathie par les inhibiteurs des phosphodiestérases de type 5, mais l’usage d’un dérivé nitré par un patient porteur d’un TE contre-indique formellement l’association d’un inhibiteur des phosphodiestérases (risque d’hypotension artérielle majeure). En cas d’intolérance ou de contre-indication aux inhibiteurs des phosphodiestérases de type 5, d’autres molécules orales pourront être utilisées, telles l’apomorphine ou la yohimbine (cf. tableau 21.II), mais celles-ci sont très peu efficaces. L’ensemble de ces traitements pharmacologiques oraux connaît malheureusement un taux d’abandon important, notamment en raison de leur non-remboursement par la Sécurité sociale.

Tableau 21.II.Traitements spécifiques d’un trouble de l’érection
Traitement Molécules ou dispositif Place Voie d’administration Efficacité Effets adverses Remarques
Inhibiteurs des phosphodiestérases
de type 5
Sildenafil (Viagra*) Tadalafil (Cialis*) Vardenafil (Levitra*) 1re intention Orale 60 à 70 % Céphalées, flush, dyspepsie, myalgies CI : association
aux dérivés nitrés (hypotension artérielle majeure)
Drogues vaso-actives Alprostadil (Caverject*, Edex*) 2e intention Intra caverneuse 80 à 90 % Douleur pénienne, priapisme CI en cas d’hypocoagulabilité
  Prostaglandines E1   Intra-urétrale 50 à 60 %    
Agoniste dopaminergique Apomorphine (Uprima*) 1re intention Sublinguale 40 à 50 % Nausées, somnolence Pas de CI Faible efficacité
Antagoniste a2-adrénergique Yohimbine 1re intention   40 % (= placebo) HTA Efficacité quasi nulle
Érecteur à dépression (vacuum) Pompe à vide mécanique avec anneau pénien 2e intention Locale 70 % Traumatisme pénien Peu coûteux
Prothèse pénienne Rigide ou expansible 3e intention Locale 70 à 90 % Infection
CI : contre indication.


Le dispositif vacuum est une alternative intéressante en seconde intention, peu coûteuse et efficace, mais sa diffusion se heurte aux résistances psychologiques du patient ou de sa partenaire.

Les drogues vasoactives, administrées par voie intracaverneuse, seront utilisées en seconde intention après échec des traitements oraux. Elles fournissent un taux de succès élevé mais s’accompagnent d’effets indésirables parfois handicapants (cf. tableau 21.II) et d’un taux d’abandon pouvant atteindre 68 % dans les 3 mois après leur introduction. Elles sont remboursées par les caisses dans certaines circonstances précises (neuropathie diabétique, séquelles de chirurgie ou de radiothérapie pelvienne, paraplégie ou tétraplégie, traumatisme du bassin avec troubles urinaires, sclérose en plaques).

Les prothèses péniennes posées chirurgicalement constituent une solution de dernière intention lorsque toutes les autres thérapeutiques ont échoué. Il s’agit de prothèses soit rigides, soit expansibles. Elles apportent l’indice de satisfaction le plus élevé parmi les traitements d’un TE et une solution définitive au TE. Elles peuvent engendrer des complications aiguës ou chroniques, de type infectieux ou par défaillance mécanique. Le diabète ne constitue pas une contre-indication à leur mise en place si l’équilibre glycémique est satisfaisant, mais le risque de complication infectieuse est plus élevé pour un diabétique que pour un non-diabétique. L’indication d’une prothèse pénienne ne peut être posée que par un chirurgien spécialisé dans la prise en charge des TE.

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