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Quand évoquer une maladie génétique "complexe" ?
Avant d'avancer la nature génétique "complexe" d'une maladie il faut évidemment au préalable disposer d'arguments solides.
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La maladie présente un déterminisme génétique
Les arguments qui font penser à un déterminisme génétique sont essentiellement de nature épidémiologique.
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La notion d'agrégation familiale
La maladie récidive dans des familles et se présente chez de nombreux sujets de la famille. La prévalence de la maladie dans la famille est nettement supérieure à la prévalence observée dans la population générale.
Demenais, F., Martinez, M., and Lathrop, M. (1996), Méthodes statistiques pour identifier les gènes dans les maladies multifactorielles. Ann Instit Pasteur, 7(1):3-12.
Feingold, J. (2005), Maladies multifactorielles: un cauchemar pour le généticien. Med Sci, 11(21):927-33.
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La concordance des jumeaux
Dans le cas de jumeaux monozygotes, quand l'un des jumeaux présente la maladie, très souvent le second la développe aussi. La concordance des jumeaux monozygotes atteint 80 à 90%. Cette concordance est moindre dans le cas de jumeaux dizygotes, de l'ordre de 16 à 40% ce qui permet de suspecter fortement une composante génétique de la maladie.
B. Newman et al., Concordance for type 2 (non-insulin-dependent) diabetes mellitus in male twins. Diabetologia 30 (1987), pp. 763–768.
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L'existence d'ethnies à risque
Dans certaines ethnies la prévalence de maladies complexes est nettement plus élevée. C'est par exemple le cas du diabète de type 2 chez les indiens Pima d'Arizona où près de 50% des sujets présentent un diabète de type 2 et 95% des diabétiques sont obèses.
Gardner LI Jr, Stern MP, Haffner SM, Gaskill SP, Hazuda HP, Relethford JH, Eifler CW, Prevalence of diabetes in Mexican Americans. Relationship to percent of gene pool derived from native American sources
C'est également le cas des habitants de l'île de Nauru dans l'océan Pacifique où près de 90% de la population souffre d'obésité avec de ce fait une espérance de vie très faible, de 58 ans pour les hommes et 65 ans pour les femmes.
Dans ces deux exemples ont admet que ces populations partagent un patrimoine génétique qui leur confère la susceptibilité à la maladie génétique "complexe" en question (diabète de type 2, obésité). On admet également que ces populations n'ont eu que peu d'apport génétique extérieur à même de "diluer" cette susceptibilité génétique. Il s'agit soit d'un isolat culturel dans le cas des indiens Pima d'Arizona, soit d'un isolat géographique dans celui des habitants de l'île de Nauru.
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L'existence de modèles animaux
Il existe de nombreux modèles animaux de maladies humaines. Des souches animales présentent spontanément des modèles génétiquement transmissibles de maladies humaines. C'est le cas par exemple des rats Zucker qui sont des modèles animaux d'obésité génétique. C'est d'ailleurs à partir de la souche Zucker que fut cloné et identifié le gène de la leptine. En effet les rats Zucker présentent une mutation (appelée fa, pour fat) du gène codant la leptine. Les rats fa/fa sont obèses et peuvent peser jusqu'à un kilogramme, soit le double de la souche sauvage.
TW Kurtz, The Zucker fatty rat as a genetic model of obesity and hypertension, Hypertension, vol. 13, no 6, 1989, p. 896–901.
Si le rat Zucker est un modèle animal d'obésité monogénique, il existe des modèles animaux de maladies génétiques "complexes" comme le rat Goto-Kakizaki (GK) qui est un modèle animal de diabète de type 2. Les travaux réalisés chez le rat GK ont permis en 1996 de démontrer que le diabète de type 2 comportait (au moins chez le rat) un déterminisme polygénique. Galli J et al. , Genetic analysis of non-insulin dependent diabetes mellitus in the GK rat. Nat Genet. 1996 Jan;12(1):31-7. De même la souche de souris KK/Ta représente un modèle animal de diabète de type 2 associé à l'obésité, et il existe des modèles murins d'athérosclérose. Roberts A, Thompson JS., Inbred mice and their hybrids as an animal model for atherosclerosis research. Adv Exp Med Biol. 1976;67(00):313-327.
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Le mode de transmission ne répondant à aucun des schémas de transmission de maladie monogénique ou mitochondriale, la maladie est dite "complexe"
On constate une forte agrégation familiale mais la transmission ne correspond à aucun grand mode de transmission mendélien (autosomique dominant, autosomique récessif, récessif lié au chromosome X) ni à une transmission mitochondriale.
En effet la maladie génétique "complexe" étant le résultat des effets combinés de très nombreux variants génétiques, comme chacun d'entre eux considéré individuellement se transmet selon les lois de la génétique mendélienne classique et sur un mode récessif, codominant ou dominant, l'hérédité polygénique est une hérédité mendélienne à de multiples loci. Mais globalement la résultante ne correspond à aucun modèle mendélien. Concernant l'hérédité polygénique, on admet par simplification que les effets des différents loci sont additifs ce qui conduit à parler d'hérédité quantitative. Il en résulte un phénotype très variable d'un individu à l'autre avec une tendance à obtenir un phénotype qui suit une distribution normale en population générale.
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