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Dépistage prénatal
La France est le pays où le dépistage prénatal de la T21 est le plus organisé car devant être proposé à toutes les femmes enceintes et pris en charge par l'assurance maladie.
Ce dépistage, utilisant les marqueurs sériques, est scientifiquement un des plus mauvais exemple de dépistage : nombreux faux positifs, nombreux faux négatifs, absence de vrai traitement pour la situation dépistée. Les dosages sont modérément reproductifs (à quelques jours d'intervalle, même si on est dans la période de dépistage possible, le risque calculé peut varier de 1/150 à 1/300). De plus la réalisation de ce dépistage induit des amniocentèses et donc des pertes fœtales (risque d'environ 0,5 %).
Depuis Janvier 2010, le dépistage prénatal de la T21 a recours aux marqueurs sériques du 1er trimestre préférentiellement ou du 2ème trimestre, associés à la mesure de la clarté de la nuque fœtale à l'échographie du 1er trimestre (voir sur le site web du CPDPN (cf. note : CPDPN ) du CHU de St Etienne : taper sur Google "CPDPN 42" ou http://www.chu-st-etienne.fr/default.aspx?mon_motcle1=reseaux&mon_motcle2=cpdpn ).
Les marqueurs sériques du risque de T21 :
Ce sont des substances dosées dans le sang maternel dont la distribution du dosage est différente selon que le fœtus est T21 ou pas. Par exemple le dosage de ßHCG tend à être plus élevé lorsque le fœtus est T21. Mais il n'y a pas de seuil permettant de séparer les fœtus T21 des autres (il y a chevauchement des courbes). Il en est de même pour les autres dosages.
- Marqueurs du 1er trimestre (entre 11 SA (cf. note : SA) et 13SA+6 jours) : ßHCG et PAPPA (cf. note : PAPPA)
- Marqueurs du 2ème trimestre (entre 14 SA et 17SA + 6 jours) : HCG ou ßHCG et αFP (et éventuellement estriol)
Ces MS (cf. note : MS) ne sont pas faits pour dépister les autres anomalies chromosomiques. Utilisés seuls les MS dépistent environ 60-66 % des fœtus T21, mais ont beaucoup de faux positifs et font proposer une amniocentèse à 1 grossesse sur 10 à 12 avec seulement dans 1% des cas une T21.
La clarté de la nuque du fœtus :
Petite zone de densité liquidienne entre la peau et les plans profonds musculo squelettiques, mesurée sur l’échographie du 1er trimestre, sur une coupe de profil. Elle est physiologique et tend à diminuer après le 1er trimestre et à rentrer dans la norme, même chez les fœtus T21. Plus elle est grande, plus il y a de risque que le fœtus ait une pathologie (anomalie chromosomique dont T21 mais aussi syndrome malformatif et éventuellement infection).
On observe des faux positifs chez des fœtus avec une clarté augmentée sans pathologie et qui iront bien, et des faux négatifs avec des fœtus T21 à clarté nucale fine ; là encore il n'y a pas de seuil discriminant. Des courbes permettent d’obtenir, selon la mesure de la clarté et la taille du fœtus (LCC : longueur cranio-caudale) un chiffre d'augmentation (ou de diminution) du risque de T21.
En cas de clarté augmentée sans anomalie chromosomique, il faut surveiller étroitement le développement fœtal à l'échographie car il y a un risque de quelques pourcents de détecter à 17 SA ou 22 SA un problème de croissance ou de syndrome malformatif (en particulier avec malformation cardiaque). S'il n'y a pas d'anomalie chromosomique et que l'évolution fœtale est favorable, il est très probable que cet enfant ira bien après la naissance (on rejoint presque le pronostic des fœtus dont la clarté nucale était fine).
Il ne faut pas confondre cette mesure de la clarté nucale au 1er trimestre avec les augmentations possible au 2ème trimestre : celles-ci permettent bien moins de dépister les T21 et se voient plus dans des contextes malformatifs ou d'anasarque.
En pratique :
On préconise (la femme enceinte/le couple décide) la réalisation d'un calcul de risque de T21 à partir des résultats des marqueurs, de la mesure de la clarté de la nuque et de l'âge maternel. Il a en effet été montré que cette stratégie, tout en maintenant le nombre de fœtus T21 détectés (de l'ordre de 85%), diminuait le taux de faux positifs, passant de près de 10% à 5% (dépistage combiné du 1er trimestre).
On parlera de dépistage combiné (mesure nuque T1 (cf. note : T1) + MS T1 et âge maternel) et de dépistage séquentiel (mesure nuque T1 + MS T2 et âge maternel).
Pour la réalisation de ce dépistage :
- Le médecin qui mesure la nuque à l'échographie du 1er trimestre doit être validé pour cette mesure (plusieurs organismes ou associations ont mis en place cette validation) et être enregistré auprès d'un réseau de périnatalité, afin que le résultat soit pris en compte
- Le laboratoire qui dose les MS doit également être habilité
- Enfin, la patiente doit signer un consentement pour le dosage des MS, contresigné par le médecin prescripteur.
Le seuil de positivité a été placé à 1/250 : au-dessus de 1/250 (1/50, 1/100, 1/200… ), on considère que le fœtus est à risque accru de T21 et la vérification du caryotype fœtal est proposée. Dans ce cas, avec le dépistage combiné ou séquentiel, il y a une probabilité de l'ordre de 3-4 % de trouver une T21 (1/27). En dessous de 1/250 (1/300, 1/1000, …) le risque de T21 est considéré comme faible chez le fœtus, mais il n'est pas nul et des fœtus T21 ne seront pas détectés.
Les indications pour lesquelles une vérification du caryotype fœtal, par PVC ou amniocentèse, est prise en charge par l'assurance maladie dans ces cas sont:
- Risque de T21 augmenté sur le dépistage combiné ou séquentiel
- Risque de T21 augmenté sur les MS T2
- Age maternel supérieur à 38 ans au moment de la ponction si ni le dépistage combiné ou séquentiel ni les MS T2 n'ont pu être réalisés (donc uniquement en cas de découverte tardive de la grossesse). L'amniocentèse pour les femmes de plus de 38 ans n'est donc plus "automatique". On rappelle que dans le calcul de risque combiné ou séquentiel ou des MS T2 seuls, l'âge maternel est pris en compte.Etablissement du sexe chromosomique en cas de DPN d'une affection liée à l'X
- Anomalies échographiques fœtales autres que la clarté de la nuque :
- Malformations comportant un risque assez marqué d'anomalie chromosomique dont la T21, comme le CAV
(cf. note : CAV)
, l'atrésie duodénale, l'absence de visualisation des os propres du nez.
- Malformations ayant un risque moindre mais pouvant justifier une vérification du caryotype fœtal : par exemple une CIV
(cf. note : CIV)
, une duplication digestive, une agénésie du corps calleux, …
- Les "petits" signes du deuxième trimestre n'ont pas de valeur individuellement: profil plat, clinodactylie du Vème doigt, fémur court … et ne sont pas spécifiques de la trisomie 21.
- Antécédents d'anomalie chromosomique lors d'une précédente grossesse du couple
- Présence d'une anomalie chromosomique chez un des membres du couple
Dans ces cas il peut y avoir vérification du caryotype fœtal pris en charge, par PVC vers 12-14 SA, ou amniocentèse à partir de 16 SA.
L'amniocentèse est un examen préférable sur le plan cytogénétique à la PVC du fait de sa meilleure résolution et surtout à cause des discordances fœto-placentaires (de l'ordre de 1-2%) des PVC. Ces discordances peuvent conduire au diagnostic erroné d'anomalie chromosomique fœtale alors que l'anomalie est limitée au placenta et le fœtus indemne. Inversement, mais plus rarement, elle pourrait être faussement normale (en particulier en cas de T21 en mosaïque).
La PVC permet une réponse en 2-3 jours sur l'examen direct, et 2-3 semaines pour le résultat définitif à la culture. Le résultat du caryotype sur l'amniocentèse demande 2 à 3 semaines. On peut réaliser une technique plus rapide sur l'amniocentèse en utilisant la technique d'Hybridation in Situ en Fluorescence (FISH) avec une sonde spécifique du chromosome 21 sur noyaux en interphase. La présence de 3 signaux d'hybridation signe une trisomie 21. Elle permet d'obtenir un résultat en 24-48 heures. Elle est à utiliser pour un résultat rapide en cas d'anomalie échographique évocatrice de trisomie21.
Cependant le caryotype reste l'examen de référence. Il permet de confirmer le résultat de la
FISH et surtout de connaître le type de trisomie (libre, par translocation,…)
Se rappeler qu'un bébé porteur de trisomie 21 peut naître malgré tout, avec une nuque fine au premier trimestre, des marqueurs sériques ne montrant pas de risque augmenté et une absence de malformation.
La femme enceinte / le couple a le choix de la décision de faire le dépistage et d’ interrompre ou non la grossesse en cas de trisomie 21. Dans la loi sur les IMG, aucune liste de situations justifiant le recours à l'IMG n’est donnée. On y parle seulement de "forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic". L’IMG ne peut être décidée que s’il y a demande du couple. Il est erroné de dire qu’un couple refuse l’IMG, il faut dire qu’il ne la demande pas.
En cas de souhait d'IMG par le couple, cette IMG pour raison fœtale doit être acceptée par deux médecins faisant partie d'un CPDPN, qui signeront le certificat autorisant l'IMG. Il n'y a pas de délai à la réalisation de l'IMG en France, elle peut être pratiquée jusqu'au terme de la grossesse.
Notes
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CPDPN :
Centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal
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SA :
Semaines d'amnénorrhée
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PAPPA :
pregnancy associated plasma protein A
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MS :
Marqueurs sériques
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T1 :
1er trimestre, T2 : 2ème trimestre
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CAV :
Canal atrioventriculaire
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CIV :
Communication interventriculaire
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