Le texte officiel est la conférence de consensus sur la prise en charge de l’urticaire chronique de 2003 (HAS).


 Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES), Société Française de Dermatologie. Conférence de consensus : Prise en charge de l’urticaire chronique. HAS; 2003. Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES), Société Française de Dermatologie. Conférence de consensus : Prise en charge de l’urticaire chronique. HAS; 2003.

L’urticaire est une dermatose inflammatoire fréquente.

Son diagnostic repose sur l’interrogatoire et l’examen clinique.

L’évolution peut être :

  • aiguë ;
  • chronique ou récidivante (évoluant depuis plus de 6 semaines).


Il s’agit d’un syndrome dont les causes peuvent être multiples, mais elles sont en pratique assez rarement retrouvées dans les formes chroniques.

Physiopathologie

L’urticaire correspond à un œdème dermique (urticaire superficielle) ou dermo-hypodermique (urticaire profonde ou angio-œdème) dû à une vasodilatation avec augmentation de la perméabilité capillaire. Les modifications capillaires sont liées à des médiateurs inflammatoires dont le principal est l’histamine.

D’autres médiateurs peuvent également être impliqués (leucotriènes, prostaglandines, complément, sérotonine, acétylcholine…).

Deux types de mécanismes peuvent être en cause :
  • immunologiques  : nécessitant une sensibilisation préalable :
    • hypersensibilité immédiate de type anaphylactique médiée par les IgE ou les IgG4,
    • hypersensibilité par activation du complément,
    • urticaire par vasculite ;
  • non immunologiques (mécaniques, pharmacologiques) :
    • apport direct ou libération d’histamine (aliments riches en histamine [fromages] ou histaminolibérateurs [crustacés],
    • défaut d’inhibition de médiateur (α-1-antitrypsine, C1 estérase…) (oedème angioneurotique par déficit en inhibiteur de la C1 estérase),
    • urticaire cholinergique (médiée par la libération d’acétylcholine dans certaines circonstances : effort, émotion).

À retenir

Toutes les urticaires ne relèvent pas d’un mécanisme allergique, ni même immunologique.
La plupart des urticaires chroniques relèvent d’un mécanisme non allergique .
L’origine allergique d’une urticaire aiguë est à suspecter si les lésions surviennent dans les minutes (ou au maximum dans un délai de deux heures) après l’ingestion d’un aliment ou d’un médicament. Passé ce délai, l’origine allergique est très peu probable.
Les urticaires par vasculite ont des caractéristiques cliniques particulières : fixité des lésions, absence de prurit.


1  -  Diagnostic

1 . 1  -  Urticaire superficielle

Il s’agit de la forme la plus commune. Le diagnostic clinique est en général facile. Les papules ou plaques érythémateuses ou rosées, ortiées, œdémateuses à bords nets ont trois caractéristiques sémiologiques majeures des urticaires communes (non liées à un mécanisme de vasculite) :

  • fugaces (chaque lésion élémentaire disparaissant en moins de 24 heures) ;
  • migratrices  ;
  • prurigineuses (Figure 1 et Figure 2).
Figure 1 : Urticaire : lésions circinées
Figure 2 : Urticaire aiguë

Dans ces cas, la biopsie cutanée n’est pas nécessaire au diagnostic (+++). Elle n’est justifiée qu’en cas de suspicion d’urticaire par vasculite (lésions fixes, peu ou pas prurigineuses).

1 . 2  -  Urticaire profonde (angio-œdème ou œdème de Quincke)

L’œdème est hypodermique. Il peut toucher la peau ou les muqueuses et peut être isolé ou associé à une urticaire superficielle.

L’angio-œdème réalise une tuméfaction ferme, mal limitée, ni érythémateuse ni prurigineuse, qui provoque une sensation de tension douloureuse.

Au visage, l’angio-œdème touche préférentiellement les paupières et les lèvres (Figure 3).

Figure 3 : Œdème de Quincke

La localisation aux muqueuses de la sphère orolaryngée conditionne le pronostic. L’apparition d’une dysphonie et d’une hypersalivation par troubles de la déglutition est un signe d’alarme qui peut précéder l’asphyxie si l’œdème siège sur la glotte.

L’œdème de Quincke peut être le signe inaugural d’un choc anaphylactique.

1 . 3  -  Formes cliniques

1 . 3 . 1  -  Manifestations associées

Peuvent être associées surtout dans les formes profuses (Figure 4) :

  • une hyperthermie modérée ;
  • des douleurs abdominales ;
  • des arthralgies.
Figure 4 : Urticaire profuse

1 . 3 . 2  -  Variantes morphologiques

Les formes figurées réalisent des anneaux ou des arcs de cercles. Elles sont secondaires à la guérison centrale et à l’extension centrifuge des plaques.

Les formes vésiculo-bulleuses sont rares et liées à un œdème très important.

Les formes micropapuleuses sont évocatrices d’urticaire cholinergique (déclenchées par l’effort musculaire, stress…).

1 . 3 . 3  -  Formes évolutives

1 . 3 . 3 . 1  -  Urticaire aiguë

Il s’agit le plus souvent d’un épisode unique et rapidement résolutif.

Aucun examen complémentaire n’est nécessaire (+++).

Les médicaments (encadré 1), certains aliments (encadré 2) absorbés dans les heures ayant précédé l’éruption et un grand nombre d’infections virales sont les principales causes d’urticaire aiguë.

On y rattache les urticaires liées aux piqûres d’hyménoptères (abeille, guêpe) dont la répétition peut aboutir au risque de choc anaphylactique. Des pricks tests et surtout des intradermoréactions avec des extraits standardisés de venin permettent de confirmer le diagnostic.

1. Principaux médicaments responsables d'urticaire
2. Principaux aliments responsables d'urticaire

1 . 3 . 3 . 2  -  Urticaire chronique

Par définition, l’urticaire est dite chronique (poussées quotidiennes) ou récidivante (intervalle libre plus ou moins long entre chaque poussée) si elle évolue depuis plus de 6 semaines.

L’interrogatoire et l’examen clinique sont essentiels dans la démarche étiologique (+++).

Les bilans exhaustifs et systématiques sont coûteux et inutiles car la majorité des urticaires chroniques sont idiopathiques (c’est-à-dire sans pathologie sous-jacente retrouvée).

En l’absence d’orientation étiologique clinique (interrogatoire et examen physique), la conférence de consensus sur la prise en charge de l’urticaire chronique recommande :

  • de réaliser un traitement anti-H1 de première intention ;
  • en cas d’échec de celui-ci, des examens complémentaires comprenant au minimum : NFS, vitesse de sédimentation (VS), recherche d’anticorps antithyroperoxydase (TPO), électrophorèse des protides sanguins, doivent être demandés.


Des examens plus complets ne sont justifiés que dans les situations suivantes :

  • tests allergologiques cutanés (tests ouverts, tests épicutanés, prick-tests) lorsqu’il existe des arguments d’interrogatoire, pour une urticaire de contact ;
  • tests cutanés physiques lorsqu’il existe une suspicion d’urticaire physique :
    • test au glaçon dans l’urticaire au froid,
    • test d’effort dans l’urticaire cholinergique,
    • test à la pression dans l’urticaire retardée à la pression,
    • frottement de la peau par une pointe mousse dans l’urticaire par dermographisme (fréquent),
    • test à l’eau dans l’urticaire aquagénique (exceptionnel),
    • phototest dans l’urticaire solaire (exceptionnel) ;
  • recherche d’un foyer infectieux ORL ou dentaire (parfois en cause dans les angio-œdèmes faciaux (ou œdèmes de Quincke) récidivants) ;
  • recherche d’une parasitose (en cas d’hyperéosinophilie sur la NFS ou de troubles digestifs) ;
  • recherche d’une dysthyroïdie (TSH) en cas de suspicion clinique d’hypo- ou d’hyperthyroïdie, ou en cas de positivité des AC anti-TPO ;
  • dosage du complément, recherche de FAN, protéinurie, bilan immunologique en cas de suspicion de maladie de système (arthralgies inflammatoires, arthrites, fièvre…) ;
  • biopsie cutanée pour histologie et immunofluorescence directe (IFD) en cas de suspicion d’urticaire par vasculite (lésions urticariennes peu prurigineuses, fixes pendant plusieurs jours) ;
  • dosage du complément et de l’inhibiteur de la C1 estérase en cas de suspicion d’œdème angioneurotique héréditaire (angio-œdèmes faciaux récidivants, contexte familial) ;
  • bilan hépatique, sérologies des hépatites virales en cas de suspicion d’hépatite ;
  • recherche d’une allergie alimentaire (régime d’éviction, pricks-tests, dosage des IgE spécifiques, épreuve de réintroduction orale) en cas de suspicion d’allergie alimentaire ;
  • tests d’allergie médicamenteuse (intradermoréaction) en cas de suspicion d’urticaire pour allergie médicamenteuse.


Ce bilan est le plus souvent négatif (+++). Il faut l’expliquer aux patients et savoir ne pas le répéter.

1 . 3 . 3 . 3  -  Syndrome de vasculite urticarienne

Il s’agit d’un syndrome anatomoclinique qui associe une urticaire chronique et une image histologique de vasculite.


Signes cutanés

Les lésions urticariennes sont de petite taille, peu ou pas prurigineuses, volontiers entourées d’un halo de vasoconstriction (Figure 5), fixes (restant à la même place durant plus de 24 heures).

Figure 5 : Vasculite urticarienne : noter le caractère purpurique

Un purpura peut être associé, laissant une pigmentation post-lésionnelle transitoire.

Ces lésions doivent faire réaliser une biopsie avec IFD.


Signes associés

Hyperthermie, arthralgies et troubles digestifs sont fréquents.

Des manifestations pulmonaires, rénales, oculaires… peuvent également s’observer et conditionnent le pronostic.


Signes histologiques cutanés

Il existe une vasculite lymphocytaire ou plus rarement leucocytoclasique avec nécrose fibrinoïde des petits vaisseaux dermiques.

L’IFD est souvent positive avec dépôts d’IgG, d’IgM et de C3 dans la paroi des vaisseaux.


Signes biologiques


L’élévation de la VS est fréquente.

L’hypocomplémentémie (CH50, C1q, C4, C2), qui a servi à définir le syndrome de Mac Duffie, n’est observée que dans la moitié des cas.

La découverte d’autres anomalies, notamment immunologiques, doit faire chercher une affection systémique (particulièrement un lupus érythémateux) qui peut apparaître secondairement.

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