2 . 3  -  Lésions précancéreuses, cancérogenèse


On distingue les cancers colorectaux sporadiques des cancers familiaux liés à une prédisposition génétique.

2 . 3 . 1  -  Principaux syndromes de prédisposition génétique au CCR


Polypose adénomateuse familiale (PAF)

Polypose adénomateuse familiale (figure 5) :

  • 1 % des CCR, mutation germinale du gène APC (transmission autosomique dominante)
  • développement de multiples polypes adénomateux colorectaux (> 100 polypes) avec un risque de 100 % de développer un CCR (cancer avec instabilité chromosomique).
Figure 5 : Macroscopie : polypose colique (polypose adénomateuse)

Autres manifestations tumorales :

  • adénomes duodénaux pouvant se transformer en cancer ;
  • polypes glandulokystiques gastriques (ne dégénérant en général pas ; cf. infra « Tumeurs de l'estomac », item 300 [150]) ;
  • tumeur desmoïde : prolifération tumorale de myofibroblastes (le plus souvent dans la paroi abdominale ou dans le mésentère). Cette tumeur est très infiltrante mais ne donne pas de métastase. C'est une tumeur dite à malignité locale.

Polypose associée à MUTYH (MAP)

  • Mutation biallélique du gène MUTYH (transmission autosomique récessive).
  • Polypes multiples du côlon (souvent polypose atténuée), mais aussi du duodénum et de l'estomac.
  • Syndrome de description récente, augmentation du risque de CCR encore mal évaluée.

Syndrome de Lynch (ou syndrome HNPCC)

  • 1 à 5 % des CCR, mutation d'un des gènes mismatch repair (MMR) (le plus souvent MLH1, MSH2), entraînant une instabilité de microsatellites (cf. infra).
  • Risque très élevé de développer un CCR, âge moyen de survenue 45–50 ans.
  • Histologiquement, les adénocarcinomes liés à une mutation des gènes MMR présentent des caractéristiques morphologiques particulières (mucineux ou médullaires).
  • Autres localisations tumorales : endomètre, voies urinaires, estomac, ovaires, pancréas…

Polyposes hamartomateuses

Très rares, elles sont caractérisées par la présence de polypes hamartomateux (cf. annexe du chapitre 2 « Terminologie utilisée dans les CR de pathologie tumorale ») du tractus gastro-intestinal avec un risque de développer un CCR. Ces syndromes sont parfois associés au développement d'autres cancers.

Syndrome de Peutz-Jeghers

  • Mutation du gène LKB1/STK11.
  • Lésions cutanées pigmentées typiques (lentiginose péri-orificielle).
  • Risque de cancer associé : ovaire, pancréas, grêle…

Polypose juvénile familiale

  • Mutation du gène SMAD4 ou du gène BMPR1A.
  • Multiples polypes hamartomateux du colorectum, de l'estomac et de l'intestin grêle avec risque de développer un cancer dans ces organes.

Maladie de Cowden (ou syndrome des hamartomes multiples)

  • Mutation du gène PTEN.
  • Polypes hamartomateux gastro-intestinaux, mais aussi de la peau, de la thyroïde.
  • Risque de développer un cancer colique, également de la thyroïde, du sein.

2 . 3 . 2  -  Deux principales voies de cancérogenèse


Il existe principalement deux types de cancers colorectaux en fonction de leurs anomalies génétiques :

  • les cancers avec instabilité chromosomique (environ 85 % des cancers) ;
  • les cancers avec instabilité des microsatellites (15 % des cancers, appelés aussi cancers MSI +).

Les cancers avec instabilité des microsatellites sont des cancers liés à une déficience du système de réparation des mésappariements (MMR) qui contrôle la fidélité de la réplication de l'ADN. La conséquence directe de ce défaut fonctionnel est l'accumulation de mutations dans les cellules tumorales, particulièrement au niveau de séquences répétées de 1 à 5 nucléotides appelées séquences microsatellites.

Deux protéines du système de réparation de l'ADN sont très fréquemment impliquées dans la genèse des tumeurs MSI + : hMLH1, hMSH2. Il y aura dans les cellules tumorales une perte d'expression protéique de hMLH1 ou de hMSH2 responsable de l'instabilité génétique au niveau des séquences microsatellites.

Les cancers MSI + peuvent être sporadiques (10 % des cancers environ) ou familiaux (2 à 5 % des cancers [syndrome de Lynch]).

Les cancers développés sur PAF sont des cancers avec instabilité chromosomique.

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