3  -  Le saccharose

  • Structure

Le saccharose est un disaccharide de poids moléculaire 360 D, formé par la liai¬son d’une molécule de glucose et d’une molécule de fructose liés en alpha-1-2. C’est un sucre non réducteur, ses deux fonctions aldéhydiques étant liées. Il est extrait de la canne à sucre ou de la betterave. Il était encore consommé comme un produit de luxe à la fin du XVIIIe siècle. Son extraction n’a été véritablement industrialisée et sa consommation n’est réellement devenue populaire qu’au tournant de ce siècle. Il est digéré par la saccharase-iso-maltase de la bordure en brosse des entérocytes dont l’activité n’est jamais le facteur limitant de son absorption.

  • Le goût sucré

La caractéristique principale du saccharose est son goût sucré, plaisant, qui peut conduire à une consommation excessive. Le pouvoir sucrant du saccharose (coté 1 arbitairement) est en effet nettement supérieur à celui du lactose (0,2) ou à celui du glucose (0,7). Il n’est inférieur, parmi les sucres naturels, qu’à celui du fructose (1,1 à 1,6). Par comparaison, le pouvoir sucrant du cyclamate est de 30 et celui de l’aspartam ou de la saccharine environ 300-350 (c’est dire qu’il faut 300 à 350 fois moins de ce produit pour provoquer la même sensation qu’une quantité de saccharose).

Le goût sucré est reconnu dès les premiers jours de la vie par le nourrisson chez lequel il stimule plus que le glucose, par exemple, la tétée. Dissous dans une boisson, le saccharose apporte ainsi des calories agréables et sournoises car ingérées sans effort. Si le saccharose n’était présent, par exemple, que dans les fruits, des quantités bien moindres en seraient ingérées : 140 g de saccharose représentent en effet plus de 1,5 kg de pommes.

Le plaisir lié à l’ingestion de saccharose a été bien étudié chez le rat qui, seul, dans une cage, mange plus de saccharose que de dextrines, alors que la situation est inverse lorsqu’il est en groupe. De même, après 10 h de jeûne, un rat ingère 120 % de sa ration habituelle si le régime qu’on lui offre contient des hydrates de carbone sans saveur (polymères de glucose), 140 % de sa ration si celle-ci contient du saccharose mais 200 % de sa ration si elle ne contient que du saccharose.

  • Conséquences nutritionnelles de l’ingestion de saccharose

Le caractère agréable de l’ingestion de saccharose a au moins 2 conséquences néfastes.

⇒ Anomalies du métabolisme lipidique : augmentation de la synthèse endo¬gène, par le foie, de triglycérides, bien mise en évidence chez l’adulte sain ; ainsi, après 6 semaines d’un régime apportant 30 % des calories sous forme d’amidon ou de saccha¬rose, le taux des lipides totaux, des triglycé¬rides et des VLDL est-il significativement plus élevé chez ceux ayant ingéré du sac¬charose que chez les sujets ayant ingérés une quantité analogue d’amidon (+ 30 % pour les triglycérides). Cet effet, maximum après la quatrième semaine du régime, apparaît dès la deuxième semaine. Cet effet est associé à une diminution d’une sensibili¬té à l’insuline que l’on retrouve dans les états prédiabétiques.
Au-delà de cet effet métabolique, conduisant à une hyperlipoprotéinémie de type IV, l’ingestion d’énergie en quantités supérieures au besoin conduit à l’obésité.

⇒ Les caries dentaires sont la deuxième conséquence néfaste de l’ingestion exagérée ou trop fréquente de saccharose. Celui-ci est en effet un substrat d’élection de la flore microbienne buccale (Lactobacillus acidogène ou Streptococcus mutans, en particulier) qui, aux dépens de ce sucre, forme d’une part, des polysaccharides insolubles contribuant à la formation de la plaque den¬taire qui accole les bactéries à la dent et d’autre part des acides organiques forts qui solubilisent les cristaux d’apatite de l’émail, et permettent la pénétration du sucre et des bactéries dans l’orifice ainsi produit. Le risque de carie est proportionnel au temps de contact du saccharose dans la cavité buccale et à son degré de solubilisation. Il est donc d’autant plus grand que les aliments sont plus liquides et séjournent plus longtemps dans la bouche (nougat, chewing-gum, boissons sucrées, en particulier avant le sommeil). L’utilisation d’une paille, par exemple, diminue le risque de carie. Fléau social (en 1970, 10 % des frais de l’assurance maladie étaient liées à des soins dentaires ; 95 % des enfants français sont porteurs de caries), les caries dentaires doivent être prévenues. Le brossage enlève la plaque polysaccharidique. L’ajout de fluor dans l’eau de boisson est l’autre moyen de diminuer la fréquence des caries. En effet, le fluor favorise la formation des cristaux d’apatite, réduit la solubilité de l’émail, inhibe certaines des activités enzymatiques bactériennes conduisant à la formation des acides. Compte tenu du risque de fluorose qu’entraîne une concentration de fluor trop élevée dans l’eau de boisson (supérieure à 8 mg/l) on admet que la protection contre la carie est obtenue pour une concentration optimale de 1 mg de fluor par litre d’eau de boisson (1 part par million = 1 ppm). Lorsque l’eau municipale n’est pas fluorée, il est conseillé de supplémenter l’alimentation en fluor à la dose de 0,25 mg/jour jusqu’à 6 mois, 0,5 mg/jour jusqu’à 1 an, 0,75 mg/jour jusqu’à 2 ans, 1 mg/jour au-delà.

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