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Tout patient susceptible d’être transfusé doit recevoir une information claire, objective en l’état de l’art (lequel évolue rapidement), de sorte qu’il puisse donner son consentement à la transfusion, en étant suffisamment éclairé pour prendre sa décision. L’information doit concerner :
Conflits érythrocytaires : les réactions hémolytiques
Elles sont presque exclusivement dues à un conflit immunologique entre les antigènes présents sur les membranes des hématies transfusées et les anticorps présents dans le plasma du patient. Les anticorps concernés sont : les anticorps naturels du système ABO (l’accident ABO est devenu exceptionnel mais il reste possible, le plus souvent dû à une suite d’erreurs) ; les anticorps immuns irréguliers des systèmes Rh, Kell, Duffy, Kidd, MNS, et les anticorps naturels ou immuns dirigés contre des antigènes fréquents.
Elles sont dues le plus souvent au non-respect, par les établissements de soins, des procédures transfusionnelles standardisées, notamment : erreur d’identification des prélèvements sanguins ; non-respect des examens biologiques prétransfusionnels ; erreur d’attribution des unités de sang et/ou absence de contrôle des concordances et/ou absence voire mauvaise réalisation du contrôle biologique ultime au lit du malade, qui est obligatoire pour la prévention d’une incompatibilité ABO.
Ainsi, ces accidents sont provoqués soit par un non-respect de la compatibilité dans le groupe ABO (toujours par erreur grossière de procédure), soit par la méconnaissance d’une allo-immunisation, mal ou non recherchée, ou indétectable au moment de la recherche.
Le risque majeur est un choc avec collapsus, apparaissant dans les minutes ou les heures qui suivent la transfusion, souvent compliqué de coagulation intravasculaire disséminée (CIVD), d’insuffisance rénale ou respiratoire aiguë. Un ictère hémolytique peut survenir de manière précoce (le lendemain), avec quelquefois retentissement rénal, ou retardé, au 5e ou au 6e jour, délai nécessaire à la réapparition d’un anticorps indétectable lors de la recherche prétransfusionnelle (ce qui signe dans ce cas la réactivation d’un anticorps).
D’autres cas sont moins dramatiques : simple inefficacité de la transfusion, qui doit faire demander une enquête immunologique.
Accidents (immunologiques) cardiopulmonaires
De diagnostic différentiel – non rare – on trouve l’accident de surcharge (transfusion-associated circulatory overload [TACO]), l’infarctus du myocarde et l’embolie pulmonaire.
Les œdèmes pulmonaires lésionnels post-transfusionnels (transfusion-related acute lung injury [TRALI]) représentent des syndromes de détresse respiratoire aiguë post-transfusionnels survenant moins de 6 heures après la transfusion, et se manifestant principalement par toux, dyspnée, hypoxie, hypotension et fièvre, infiltrats diffus à la radio pulmonaire, sans signe de surcharge circulatoire. Bien que la physiopathogénie soit encore imparfaitement connue, on considère qu’un mécanisme fréquent est lié à la présence dans le PSL d’anticorps antigranulocytes (HLA [Human Leukocyte Antigen] ou HNA [Human Neutrophil Antigen]) issus du donneur qui agressent les épithéliocytes pulmonaires en présence de cytokines, de produits inflammatoires et de radicaux libres de l’oxygène. Rare sans être exceptionnel, le TRALI peut compromettre le pronostic vital : depuis 2005, il représente la deuxième cause de décès par effet indésirable immédiatement après l’œdème de surcharge, et avant les contaminations bactériennes des PSL. Retrouvé après tous les types de PSL, il semble néanmoins plus fréquent avec les concentrés plaquettaires d’aphérèse (CPA) et les plasmas frais thérapeutiques (PFC) ; des mesures d’éviction de la présence d’anticorps anti-HLA sont actuellement prises pour en limiter la survenue.
Allo-immunisation antileucocytaire : réaction fébrile non hémolytique
La réaction fébrile non hémolytique (RFNH) est devenue peu fréquente et moins grave (du fait de la leucoréduction/déleucocytation systématique des PSL). Elle se manifeste par de violents frissons et une hyperthermie, et survient souvent dès le début de la transfu¬sion, surtout après transfusion de concentrés plaquettaires chez des sujets immunisés par des transfusions antérieures ou des grossesses.
« Réaction de greffon contre l’hôte » post-transfusionnelle
La réaction de greffon versus hôte (GVH) est exceptionnelle, mais la forme aiguë est mortelle. Elle est due à la greffe de cellules immunologiquement compétentes apportées par le sang du donneur à un receveur en immunodépression profonde. Elle est préve¬nue chez les patients à risque par l’irradiation des PSL. On la redoute particulièrement en cas de transfusion en don dirigé intrafamilial et dans les greffes de cellules souches hématopoïétiques.
Immunisation anti-HLA et antigènes plaquettaires
L’immunisation anti-HLA est une immunisation fréquente dont la principale cause est la grossesse. Elle peut créer des situations difficiles à gérer sur le plan transfusionnel ; il en va de même dans les systèmes plaquettaires HPA (Human Platelet Antigen).
Immunisation de l’hémophile A vis-à-vis du facteur VIII (plus rarement IX)
C’est un problème fréquent qui complique le traitement des hémophiles A (en particulier après utilisation de facteurs recombinants). Il justifie la recherche régulière des anticorps anti-VIII ou IX acquis. En cas d’immunisation faible, il est possible d’obtenir un niveau de facteur suffisant en augmentant notablement les doses de facteur VIII (FVIII) antihémophilique administrées, ou de recourir à des alternatives.
Incompatibilité protéique
Rare, elle peut aussi donner un choc grave, de type anaphylactique, lié à des anticorps anti-IgA chez certains receveurs déficitaires congénitaux en IgA sérique (le déficit génétique le plus fréquent chez l’homme).
Réactions allergiques
En dehors des chocs anaphylactiques mentionnés, on peut observer des réactions allergiques bénignes (érythème, prurit, urticaire, frissons, hypothermie passagère) mais assez fréquentes, qui cèdent aux antihistaminiques ; quelquefois ce sont des réactions plus inquiétantes : crise d’asthme, œdème de Quincke. La nature des antigènes/anticorps en cause est encore largement inconnue.
N.B. Les accidents immunologiques sont catégorisables en deux :
Il s’agit principalement d’accidents infectieux, d’accidents de surcharge et d’accidents métaboliques.
a) Accidents infectieux
Infections et maladies virales
Infections et maladies bactériennes
N.B. La prévention repose sur l’exclusion temporaire des candidats au don ayant présenté des signes d’inconfort pouvant être de nature infectieuse, ayant subi des soins dentaires, etc.
Infections et maladies parasitaires
Agents non conventionnels
Les prions responsables de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) ou variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (vMCJ) sont transmissibles par transfusion sanguine : quatre cas ont été rapportés en Grande-Bretagne, mais aucun en France.
b) Accidents de surcharge des transfusions massives ou itératives
a) Définition de la traçabilité
On définit la traçabilité comme étant « l’aptitude à retrouver l’historique, l’utilisation ou la localisation d’un article ou d’une activité, ou d’articles ou d’activités semblables, au moyen d’une identification enregistrée ». Il est donc nécessaire de mettre en place un processus d’acquisition d’informations pendant toute la durée de vie de l’article (ici, l’examen de laboratoire IH [Immuno-hématologie] et le PSL) ou de l’activité (ici, la transfusion), dont les résultats permettront de réaliser cette traçabilité.
Dans le cadre de la médecine transfusionnelle, la traçabilité est une obligation réglementaire qui intervient dans l’amélioration continue de la qualité.
Cette traçabilité est assurée par un support papier ou par voie informatique indiquant quels PSL ont été transfusés, quand ils ont été transfusés, à quels patients, dans quelles unités fonctionnelles et par quels personnels. La réalisation des deux étapes du contrôle ultime en présence du patient doit être mentionnée, de même que l’existence d’éventuels effets indésirables receveurs (EIR).
b) Hémovigilance
Champ de l’hémovigilance
L’hémovigilance s’étend sur toute la chaîne transfusionnelle du donneur au receveur. Elle doit être parfaitement connue de tout professionnel de santé.
La loi du 9 août 2004 et le décret du 1er février 2006 définissent ainsi l’hémovigilance : « On entend par hémovigilance l’ensemble des procédures de surveillance organisées depuis la collecte du sang et de ses composants jusqu’au suivi des receveurs, en vue de recueillir et d’évaluer les informations sur les effets inattendus ou indésirables résultant de l’utilisation thérapeutique des produits sanguins labiles en vue d’en prévenir l’apparition, ainsi que les informations sur les incidents graves ou inattendus survenus chez les donneurs. L’hémovigilance comprend également le suivi épidémiologique des donneurs. »
L’hémovigilance prévoit donc pour tout produit sanguin labile :
Organisation : le réseau d’hémovigilance
Dans chaque région, un médecin coordonnateur de l’hémovigilance placé auprès du directeur de l’Agence régionale de santé (ARS) [auparavant directeur régional des affaires sanitaires et sociales (DRASS)] est chargé de suivre la mise en œuvre par les établissements de santé (ES) et de transfusion sanguine (ETS) des dispositions prévues par le code de la santé publique. Il est également chargé de coordonner le réseau d’hémovigilance. Cette disposition souligne le rôle prépondérant de l’État dans la mise en œuvre de l’hémovigilance.
Tous les acteurs du système de santé (professions médicales et paramédicales) sont impliqués dans le fonctionnement de l’hémovigilance. Ils doivent ainsi déclarer un incident dès son constat.
Le rôle privilégié des acteurs de santé comme moteurs de l’hémovigilance est à souligner, mais aussi leur responsabilité en termes de « devoir de déclarer ». En effet, le décret d’hémovigilance est particulièrement strict et, en ce sens, il est opposable aux professionnels comme suit : « Tout médecin, pharmacien, chirurgien-dentiste, sage-femme, infirmière ou infirmier qui a connaissance de l’administration d’un produit sanguin labile à un de ses patients et qui constate un effet inattendu ou indésirable dû ou susceptible d’être dû à ce produit, doit le signaler sans délai au correspondant d’hémovigilance de l’établissement de santé dans lequel a eu lieu la transfusion ou à défaut à l’établissement de transfusion sanguine distributeur […] »
Au quotidien, le dispositif d’hémovigilance repose sur les professionnels de santé, mais aussi sur le réseau des correspondants d’hémovigilance et les Comités de sécurité transfusionnelle et d’hémovigilance (CSTH) dans les ES privés, et sur la sous-commission de la commission médicale d’établissement (CME) chargée de la sécurité transfusionnelle et de l’hémovigilance (SCSTH) dans les ES publics et PSPH (participant au service public hospitalier).
Conformément au décret du 1er février 2006, tout établissement de santé public ou privé qui transfuse doit se doter d’un correspondant d’hémovigilance. Il est précisé que le nom de ce correspondant désigné par le directeur de l’établissement, après avis de la CME, doit être communiqué à l’Afssaps, au coordonnateur régional d’hémovigilance (CRH) concerné, et à l’ETS.
Missions pour les correspondants d’hémovigilance
Elles peuvent être synthétisées ainsi :
Rôles et missions des CSTH et SCSTH
Déclaration obligatoire des EIR
Explorations complémentaires
Quelle que soit la gravité de l’effet indésirable, il faudra réaliser :
c) Incidents graves
Un incident grave est un incident lié aux prélèvements de sang, à la qualification biologique du don, à la préparation, à la conservation, à la distribution, à la délivrance ou à l’utilisation des PSL, dû à un accident ou une erreur, susceptible d’affecter la sécurité ou la qualité de ce produit et d’entraîner des effets indésirables graves, c’est-à-dire des effets indésirables entraînant la mort ou mettant la vie en danger, entraînant une invalidité ou une incapacité, ou provoquant ou prolongeant une hospitalisation ou tout autre état morbide. La rédaction de la fiche de déclaration d’incident grave est obligatoire.
d) Effets indésirables
Les effets indésirables survenus chez un receveur de PSL sont classés selon les critères de gravité suivants :
N.B. Il existe un grade 0 : pas de manifestations cliniques ou biologiques.
La déclaration d’un effet indésirable est effectuée par les correspondants d’hémovigilance. Elle nécessite le remplissage d’une fiche d’effet indésirable receveur (FEIR).
Pour chaque déclaration d’effet indésirable, une analyse au cas par cas par le correspondant devra permettre d’établir le lien de causalité entre la transfusion de PSL et la survenue de l’effet indésirable. Les niveaux d’imputabilité sont classés selon les critères suivants :