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Infections transmises par voie transplacentaire hématogène
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Syphilis
L’association syphilis et grossesse est rare en France. Chez la femme enceinte, le risque principal est la syphilis congénitale. Celle-ci est liée à une contamination fœtale hématogène par voie transplacentaire de la deuxième moitié de la grossesse.
Malgré l’existence d’une antibiothérapie efficace depuis plus de 50 ans, et d’un dépistage systématique au cours de la grossesse, la syphilis congénitale persiste encore, en particulier au sein des populations défavorisées, mal suivies ou à risque de contamination élevé.
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Risques pour le fœtus
La transmission du spirochète est transplacentaire, et s’effectue classiquement après 16 à 18 SA. La syphilis n’entraîne pas de malformations, ni de fausses couches du premier trimestre. Le traitement avant le quatrième mois évite tout risque d’atteinte fœtale.
Après le 4e mois, le tréponème peut provoquer un avortement tardif, un accouchement prématuré ou une mort in utero dans 40 % des cas.
Le risque de transmission materno-fœtale de l’infection est estimé entre 30 à 60 % en l’absence de traitement. Une syphilis congénitale peut être latente ou s’exprimer par des lésions polyviscérales : lésions cutanéomuqueuses avec pemphigus palmo-plantaire et syphilides, hépatomégalie, atteinte méningée, lésions osseuses.
Pour la mère, la grossesse ne modifie pas la symptomatologie de la syphilis.
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Diagnostic différentiel d’une sérologie positive
Les circonstances du diagnostic de syphilis sont variables :
- syphilis primaire (chancre des grandes lèvres, petites lèvres, du col ou extragénital) : l’ulcération non douloureuse accompagnée de ganglions cicatrise spontanément en 3 à 6 semaines ;
- syphilis secondaire : les manifestations surviennent 2 à 12 semaines après le chancre et se caractérisent par des éruptions cutanées de type variable (macules, papules, pustules) ;
- syphilis tertiaire où le diagnostic est sérologique ;
- à la naissance : le diagnostic peut être porté devant les lésions du nouveau-né.
Le diagnostic bactériologique est envisageable en cas de lésions cutanées par prélèvement des sérosités sur le chancre ou les lésions cutanées. Le tréponème est retrouvé à l’examen direct à l’ultramicroscope.
Le diagnostic sérologique est réalisé pour le dépistage lors du premier examen prénatal. La loi impose la mise en œuvre de deux réactions : un test antigène cardiolipidique et un autre avec un antigène tréponémique (tableau 27.1).
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Traitement
On utilise des pénicillines à effet retard et élimination lente :
- extencilline, 2,4 millions d’unités, renouvelé 8 jours plus tard ;
- biclinocilline, 1 million d’unités par jour pendant 15 jours.
On fera deux cures pendant la grossesse, la première le plus tôt possible, la deuxième à la fin du sixième mois, mais avec corticoïdes en prévention de la réaction d’Herxeimer par lyse des tréponèmes. En cas d’allergie à la pénicilline, on peut utiliser l’érythromycine : 500 mg 4 fois par jour pendant 30 jours.
À la naissance, il faudra faire un examen anatomopathologique du placenta et une sérologie (FTA-abs, avec recherche d’IgM) au sang du cordon pour rechercher une atteinte fœtale. Dans ce cas, un traitement de l’enfant sera instauré.
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Listériose
C’est une maladie infectieuse à déclaration obligatoire causée par l’ingestion d’aliments contaminés (anthropozoonose) par la bactérie Listeria monocytogenes, bacille à Gram positif. Un produit sain peut être contaminé par contact (dans un réfrigérateur, au rayon traiteur, etc.) avec un produit souillé : fromages, la charcuterie, les produits en gelée et poissons fumés. Les professionnels exposés sont ceux qui travaillent dans la boucherie et dans l’élevage animal.
La période d’incubation s’étend de quelques jours à plus de deux mois. La maladie peut commencer par l’apparition de symptômes semblables à ceux de la grippe, c’est-à-dire des crampes, des maux de tête et une fièvre persistante (présente dans 70 à 80 % des cas et isolée dans 20 % des cas). D’autres symptômes peuvent aussi apparaître comme des symptômes gastro-intestinaux (nausées, vomissements, diarrhée, constipation) ou un syndrome méningé, voire des douleurs lombaires faisant évoquer une infection urinaire. Dans certains cas, ces symptômes peuvent être suivis de manifestations cliniques graves représentées par des septicémies, des méningo-encéphalites.
Une rechute fébrile, avec bactériémie, peut être observée 3 à 4 semaines plus tard. La maladie non traitée est alors particulièrement dangereuse, déclenchant très souvent chez une femme enceinte un avortement spontané, volontiers fébrile, aux 1er et 2e trimestres, un accouchement prématuré d’un enfant infecté et la mort de l’enfant dans 20 à 30 % des cas.
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Conséquences de la listériose au cours de la grossesse
On estime que ce pathogène serait responsable d’environ 1 % des méningites bactériennes et de moins de 0,15 % de la mortalité périnatale. Après E. coli K1 et SGB, L. monocytogenes reste la troisième cause de méningite néonatale. La gravité de la listériose est donc due au tropisme de la bactérie pour le placenta et le système nerveux central.
Le nouveau-né est infecté in utero à la suite d’une bactériémie de la mère. La première étape de l’infection est la colonisation du placenta. Cette infection est rapidement associée à une chorioamniotite et à une infection sévère de l’enfant in utero. L’infection est évidente dès la naissance avec une cyanose, une apnée, une détresse respiratoire et des troubles de la conscience.
Dans ces formes graves, évoluant depuis plusieurs jours, la mortalité est élevée (parfois de 50 à 75 %). Dans près de 95 % des cas, il s’agit d’une méningite purulente avec de la fièvre, une insomnie, une irritabilité, des troubles de la conscience.
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Diagnostic de listériose
Au cours de la grossesse, il faut pratiquer des hémocultures chez toute femme enceinte ayant une fièvre inexpliquée (avec recherche de listériose). L’antibiothérapie doit être instituée au moindre doute. Au cours de l’accouchement, l’examen bactériologique du placenta et des lochies est réalisé, pratiquement toujours positif lorsque le recueil a été réalisé dans de bonnes conditions. La seule difficulté vient du fait que le placenta est souvent recueilli dans des conditions non stériles et est donc massivement contaminé. Un examen anatomopathologique, montrant les granulomes infectieux, peut être utile. Des hémocultures au moment d’une reprise fébrile à l’accouchement permettent aussi, parfois, d’isoler le germe à partir du sang. Une enquête environnementale à partir des aliments suspects peut être pratiquée, surtout en cas de suspicion d’épidémie.
Chez le nouveau-né, le germe est facilement isolé en culture pure à partir de prélèvements du sang et du liquide céphalorachidien. Il l’est constamment à partir du liquide gastrique obtenu par aspiration (prélèvement très fiable) du méconium et de la peau.
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Mesures préventives (encadré 27.1)
Encadré 27.1 Aliments à éviter et règles d’hygiène à respecter
Aliments à éviter
- Fromages à pâte molle au lait cru, fromages vendus râpés
- Graines germées crues (soja, luzerne)
- Produits de charcuterie cuite consommés en l’état (pâté, rillettes, produits en gelée, jambon cuit…) ou achetés au rayon traiteur. Les faire cuire avant consommation (lardons, bacon, jambon cru…)
- Si achetés, préférer les produits préemballés et les consommer rapidement après leur achat
- Coquillages crus, surimi, tarama.
Règles d'hygiene à respecter:
- Cuire soigneusement les aliments crus d’origine animale (viandes, poissons)
- Laver soigneusement les légumes crus et les herbes aromatiques
- Conserver les aliments crus (viande, légumes …) séparément des aliments cuits ou prêts à être consommés
- Après la manipulation d’aliments non cuits, se laver les mains
- Nettoyer les ustensiles de cuisine qui ont été en contact avec ces aliments
- Nettoyer fréquemment et désinfecter ensuite avec de l’eau javellisée le réfrigérateur
- Les restes alimentaires et les plats cuisinés doivent être réchauffés soigneusement avant consommation immédiate
La meilleure prévention consiste à éviter la consommation des aliments le plus fréquemment contaminés et à respecter certaines règles lors de la manipulation et la préparation des aliments. Ces recommandations sont liées à la nature même de L. monocytogenes, son habitat et sa résistance. L. monocytogenes résiste au froid mais est sensible à la chaleur.
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Traitement
Le traitement de base de la listériose est l’antibiothérapie. On utilise en général les associations β-lactamines-aminosides. Si une listériose est suspectée et diagnostiquée par les hémocultures chez la femme enceinte, le traitement repose sur l’ampicilline (6 g/j) pendant 4 semaines, voire pour certains jusqu’à l’accouchement, et pour certains associée à un aminoside 3 mg/kg une injection par jour pendant 5 jours.
Toute affection fébrile de la grossesse doit être traitée par amoxicilline pendant 10 jours.
Attention:Listeria monocytogenes est résistant aux céphalosporines
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