2  -  L’information familiale: Devoir moral ou obligation légale envers les apparentés ?


Lorsque le diagnostic d’une maladie génétique est posé pour la première fois dans une famille, le choc de l’annonce est double : tout d’abord pour la personne atteinte, ensuite pour les membres de sa famille avec lesquels elle partage une partie de ses gènes.
Les connaissances sur la maladie du « cas index » ont souvent un intérêt pour sa parentèle. Certaines maladies génétiques, si elles sont dépistées suffisamment tôt, peuvent bénéficier de soins spécifiques ou de mesures de prévention. Plus souvent encore, c’est la possibilité d’obtenir des informations qui est considérée comme un avantage (droit de savoir, organisation de sa vie procréative…).

Pour le médecin, deux valeurs entrent en conflit : d’une part, le respect de la confidentialité sur les données de santé du « cas index », d’autre part, un devoir d'information vis-à-vis de la parentèle.

Déclinaison de ce conflit de valeurs sous forme de questions :

Le médecin peut-il simplement proposer au malade d’éclairer les membres de sa famille ? Doit-il plutôt l’inciter à le faire, ou même tenter de le convaincre?
Qui doit transmettre l’information ?

  • La personne malade ou son représentant légal auquel vient d’être annoncé l’origine génétique de la pathologie ? Ainsi, outre le poids de la maladie, les personnes concernées devront elles assumer la charge de délivrer un message complexe à des parents plus ou moins proches, ou supporter la culpabilité de ne pas l’avoir fait ?
  • Le médecin ou un tiers désigné pourraient-ils se substituer au sujet en difficulté au regard de ce devoir d’information ?


Dans quels cas l’information devra-t-elle être délivrée?

  • Chaque fois que les proches sont susceptibles de bénéficier d’un traitement efficace ou d’un moyen de prévention ?
  • Est-ce que le fait de n’avoir pu accéder à une démarche de conseil génétique ou à un diagnostic prénatal doit être considéré comme une perte de chance pour le parent resté dans l’ignorance ?


Que faire au cas où le patient refuserait de contacter ses proches au nom de son droit à garder le secret ?
En un mot, quels sont les devoirs et les responsabilités de chacun des partenaires de la relation de soin vis à vis des apparentés à risque ?

Encadrement juridique actuel depuis juillet 2011 (L.1131.1.2 du CSP) :

Lors de la révision de la loi de bioéthique en juillet 2011, le législateur a tenté de répondre à chacune de ces questions de la façon suivante :

  • Préalablement à la réalisation de tests génétiques, l’information délivrée en consultation doit aborder cette dimension familiale et l’éventuel devoir d’informer la parentèle
  • Ce devoir d’information de la parentèle échoit en priorité au consultant, au cas où serait identifiée « une anomalie génétique grave dont les conséquences sont susceptibles de mesures de prévention… ou de soin »
  • La possibilité de recourir à un conseil génétique est considérée comme une mesure de prévention
  • Le médecin doit aider la personne à transmettre l’information aux membres de sa famille (en désignant les personnes à risque et en remettant un résumé écrit des données à transmettre)
  • Si la personne ne souhaite pas informer elle-même les membres de sa famille, elle peut demander par écrit au médecin prescripteur de procéder à cette information.
  • « Le médecin porte alors à leur connaissance l'existence d'une information médicale à caractère familial susceptible de les concerner et les invite à se rendre à une consultation de génétique, sans dévoiler ni le nom de la personne ayant fait l'objet de l'examen, ni l'anomalie génétique, ni les risques qui lui sont associés ».
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