5. 4 - Atteinte rénale

Environ 50 % des patients atteints de myélome présentent une atteinte rénale ; celle-ci est due à la production excessive de chaînes légères d’Ig monoclonales, réalisant deux types anatomocliniques de néphropathie :
– la néphropathie tubulo-interstitielle avec cylindres, caractéristique du rein myélomateux ;
– la néphropathie par dépôts (glomérulaires et/ou tubulo-interstitiels) : soit dépôts de fibrilles d’amylose de type AL, soit dépôts non fibrillaires de chaînes légères (maladie de Randall).

5. 4. 1 - Néphropathie tubulo-interstitielle, ou rein myélomateux

Elle est fréquente : 80 % des insuffisances rénales aiguës au cours du myélome multiple sont liées à cette tubulopathie.
Elle est le fait de l’obstruction tubulaire par des cylindres composés de l’agrégation de chaînes légères néphrotoxiques et d’une protéine, la protéine de Tamm et Horsfall, synthétisée par les cellules de la branche ascendante de l’anse de Henlé. Cette obstruction tubulaire conduit à la rupture de la membrane basale. La précipitation des cylindres est favorisée par :
– la déshydratation secondaire à l’hypercalcémie, aux traitements (diurétiques, chimiothérapie), aux infections ;
– les médicaments néphrotoxiques (AINS, inhibiteurs de l’enzyme de conversion) ;
– les produits de contraste iodés.
Le traitement est double, d’une part celui du myélome, d’autre part celui de la néphropathie : diurèse abondante (environ trois litres par jour), alcalinisation des urines, correction des facteurs aggravants (éviter les examens avec produit de contraste).

5. 4. 2 - Syndrome de Fanconi

La tubulopathie de type proximal avec syndrome de Fanconi est très rare, elle est le témoin d’une toxicité particulière des chaînes légères kappa vis-à-vis des cellules tubulaires.
Elle associe une tubulopathie avec glycosurie à glycémie normale, aminoacidurie généralisée, hypophosphatémie, acidose chronique. Son traitement est symptomatique (correction de l’acidose, de l’hypophosphatémie, supplémentation en 1-α-hydroxyvitamine D3).

5. 4. 3 - Néphropathie par dépôts d’Ig

5. 4. 3. 1 - Amylose

Sa fréquence est variable : 5 % à 10 %. Elle se rencontre essentiellement dans le myélome à chaînes légères lambda. Les localisations tissulaires, rénales, cardiaques, neurologiques, synoviales, et la séméiologie clinique sont celles décrites dans l’amylose AL.

5. 4. 3. 2 - Maladie des chaînes légères : syndrome de Randall

Les chaînes légères produites en excès ne prennent pas de structure fibrillaire. Cliniquement, le tableau associe néphropathie glomérulaire avec protéinurie, voire syndrome néphrotique.

6. 1 - Évolution

Il est exceptionnel d’obtenir la guérison. Le traitement fait régresser la dysglobulinémie, corrige l’anémie, l’hypercalcémie, l’insuffisance rénale. L’os se reconstruit exceptionnellement. Puis, la maladie évolue à nouveau.
Cependant, les progrès thérapeutiques ont permis d’allonger la survie. Chez le sujet âgé de moins de soixante-cinq ans, la survie médiane est de cinquantesept mois sous chimiothérapie haute dose. Sous schéma « Alexanian », la survie est de trente-six mois.

6. 2 - Pronostic

Le pronostic global du myélome multiple reste péjoratif. Il existe cependant des disparités importantes dans la survie en fonction des types de myélome (formes peu actives : myélome indolent, stade I) ou des traitements réalisés.
Différents critères de pronostic sont utilisés :
– la classification de Durie et Salmon évalue l’importance de la masse tumorale (tableau 21.I). Elle tient compte du taux d’Ig monoclonale quantifiée sur l’EPS ou l’EPU, du taux d’hémoglobine, de la calcémie, de l’existence de lésions ostéolytiques sur les radiographies, de la créatinémie ;
– d’autres critères pronostiques péjoratifs sont individualisés :
   • la présence d’anomalies cytogénétiques, telles que t(4;14), t(14;16), del13, del17p sur l’analyse par FISH des plasmocytes tumoraux ;
   • le taux élevé de β2-microglobuline sérique ; ce taux est lié à l’importance de la masse tumorale ;
   • l’hypoalbuminémie ;
   • le taux de β2-microglobuline sérique et d’albumine, qui permet de définir le pronostic selon l’ISS, International Staging System ;
   • un taux élevé de CRP ;
   • un taux élevé de LDH

Tableau 21.I. Classification de Durie et Salmon (1975) à trois niveaux de cotation.

6. 3 - Surveillance

La surveillance est clinique et biologique. Elle a pour but d’apprécier l’efficacité du traitement et de dépister les rechutes du myélome.
Le traitement doit permettre d’obtenir la disparition de la douleur et l’amélioration de l’état général. L’aggravation clinique doit faire rechercher une reprise évolutive de la pathologie.
La surveillance biologique comprendra :
– EPS ou EPU, en cas de gammapathie secrétée ; le traitement doit entraîner la diminution du pic sur l’EPS ou la disparition de la protéinurie ;
– numération-formule sanguine, calcémie, créatininémie ; l’objectif du traitement est de normaliser les anomalies préexistantes (anémie, hypercalcémie, insuffisance rénale).


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