2 . 3  -  Prise en charge au centre de référence MIN

2 . 3 . 1  -  Accueil des parents


L’entretien a lieu dans une pièce calme, afin de préserver l’intimité et la confidentialité de l’échange.

Il importe de déculpabiliser les parents, d’écouter leur vécu du drame et de répondre à leurs questions. Il est nécessaire de les informer à propos des investigations médicales à venir, en recueillant leur consentement écrit pour la réalisation d’une autopsie.

Les entretiens avec les parents devront être répétés.

Ils permettront de recueillir les éléments du dossier médical, de bien connaître la famille (parents et fratrie), d’aider les parents à franchir les étapes administratives (rôle de l’assistante sociale), ainsi que de proposer le suivi psychologique nécessaire.

« Quand il ne semble plus rien y avoir à faire, tout au contraire peut être fait ».

2 . 3 . 2  -  Investigations médicales


Données cliniques


L’anamnèse initialement recueillie sur la fiche d’intervention est complétée :

  • antécédents personnels (pathologies des premiers mois) et familiaux ;
  • suivi de la grossesse, contact avec le médecin traitant de l’enfant ;
  • habitudes de sommeil, conditions de garde, contage infectieux, modalités d’alimentation.

Un examen clinique complet est à nouveau réalisé :

  • prise de la T°C rectale, évaluation de la morphologie (P, T, PC) ;
  • appréciation de l’aspect des téguments (hématomes, rigidité, lividité) ;
  • inspection de la cavité buccale et des voies ORL (signes de rejet oral) ;
  • palpation du foie et de la rate ;
  • réalisation d’un fond d’œil.

Données paracliniques (tableau 9.3)

Tableau 9.3 Examens complémentaires en cas de MIN (d’après la HAS, 2009)
Biologie 
                       
 – NFS-plaquettes, CRP
                       
 – 2 hémocultures, examen du LCR, ECBU par sondage
                       
 – Analyses sur prélèvements locaux :
• bactériologie : nez, pharynx, trachée (Bordet-Gengou), selles
• virologie : nez, pharynx, trachée (VRS, (para)influenza, entérovirus), selles
• toxicologie : sang, urines, liquide gastrique, bile, cheveux avec racines
• humeur vitrée : ionogramme, taux de sucre, peptide C, ± toxiques
                       
 – Profil des acylcarnitines plasmatiques
                       
 – À conserver : sang, sérum, LCR et urines congelés, sang sur papier buvard
                       
 – Si orientation particulière : culture de peau, recherche génétique de QT long
Imagerie 
                       
 – TDM ou IRM cérébrale
                       
 – Radiographies du thorax, crâne (F/P), rachis (F/P), bassin (F), membres (F)
                       
 – ± TDM ou IRM corps entier (selon les possibilités)

Seule une enquête complète bien conduite pourra éventuellement conclure à une MIN inexpliquée, en l’absence de cause identifiée.

2 . 3 . 3  -  Autopsie


L’autopsie est l’examen clé pour la recherche étiologique.

Elle est réalisée dans les 48 heures suivant le décès, par un anatomo-pathologiste spécialisé (au mieux à compétences médicolégales), suivant un protocole standardisé comprenant un examen externe et des photographies scientifiques, des prélèvements bactériologiques et toxicologiques, des examens macroscopiques et histologiques.

L’autopsie doit être systématiquement proposée, mais n’a aucune obligation légale.

Un accord écrit doit être obtenu auprès des parents. Le refus de ces derniers peut conduire (selon le contexte) le médecin à réaliser un signalement judiciaire. Une autopsie médicolégale peut être alors assurée. Il est important de donner aux parents des explications concernant son intérêt, sa réalisation, les conditions de retour du corps pour les obsèques (délai, aspect physique). Aucune religion ne s’oppose à cet examen.

L’autopsie est essentielle : examens macroscopiques et histologiques.

2 . 4  -  Démarches médicolégales

2 . 4 . 1  -  Certificat de décès


L’établissement d’un certificat de décès est une obligation légale.

Il s’agit d’un document à la fois administratif et d’évaluation de santé publique, dont la rédaction est scindée en deux parties adaptées à chacun de ces objectifs.

La partie administrative (supérieure, nominative) distingue les causes de décès non suspectes (case « prélèvements en vue de rechercher la cause du décès »), des causes de décès suspectes (case « obstacle médicolégal »). Elle est adressée au service de l’État civil, à des fins juridiques et sociales.

La partie médicale (inférieure, anonyme) renseigne sur la cause la plus probable du décès (partie I) et sur les éventuelles causes associées (partie II). Elle est adressée au CépiDc (Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès) de l’Inserm.

La particularité de la rédaction de ce certificat dans le contexte de MIN souligne que la cause du décès ne peut être que rarement établie définitivement lors de la constatation initiale du décès de l’enfant.

Un certificat médical de décès complémentaire, tenant compte de l’ensemble des investigations, et notamment de l’autopsie (rubrique spécifique), statuera de manière définitive sur la cause du décès (maladie, cause externe, MIN inexpliquée).

Cocher la case « obstacle médicolégal » du certificat de décès en cas de suspicion de maltraitance.

2 . 4 . 2  -  Signalement judiciaire


L’éventualité d’un signalement judiciaire peut être évoquée :

  • lors de la prise en charge au domicile :
    • signes cliniques évocateurs (ecchymoses, brûlures, morsures, maigreur extrême),
    • refus de transport du corps vers un centre de référence MIN ;
  • lors de l’enquête au centre de référence MIN :
    • contexte évocateur lors des premières investigations cliniques et paracliniques,
    • refus de réalisation d’une autopsie, résultats de l’autopsie.

Au domicile, le médecin coche la case « obstacle médicolégal à l’inhumation » sur le certificat de décès, et fait un signalement judiciaire auprès du procureur de la République.

Le refus d’une autopsie médicale de la part des parents peut conduire à la réalisation d’une autopsie médicolégale ordonnée par la Justice.

Toute personne a l’obligation de signaler les cas de maltraitance ou ceux de forte suspicion. Il s’agit d’une dérogation au secret professionnel pour les médecins.

L’éventualité d’un signalement judiciaire peut être évoquée à tout moment de la prise en charge d’une situation de MIN.

2 . 5  -  Suivi de la famille

2 . 5 . 1  -  Synthèse diagnostique


Une confrontation pluridisciplinaire fait une synthèse des éléments diagnostiques.

Trois situations sont alors envisageables :

  • cause précise identifiée : concordance anatomo-clinique (ex. : malformation cardiaque) ;
  • cause possible : pathologie aiguë ou chronique jusqu’ici méconnue (ex. : coqueluche) ;
  • pas de cause retenue : MIN inexpliquée.

Cette synthèse diagnostique peut conduire à proposer des investigations complémentaires pour la famille (fratrie, parents) et discuter d’une éventuelle prise en charge préventive ou curative.

En cas de MIN de jumeau, il convient d’évaluer simultanément l’autre jumeau comme à risque. Une hospitalisation de courte durée est de règle, pour surveillance médicale et réassurance des parents.

2 . 5 . 2  -  Suivi à long terme


Un accompagnement régulier est nécessaire avec un médecin du centre de référence MIN.

Un soutien psychologique doit être proposé aux parents et à l’entourage. La famille peut être également orientée vers une association de parents.

Les mesures préventives générales doivent être rappelées.

Une grossesse ultérieure justifie le plus souvent d’une réassurance, avec l’aide si nécessaire de l’équipe du centre de référence MIN. Seules de rares situations, où une pathologie familiale à risque a été identifiée, justifient un suivi médical adapté.

Un suivi médicopsychologique de longue durée de la famille est indispensable.

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