4  -  Document 4 : Points d'impacts sur les thérapeutiques anti-inflammatoires


Les glucocorticoïdes sont de puissants agents anti-inflammatoires, aux points d'impact multiples sur les différentes étapes et sur différents mécanismes des réactions inflammatoires. Il est tentant de les utiliser en thérapeutique, cependant leurs effets secondaires peuvent être importants, ce qui justifie le développement d'approches alternatives. La meilleure connaissance des interactions moléculaires impliquant les différents acteurs de la réponse inflammatoire permet de mieux juger de l'intérêt de nouveaux ciblages pour de nouveaux traitements.

4 . 1  -  Effets multiples : les glucocorticoïdes

Les glucocorticoïdes exercent surtout des effets inhibiteurs qui limitent l'action des principaux médiateurs de la réponse inflammatoire. Les principaux points d'impact sont :

  • la synthèse de cytokines (inhibition surtout de la synthèse de l'IL-1, de l'IL-6, et à un moindre degré du TNFa)
  • la production des médiateurs lipidiques (baisse de production des prostaglandines et des leucotriènes)
  • l'action des protéases (inhibiteurs de la collagénase, de l'élastase, des activateurs du plasminogène)
  • la synthèse de NO
  • le trafic et la domiciliation des cellules inflammatoires (inhibition des facteurs chimiotactiques et baisse de l'expression des molécules d'adhérence)
  • la perméabilité vasculaire (limitation des processus de vaso-perméabilité).

4 . 2  -  Effets cibles sur les cytokines

Nous avons vu l'importance du rôle joué par les cytokines pro-inflammatoires dans chacune des étapes de la réaction. Pour bloquer leurs effets, trois stratégies peuvent être envisagées :

4.2.1. Cytokines antagonistes :

On peut utiliser des cytokines antagonistes anti-inflammatoires telles que l'IL10 ou le TGFb. Dans la maladie de Crohn, des protocoles ont testé l'efficacité de traitements par l'IL10.

4.2.2. Récepteurs solubles des cytokines :

On peut utiliser des récepteurs solubles capables de lier la cytokine avant que celle-ci ne se fixe à son récepteur membranaire et n'induise un signal d'activation à la cellule. Dans le cas du récepteur soluble du TNF à forte concentration, on note cet effet compétiteur. Dans la polyarthrite rhumatoïde, certains protocoles en cours utilisent des récepteurs solubles du TNF pour limiter le processus inflammatoire. Il faut noter, toutefois, que la liaison " récepteur soluble-ligand " peut aussi prolonger l'effet de la cytokine en rendant ce ligand moins sensible à la dégradation. Ce résultat s'observe avec le récepteur soluble du TNF à faible concentration ou avec le récepteur soluble de l'IL6.

4.2.3. Anticorps anti-cytokines :

Des anticorps monoclonaux " humanisés " anti-cytokines sont utilisés dans certains protocoles, notamment des anti-TNF dans la polyarthrite rhumatoïde.

4 . 3  -  Effets cibles sur les médiateurs lipidiques

Différents agents thérapeutiques peuvent bloquer l'action des médiateurs lipidiques. Il existe ainsi :

  • des antagonistes du PAF-acether
  • des anti-leucotriènes : des récepteurs de leucotriènes ont été caractérisés. Il s'agit de Cys LT1 qui fixe le LTC4, le LTD4, le LTE4 et le Cys LT2 qui fixe le LTC4 et le LTD4. Des agents bloquant l'action de ces récepteurs ont été synthétisés. Certains de ces antagonistes sont utilisés dans l'asthme.
  • des anti-cyclo-oxygénases : les anti-inflammatoires non stéroïdiens ou AINS bloquent la voie 5 cyclo-oxygénase ou 5-CO (Aspirineâ, Ibuprofenâ, Sulindacâ). Il existe deux isoformes de la CO (COX1, COX2). Les prostaglandines produites par les COX1 (production constitutive) sont indispensables à la trophicité de certains tissus en particulier de l'estomac. Des anti-COX2, qui limitent la production de prostaglandines liée à la réaction inflammatoire (production inductible) ont peu d'effets sur l'estomac et sont aujourd'hui disponibles. L'Aspirine favorise aussi la synthèse d'eïcosanoïdes anti-inflammatoires comme les lipoxines.

4 . 4  -  Effets cibles sur les chémokines et les molécules d'adhérence

Pour limiter l'afflux de cellules inflammatoires dans un tissu " agressé ", on peut agir sur les facteurs chimiotactiques, notamment les chémokines, et sur les molécules d'adhérence.

4.4.1 Actions anti-chémokines

Certaines chémokines exercent des effets privilégiés sur une population cellulaire donnée. On peut citer, à titre d'exemple, le MCP-1 (monocyte chemo-attractant 1) actif sur les monocytes, l'IL8 actif sur le polynucléaire neutrophile, l'eotaxine actif sur le polynucléaire éosinophile. L'afflux local de leucocytes peut avoir des effets bénéfiques ou néfastes selon des situations. L'afflux de neutrophiles dans un foyer inflammatoire peut avoir des conséquences bénéfiques (endocytose, lyse de l'agent infectieux). En revanche, l'afflux d'éosinophiles semble être un facteur aggravant dans la réaction allergique. Un traitement anti-eotaxine ou anti-CCR3 (récepteur d'éotaxine) pourrait être utile. Il faut garder en mémoire que les récepteurs de chémokines n'ont pas pour seule propriété la capacité de fixer les chémokines. Ainsi le CCR3, récepteur de l'éotaxine est aussi le co-récepteur de la gp120 du VIH. Ces aspects sont à prendre en considération avant d'engager ces nouveaux choix thérapeutiques. Un autre exemple concerne les lésions athéromateuses : le blocage des interactions MCP-1/CCR2 est en cours d'évaluation.

4.4.2. Actions anti-molécules d'adhérences

Des modèles expérimentaux ont montré qu'une altération de l'expression de molécules d'adhésion par l'action d'anticorps monoclonaux bloquant ou après invalidation génique, peut limiter l'afflux des cellules dans un tissu "agressé". L'implication des molécules d'adhésion a été évoquée dans différentes situations pathologiques dont le choc septique ou le rejet de greffe. A l'avenir le blocage ciblé de leur action pourrait s'avérer utile. A titre d'exemple, on estime que dans les brûlures, environ 10% des lésions correspondent au traumatisme thermique direct et 90% à une réaction inflammatoire qui pourrait être supprimée ou diminuée en bloquant les molécules d'adhésion.

4 . 5  -  Actions cibles sur les lymphocytes CD4+

Les molécules CMH de classe II sont exprimées à la surface des cellules présentatrices d'antigènes et favorisent la coopération avec les cellules T CD4+. L'interféron gamma accroît l'expression des molécules de CMH classe II. Les statines entraînent une inhibition de l'expression inductible du CMH de classe II par l'interféron gamma. Cette action entraine une limitation de l'activation des lymphocytes CD4+ de polarité TH1 avec une baisse de la production des cytokines pro-inflammatoires.

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