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Quelle est la stratégie diagnostique dans les troubles de la statique pelvienne ?
L'examen clinique est essentiel dans cette pathologie et notamment l'appréciation de la gêne fonctionnelle.
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À l'interrogatoire
La symptomatologie est variable. Elle n'est pas corrélée à l'importance du prolapsus.
Il peut s'agir de la perception d'une « boule » ou d'une masse vulvaire. Cette saillie est majorée en position debout ou à l'effort et diminuée en position de repos ou en décubitus dorsalDéfinitionPosition allongée à l'horizontale, à plat-dos..
Dans certaines situations la saillie des viscères peut être responsable de lésions de frottements à l'origine de saignements ou de leucorrhéeDéfinitionÉcoulement non sanglant provenant du vagin. Elle peut être physiologique (par sécrétion de glaire cervicale et desquamation vaginale) ou pathologique témoignant d'une infection, le plus souvent d'une vaginite. Bien que le terme leucorrhée signifie littéralement « sécrétion blanche », la couleur de la sécrétion vaginale peut varier en fonction de la cause : elle peut aller d'une sécrétion laiteuse à verdâtre. Les écoulements sanguinolents sont à considérer comme des métrorragies. On considère comme anormales des pertes vaginales malodorantes ou responsables d'irritation et de démangeaison. (voir leucorrhée).
D'autres symptômes, témoin d'une pathologie du plancher pelvien, peuvent révéler un prolapsus :
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incontinence d'urines au repos ou à l'effort, impériosité mictionnelleDéfinitionImpériosité mictionnelle ou impériosité urinaire : Besoin urgent, ressenti par le patient, d'avoir à vider sa vessie. Elle peut s'accompagner d'une incontinence d'urine (le patient est incapable de se retenir et d'arriver aux toilettes à temps). (voir impériosité mictionnelle), urgences mictionnelles ou pollakiurieDéfinitionFréquence excessive des mictions en petites quantités. Ces mictions ont lieu à intervalles fréquents et sont liées à une sensation de plénitude vésicale (impression de vessie pleine) qui n'est pas due à une vessie pleine mais à une vessie présentant une irritation. Cette sensation s'accompagne d'une impression de plénitude même quand la vessie n'est pas pleine. diurne (> 6) ou nocturne (> 2), dysurieDéfinitionDifficulté à l'évacuation de la vessie. La dysurie est souvent méconnue car indolore et d'installation progressive. On décrit la dysurie d'attente, initiale au début de la miction, et la dysurie de poussée, parfois terminale. Cette dysurie s'accompagne d'une diminution de la force du jet. On en rapproche les mictions en deux temps, les gouttes retardataires, et la sensation de vessie non vide en fin de miction. (lié souvent à un prolapsus volumineux qui comprime l'urètreDéfinitionCanal de sortie de la vessie. Il a une fonction excrétrice dans les deux sexes (sortie de l'urine) et de plus chez l'homme une fonction reproductrice (passage du sperme)., pouvant être corrigée par une manœuvre digitale intravaginale), incontinence par regorgement ; en cas d'Insuffisance Urinaire d'Effort (IUE), on devra quantifier l'importance de l'IUE (1er degré provoqué par un effort de poussée, de rire, d'éternuement, de toux, du port d'une charge lourde, 2e degré provoqué par une marche rapide, 3e degré dû au fait de se lever). On pourra aussi utiliser une méthode plus objective : PAD testDéfinitionTest d'incontinence. qui consiste à peser des garnitures pour apprécier le volume d'urines perdues.
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incontinence anale au gaz ou au fèces, troubles de la défécation (dyschésieDéfinitionDéfécation difficile avec des efforts importants de poussée, des manœuvres digitales et une sensation d'évacuation incomplète. En outre, l'impossibilité ou la difficulté d'expulsion d'un ballonnet introduit dans l'ampoule rectale, la vidange rectale incomplète en défécographie et le ralentissement des marqueurs radio-opaques au niveau recto-sigmoïdien permettent d'être plus précis. anorectale, pouvant être corrigée par une manœuvre digitale intravaginale),
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troubles sexuels : impression de béance vulvaire, gaz intravaginaux, perte de sensibilité vulvovaginale, dyspareunieDéfinitionDyspareunie ou algopareunie : Douleur de nature et d'intensité variables ressentie lors des rapports sexuels. Presque systématique lors du premier rapport vaginal due au déchirement de l'hymen. Elle devient en revanche incapacitante lorsqu'elle a lieu à tous les rapports suivants. Les douleurs peuvent être les symptômes de pathologies le plus souvent bénignes mais parfois graves, aussi est-il fortement conseillé de demander l'avis d'un médecin gynécologue qui, seul, pourra répondre à toutes interrogations, poser un diagnostic et envisager un traitement. d'intromission par obstacle, saignements post-coïtaux, gêne liée à l'organe prolabéDéfinitionRelatif à un organe ayant suivi une descente, un prolapsus.,
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altération de la qualité de vie : appréciée par des échelles spécifiques (DitrovieDéfinitionÉchelle de qualité de vie spécifique des troubles mictionnels.) qui comportent des questions sur l'activité physique, sportive, le travail, l'anxiété…
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douleurs dorsolombaires.
Enfin, un prolapsus même important peut être totalement asymptomatique.
L'interrogatoire devra rechercher la cause du prolapsus, des facteurs favorisants de récidives (bronchite chronique, constipation, sport), déterminer l'âge, les antécédents obstétricaux et chirurgicaux (chirurgie de l'utérus, prolapsus, IUE…), le désir éventuel de grossesse et l'activité sexuelle.
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Examen clinique
L'examen est réalisé en position couchée puis éventuellement debout voire accroupie, vessie pleine et vessie vide.
Il comporte, en dehors de l'examen gynécologique habituel, l'inspection.
Elle recherche une béance vulvaire, une cicatrice périnéale d'épisiotomie, apprécie la distance anovulvaire, la trophicitéDéfinitionEnsemble des processus qui participent à la nutrition et au développement d'un tissu (ensemble de cellules), d'une partie de l'organisme ou d'un organe. des organes génitaux externes (cause de dyspareunie, de brûlures mictionnelles).
Ensuite, l'examen sous spéculumDéfinitionOutil médical – généralement en métal ou à usage unique en plastique – permettant d'explorer une cavité corporelle par l'écartement des parois. (voir spéculum) permet de vérifier l'aspect du col utérin (voire de pratiquer frottis). Ensuite il comporte plusieurs étapes, réalisées vessie pleine, position debout, couchée puis vessie vide :
- Puis les deux temps antérieur et postérieur après avoir séparé les deux valves du spéculum.
- Temps antérieur : À l'aide de l'une des deux valves, on refoule la paroi postérieure du vagin et on demande à la femme de pousser, peut apparaître une colpocèleDéfinitionAbaissement (ou prolapsus) des parois du vagin provoqué par la poussée du rectum ou de la vessie. antérieure stade 1, 2 ou 3. Ce bombement du vagin correspond le plus souvent à une cystocèleDéfinitionDescente de la vessie dans le vagin au niveau de sa paroi antérieure. C'est le prolapsus le plus fréquent, il entraîne souvent des troubles urinaires avec « sensation de boule » et pesanteur pelvienne. (saillie vésicale), parfois à une urétrocèleDéfinitionDilatation de l'urètre, qui fait saillie dans le vagin. (saillie antérieure de l'urètre). Peut apparaître également une fuite d'urines à l'effort. Dans la manœuvre de BethouxDéfinitionRefoulement du col utérin par un clamp courbe en appui sur la fourchette vulvaire., on refoule le col utérin à l'aide d'une pince et les fuites urinaires disparaissent. Dans la manœuvre de BonneyDéfinitionLors du toucher vaginal, deux doigts sont placés de part et d'autre de l'urètre en les rapprochant du pubis, mais surtout en remontant le cul-de-sac vaginal antérieur vers la cavité abdominale (réintégration du col vésical et du sphincter dans l'enceinte abdominale)., on remonte le col vésical dans l'enceinte abdominale en mettant deux doigts de part et d'autre du col vésical et ainsi, les fuites urinaires à l'effort disparaissent. Elle correspond à un bon pronostic chirurgical en cas d'IUE. Le TVT test ou manœuvre d'UlmstenDéfinitionSoutènement de l'urètre sans pression à l'aide d'une valve ou d'une pince longuette afin d'empêcher sa descente au cours d'un effort de poussée. consiste à réaliser un soutènement de l'urètre sans pression à l'aide d'une valve ou d'une pince longuetteDéfinitionPince utilisée en gynécologie comme un porte-compresse pour le badigeonnage antiseptique dans le cadre de la préparation du site opératoire (la peau, le vagin et le col utérin…) puis pour la réalisation des soins des plaies chirurgicales et traumatiques (nettoyage, antisepsie; pansements). Grâce à sa longueur et à la forme de son extrémité fonctionnelle, elle peut être aussi utilisée comme une pince de préhension des dispositifs médicaux (comme par exemple les fils de stérilet pour son retrait de la cavité utérine). afin d'empêcher sa descente au cours d'un effort de poussée. Si les fuites urinaires n'apparaissent plus, une intervention type TVT devrait être efficace.
- Temps postérieur : on refoule la paroi antérieure du vagin. À l'effort peut apparaître une colpocèle postérieure correspondant à une rectocèle (saillie du rectum dans le vagin) ou à une élytrocèle (hernie du cul-de-sac de DouglasDéfinitionCul-de-sac de Douglas ou cul-de-sac recto-vaginal : Repli du péritoine entre l'utérus et le rectum, formant un cul-de-sac recto-vaginal. Le cul-de-sac de Douglas est l'endroit où s'accumulent les liquides qui peuvent se trouver par accident dans la cavité péritonéale (sang, pus, etc.). Cet endroit du corps est accessible par le toucher rectal, ce qui permet le diagnostic de nombreuses pathologies. Chez l'homme, ce cul-de-sac est simplement l'extrémité inférieure de la cavité péritonéale, entre la face postérieure de la vessie et la face ventrale du rectum. dans la cloison rectovaginale). Le toucher rectal permettra de faire la différence entre les deux en percevant dans un cas des anses digestives prolabées correspondant à une hernie du cul-de-sac de Douglas.
L'examen est complété par un toucher vaginal pour l'exploration de l'utérus, des annexes et des releveurs et par un toucher rectal pour explorer la cloison rectovaginale, l'étude de la tonicité du sphincter de l'anus, le noyau fibreux central du périnée et la contractilité des muscles releveurs (puborectaux).
La qualité des muscles releveurs de l'anus appréciée en demandant à la femme de faire un effort de retenue qui est coté de 0 à 5.
L'examen des seins et l'examen général (recherche d'hernie de la paroi abdominale) doivent être réalisés.
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Examens complémentaires
Les examens complémentaires comportent :
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ECBU systématique,
- Explorations urodynamiques pour apprécier la qualité du sphincter, la contractilité vésicale, le degré de transmission des pressions abdominales, la stabilité vésicale et urétrale,
- Techniques d'imagerie pour apprécier la mobilité des organes par rapport aux structures osseuses (échographie, colpocystodéfécogrammeDéfinitionColpoCystoDéfécographie (CCD) : Exploration de la statique des différents organes du pelvis de la femme (vessie, utérus, vagin, rectum) par radiographie, après opacification de leurs cavités par un produit de contraste. C'est un examen à la fois morphologique (étude anatomique) et fonctionnel (étude dynamique), c'est pourquoi des clichés radiologiques sont pris au repos puis pendant la miction et lors de l'effort de défécation. Cet examen permet d'explorer les troubles comme une incontinence urinaire ou des troubles de la défécation., IRM…),
- Parfois, manométrieDéfinitionMéthode permettant de mesurer et d'enregistrer les pressions régnant à l'intérieur d'un segment du tube digestif. anorectale et défécographieDéfinitionExamen radiologique utilisé pour mettre en évidence des anomalies anatomiques statiques ou dynamiques rectales qui ne peuvent pas être détectées à l'aide d'examens radiologiques conventionnels, tels que radiographie de l'intestin ou rectoscopie. en cas de troubles de la défécation,
Ces examens ne sont pas toujours nécessaires.
Ils seront essentiellement prescrits si le tableau clinique est complexe ou mixte (prolapsus et IU par exemple), s'il s'agit d'une récidive ou d'un échec thérapeutique.
Agence Nationale d'Accréditation et d'Évaluation en Santé (ANAES). Bilans et techniques de rééducation périnéo-sphinctérienne pour le traitement de l'incontinence urinaire chez la femme à l'exclusion des affections neurologiques. HAS; 2000.
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